A bas la TVA sociale !

mardi 10 janvier 2012.
 

Tout le monde donc est au courant. Dans ses vœux, Nicolas Sarkozy a remis à l’ordre du jour le projet de « TVA sociale ». Je le cite : « Il faut alléger la pression sur le travail et faire contribuer financièrement les importations qui font concurrence à nos produits avec de la main d’œuvre à bon marché ». Pour que cela soit plus clair, je rappelle le contenu précis de ce projet. Il s’agit d’augmenter la TVA pour baisser encore les cotisations sociales à la charge de l’entreprise. On comprend très vite que sous la fumée des mots se cache à peine une vieillerie obsessionnelle chez les libéraux. Sous couvert d’« alléger la pression sur le travail », il s’agir surtout d’aggraver la ponction du profit en transférant à chacun le soin de se payer ses dépenses sociales par la TVA. Sur le plan économique, la TVA sociale serait aussi une mesure à contresens dans le contexte de récession actuel. Elle serait totalement contre-productive car elle contracterait la consommation et la demande en général et donc l’activité. C’est Bercy soi-même qui le dit. En 2004, une étude du ministère fut remise à Nicolas Sarkozy, alors ministre de l’économie sur le sujet. Elle concluait à un effet nul sur l’emploi à long terme et même à une légère baisse de PIB comme résultat d’une éventuelle « TVA sociale », en raison du choc négatif produit sur la demande. C’est également la conclusion à laquelle aboutit le chef économiste de la banque Natixis, Patrick Artus, quand il affirme qu’« en France, la consommation est le principal moteur de la croissance. Il est risqué de la pénaliser. »

Sur le plan social, le mécanisme de la « TVA sociale » revient à faire de la redistribution à l’envers en allégeant les prélèvements sur les richesses produites pour les augmenter sur les ménages. Et parmi les ménages, la hausse de la TVA pénaliserait surtout ceux qui ont les revenus les plus bas. On comprend pourquoi. C’est eux qui consomment tout leur revenu. Ce revenu est donc intégralement taxé à hauteur de la TVA. Tandis que les ménages aisés épargnent une partie de leurs revenus qui sont ainsi soustrait à cette TVA. Les 10 % des ménages les plus riches consacrent 3,4 % de leur revenu à la TVA, les 10 % les plus pauvres 8,1 %. La TVA est ainsi un impôt dégressif, dont la charge baisse quand le revenu augmente, à l’exact opposé de l’impôt sur le revenu. Notons d’ailleurs que cette nouvelle hausse de la TVA marginaliserait encore un peu plus l’impôt progressif dans le système fiscal français. Car la TVA représente déjà 51 % des recettes fiscales de l’Etat. Contre à peine 17 % pour l’impôt sur le revenu progressif. C’est-à-dire une des parts les plus faibles des pays industrialisés, puisque l’impôt sur le revenu représente en moyenne 20 % des recettes fiscales dans les pays de l’OCDE et même 30 % au Royaume-Uni.

Le projet de « TVA sociale » de Sarkozy n’est pas une nouveauté. C’est même un serpent de mer de son quinquennat. Dès la campagne présidentielle de 2007, Sarkozy avait préparé le terrain en proposant d’« imposer la consommation plutôt que le travail ». François Bayrou s’était aussi prononcé en faveur d’une telle hausse de la TVA. Il envisageait même de l’augmenter encore plus fortement pour combler le déficit budgétaire, ce qui aurait représenté entre 5 et 14 points de hausse de TVA selon les hypothèses de résorption envisagées. Sarkozy à peine élu, le projet de « TVA sociale » s’était précisé et Sarkozy avait confié au gouvernement le soin de rédiger un rapport sur le sujet. On se souvient ensuite que le tollé suscité par ce projet, révélé par Laurent Fabius à la télévision, avait valu à l’UMP de remporter une victoire moins nette aux législatives qu’à la présidentielle. La « TVA sociale » a été dès lors progressivement mise en sourdine. A la rentrée de septembre 2007, Eric Besson comme secrétaire d’Etat à la prospective et Christine Lagarde comme ministre de l’économie remettent chacun un rapport sur le sujet. Toujours zélé, Besson s’y déclare plutôt favorable à la « TVA sociale », alors que Lagarde affirme que « la TVA sociale n’est pas propice en France ». Fillon met ensuite le projet en sommeil, en appelant à « élargir la réflexion sur le financement de la protection sociale ». Ils « élargissaient » en silence jusqu’à ces vœux…

Mais Sarkozy, l’UMP et le Medef ont toujours gardé ce projet sous le coude. On connaît : « N’en parler jamais, y penser toujours ». La veille du premier tour des régionales, le 13 mars 2010, dans une interview au « Figaro Magazine », Nicolas Sarkozy avait ainsi ressuscité le projet que l’on croyait enterré depuis l’automne 2007. Le « Figaro Magazine » avait demandé au Président : « Avez-vous renoncé à votre idée de TVA sociale ? ». Réponse de Sarkozy : « L’expression TVA sociale est incompréhensible et inadaptée. Le sujet est pourtant bien à l’ordre du jour. Il faut continuer à réfléchir au moyen de financer notre protection sociale autrement qu’en taxant le travail ». Mot pour mot le texte de ses vœux sur le sujet.

En fait, la « TVA sociale » est un refrain du programme commun dans le camp libéral. Le MEDEF se prononce pour une baisse de cotisations sociales compensée par une hausse de la TVA et de la CSG. Le patron de l’UMP Jean-François Copé est partisan d’une « TVA anti-délocalisation » pour « baisser le coût du travail » et « financer autrement la protection sociale » en la faisant supporter par "l’ensemble de la population". C’est certainement la mise en mot la plus rusée qui ai été produite sur le sujet puisqu’elle s’appuie sur les grandes peurs du moment. Au PS, le directeur de la communication de François Hollande, Manuel Valls, s’est prononcé dès 2010 pour « un basculement de cotisations vers la TVA » pour « améliorer la compétitivité de certains secteurs industriels exposés à la concurrence » (LeMonde 14 octobre 2010). Quant au FN, je signale aussi que dans son programme présenté en décembre, Marine Le Pen propose de « dégager de nouvelles recettes de TVA ». Ce qui, sans en avoir l’air, signifie qu’elle partage avec le camp libéral et le « système » la préférence pour l’augmentation de la TVA.

Venons-en au cœur de l’argumentaire des partisans de la « TVA sociale ». Les partisans de la TVA « sociale » prétendent qu’elle lutterait contre les délocalisations en faisant baisser les coûts de production en France grâce à la baisse des cotisations des entreprises. Cela rendrait plus compétitifs les produits français par rapport aux produits importés. On peut d’emblée objecter que les délocalisations se poursuivent et s’accélèrent alors que cela fait dix ans que les baisses de cotisations sociales s’accumulent. Et on ne manquera pas de souligner que les produits locaux seront eux aussi renchéris. Taxer la consommation des ménages ne pénaliserait que secondairement les importations. On dispose d’une étude incontestée sur le sujet. C’est un rapport du Sénat de janvier 2009 sur la relation entre consommation des ménages et importations. Il montre que le contenu moyen en importations de la consommation des ménages n’est en effet que de 14 %. Ce pourcentage résulte des chiffres calculés pour l’occasion par l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). Ce rapport entre dans les détails. Il montre que le contenu en importations de la consommation des ménages se situe entre 8 et 10 % pour les produits agro-alimentaires, 20 % pour les meubles, 35 % pour l’automobile, 40 % pour le textile. Quant à la baisse des cotisations sociales, son effet sur l’emploi n’est pas non plus prouvé, comme l’ont souligné plusieurs rapports de la Cour des comptes. 70 % des baisses de cotisations (soit une vingtaine de milliards des 32 milliards d’exonérations annuelles) sont concentrés dans le secteur des services, peu exposé aux délocalisations.

Prétexte donc que la question des délocalisations et celle du financement de la protection sociale ! La hausse de la TVA est une recette à la mode chez les libéraux. C’est une question idéologique. Je la résume dans sa forme brutale : « Quand vous allez chez le boucher, au moment de payer, on ne vous demande pas combien vous gagnez pour vous dire ce que vous devez ». Dans la doctrine libérale et dans l’esprit capitaliste, l’impôt sur le revenu, impôt progressif, est une aberration. On paye ce qu’on consomme un point c’est tout. La TVA « sociale » est un cheval de Troie destiné à disloquer le système de la solidarité dans le lien social. C’est l’Allemagne de la grande coalition qui a uni dans un même gouvernement la droite et le SPD qui a été précurseur dans ce domaine. En 2007, la droite et les sociaux-démocrates ont passé la TVA de 16 à 19 %. Depuis, les plans d’austérité dans toute l’Europe accablent les peuples de hausses de TVA. En Grèce, les plans d’austérité successifs ont fait passer la TVA de 19 à 23 %. Avec le succès que l’on sait. En Italie, le gouvernement Monti est en train de l’augmenter de 21 % à 23 %. Et en Hongrie, l’ultra-libéral Viktor Orban vient de la passer de 25 à 27 %, triste record d’Europe.

Naturellement, conformément à la doctrine du choc si bien décrite par Naomi Klein, il faut d’abord abasourdir le citoyen avant de tuer un principe civique. C’est le rôle que joue la peur des « déficits » et des « dettes abyssales » moulinée à tour de bras par les griots du système. Combler les déficits ne se fera pas à proportion des moyens de chacun. Mais à proportion de ses besoins. Le monde à l’envers. Telle est la TVA. En France, c’est François Bayrou qui assume le plus honnêtement cette option en proposant désormais d’augmenter la TVA sans même réduire les cotisations sociales. Il est rare qu’on rappelle alors ce que cela veut dire concrètement. Sachant qu’un point de TVA rapporte environ 10 milliards d’euros, augmenter la TVA pour combler les déficits, signifierait une hausse de 2 points pour boucher le déficit de la sécu (19 milliards en 2010). Ou encore l’augmenter de 9,5 points pour boucher le déficit de l’Etat (95 milliards en 2011). A bon entendeur salut !

2) Jean-Luc Mélenchon contre la "TVA prétendument sociale" (Le Parisien)

Jean-Luc Mélenchon, candidat du Front de gauche à l’Elysée, a vivement critiqué lundi sur France Info la "TVA prétendument sociale" évoquée par Nicolas Sarkozy lors de ses voeux présidentiels.

Jean-Luc Mélenchon, candidat du Front de gauche à l’Elysée, a vivement critiqué lundi sur France Info la "TVA prétendument sociale" évoquée par Nicolas Sarkozy lors de ses voeux présidentiels.

"Le problème avec cet homme, c’est qu’il continue à appliquer de manière aveuglée son petit catéchisme libéral écrit il y a plus de vingt ans par des Reagan et des Thatcher et qui ne correspond en rien à la situation dans laquelle on vit", a déclaré l’eurodéputé à propos de ce projet annoncé le 31 décembre par M.

Pour M. Mélenchon, "ils appellent ça TVA anti-délocalisation. Mais quelle mauvaise plaisanterie ! Si l’on veut lutter contre la délocalisation, il faut empêcher que les entreprises délocalisent pour profiter du dumping social, c’est-à-dire du fait que les marchandises coûtent moins cher ailleurs parce que le travail est moins bien payé" et parce que la production se fait "dans des conditions environnementales lamentables".

"Donc on met des visas d’entrée aux marchandises, pas besoin de TVA sociale pour faire ça", a déclaré M. Mélenchon.

Source :

http://www.leparisien.fr/flash-actu...

Jean-Christophe Verhaegen

1) La menace « TVA sociale »

Derrière les critiques contre les 35 heures se profile souvent l’idée de compenser une éventuelle fin des exonérations de cotisations sociales par une hausse de la TVA, faussement appelée "sociale". Manuel Valls lui-même s’est prononcé en faveur de ce basculement fiscal défendu par la droite depuis 2007 mais jusque là pas encore mis en oeuvre.

Valls pour la TVA sociale

Dans une tribune publiée dans le Monde du 14 octobre 2010, Manuel Valls se prononçait avec Jean-Marie Le Guen en faveur d’une hausse de la TVA permettant de financer une baisse des cotisations sociales : "une augmentation de la TVA peut faire partir d’un ensemble fiscal progressif, juste et équitable" "un basculement de cotisations vers la TVA pourrait sensiblement améliorer la compétitivité de certains secteurs industriels exposés à la concurrence" Pour Valls, ce projet est cohérent avec les fins des 35h qui entraînerait la disparition de plusieurs milliards d’exonérations de cotisations sociales. La fin de ces exonérations pourrait être compensée par une baisse pure et simple des cotisations financée par une hausse de TVA.

Sarkozy garde la TVA sociale sous le coude

La veille du 1er tour des régionales le 13 mars 2010, dans son interview au Figaro Magazine, Nicolas Sarkozy avait ressuscité le projet de « TVA sociale » que l’on croyait enterré depuis l’automne 2007. C’est d’ailleurs le Figaro Magazine qui comme par hasard, après une question sur Renault et une sur Total, a demandé au Président : « Avez-vous renoncé à votre idée de TVA sociale ? ». Réponse de Sarkozy : « L’expression TVA sociale est incompréhensible et inadaptée. Le sujet est pourtant bien à l’ordre du jour. Il faut continuer à réfléchir au moyen de financer notre protection sociale autrement qu’en taxant le travail ».

Preuve que cette annonce ne devait rien au hasard, elle avait ensuite été immédiatement relayée par plusieurs parlementaires de la majorité (cités dans les Echos du 15 mars 2010) : Gille Carrez, le rapporteur UMP du budget à l’Assemblée a déclaré que « c’est une bonne chose de la remettre à l’ordre du jour ». Et Philippe Marini, le rapporteur UMP du budget au Sénat a ajouté : « une hausse mesurée de TVA serait tout à fait acceptable ».

Après avoir vidé les caisses de l’Etat en multipliant les baisses d’impôts pour les plus riches (bouclier fiscal, baisse des droits de succession, suppression de la taxe professionnelle, baisse de la TVA pour les restaurateurs), le gouvernement pourrait donc augmenter la TVA sous couvert de meilleur financement de la protection sociale.

Rappel sur le projet avorté de « TVA sociale » en 2007

Pendant sa campagne présidentielle, Sarkozy a préparé le terrain en proposant d’ « imposer la consommation plutôt que le travail ». François Bayrou s’était aussi prononcé en faveur d’une telle hausse de la TVA. Il envisageait même de l’augmenter encore plus fortement pour combler le déficit budgétaire, ce qui aurait représenté entre 5 et 14 points de hausse de TVA selon les hypothèses de résorption envisagées.

A peine élu, le projet de TVA sociale (baisse des cotisations sociales employeurs compensée par une hausse de la TVA) se précise et Sarkozy confie au gouvernement le soin de rédiger un rapport sur le sujet. Face au tollé suscité par ce projet dans la campagne des législatives (ce qui vaut à l’UMP de remporter une victoire moins nette aux législatives qu’aux présidentielles), la TVA sociale est alors progressivement mise en sourdine.

A la rentrée de septembre 2007, Eric Besson comme secrétaire d’Etat à la prospective et Christine Lagarde comme ministre de l’économie remettent chacun un rapport sur le sujet. Toujours zélé, Besson s’y déclare plutôt favorable à la TVA sociale, alors que Lagarde affirme que « la TVA sociale n’est pas propice en France ». Fillon met ensuite le projet en sommeil, en appelant à élargir la réflexion sur le financement de la protection sociale et confie à un député UMP, Yves Bur, le soin d’écrire lui aussi un rapport. Rapport qui existe mais qui n’a jamais été rendu public par le gouvernement …

Une mesure très injuste

Le mécanisme de la TVA sociale consiste à faire de la redistribution à l’envers en allégeant les prélèvements sur les employeurs pour les augmenter sur les ménages.

Et au sein même des ménages, la hausse de la TVA pénaliserait surtout les ménages modestes, beaucoup plus exposés à la TVA que les ménages aisés qui épargnent une partie de leur revenu. Les 10 % des ménages les plus riches consacrent 3,4 % de leur revenu à la TVA, les 10 % les plus pauvres 8,1 %.

La TVA est ainsi un impôt dégressif, dont la charge baisse quand le revenu augmente, à l’exact opposé de l’impôt sur le revenu.

La hausse de la TVA marginaliserait un peu plus l’impôt progressif dans le système fiscal français. La TVA représente déjà 51 % des recettes fiscales de l’Etat, contre à peine 17 % pour l’impôt sur le revenu, progressif. C’est-à-dire une des parts les plus faibles des pays industrialisés, puisque l’impôt sur le revenu représente en moyenne 20 % des recettes fiscales dans les pays de l’OCDE et même 30 % au Royaume Uni.

Une mesure inefficace

La TVA sociale s’inscrit dans la logique des politiques de baisse du coût du travail, au nom de la compétitivité et pour soi disant limiter les délocalisations. Le député UMP Yves Bur prétend ainsi « faire participer les importations au financement de la protection sociale », en augmentant la TVA. Ce raisonnement est largement erroné car taxer la consommation des ménages ne pénaliserait que secondairement les importations. Selon un rapport du Sénat de janvier 2009 (rapport Angels) Le contenu moyen en importations de la consommation des ménages n’est en effet que de 14 % (entre 8 et 10 % pour les produits agro-alimentaires, 20 % pour les meubles, 35 % pour l’automobile, 40 % pour le textile).

Quant à la baisse des cotisations sociales, son effet sur l’emploi n’est pas non plus prouvé, comme l’ont souligné plusieurs rapports de la Cour des comptes. 70 % des baisses de cotisations (soit une vingtaine de milliards des 32 milliards d’exonérations annuelles) sont concentrés dans le secteur des services, peu exposé aux délocalisations.

D’ailleurs en 2004, une étude de Bercy remise à Sarkozy, alors ministre de l’économie, concluait à un effet nul sur l’emploi à long terme et même à une légère baisse de PIB induite par la TVA sociale (en raison du choc négatif produit sur la demande dans ses deux composantes : consommation et investissement)

Comment maquiller une hausse de TVA sous des apparences « sociales »

Derrière les arguments bidons sur l’emploi ou le financement de la protection sociale, le véritable motif de la « TVA sociale » serait donc tout simplement d’augmenter la TVA pour contenir le déficit public creusé par l’appauvrissement délibéré de l’Etat par la droite. Comme l’a fait Angela Merkel en 2007 en passant la TVA de 16 % à 19 % en Allemagne.

Source :

http://www.jean-luc-melenchon.fr/ar...


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