Bayrou, Le Pen... La difficile profession d’imitateur élargit ses rangs

vendredi 3 février 2012.
 

La difficile profession d’imitateur élargit ses rangs ces temps-ci. Nos mots voyagent et traversent l’espace politique. Jeudi soir, lors d’un meeting à Dunkerque, François Bayrou a fait du verbe « résister » un refrain de son discours. Le même jour à Nantes, François Hollande a déclaré « mon adversaire c’est la finance ». Avant eux, Marine Le Pen avait repris ma formule « rendre visible les invisibles ». Ces emprunts au vocabulaire ordinaire du Front de Gauche et de mes propres meetings me réjouissent. Pour moi c’est décisif. Peu importe que ceux qui prononcent ces mots ne le fasse que par effet de tribune que leur assistants et rédacteurs de discours leur recommandent. Ce qui compte c’est que les mots circulent et deviennent dominants. Les mots sont davantage que ce qu’ils désignent. Qui les avale, avale avec la grammaire et la syntaxe. Une manière de décrire le monde est une manière de le penser.

Bien des lecteurs se demandent sans doute ce que veut dire cette contamination de la scène par mon vocabulaire. C’est l’effet mécanique d’un mode de fonctionnement. Les personnages qui n’écrivent pas leur discours, ou qui les préparent à partir des conseils d’agences de communication, ne savent pas ce que disent les autres. Ils n’en ont pas le temps. Ils suivent donc ce qui leur paraît être des trouvailles dont on ne leur dit pas d’où elles viennent. Après quoi tout est possible car le système médiatique est lui-même hors d’état de faire mieux que du persiflage quand il s’aperçoit du procédé. S’il est si prompt à repérer les « dérapages », à solliciter des « regrets » et à répéter en boucle des indignations de convenances et autres objets au niveau zéro de la politique, c’est parce qu’il n’est pas en état de faire mieux pour signaler sa vigilance. En effet, il est victime de son propre mode d’organisation pour « suivre la campagne ». Je prends l’exemple de la presse papier. Dans chaque rédaction une personne est désignée pour suivre un candidat. Cette personne ne peut jamais suivre ce que disent et font les autres candidats. Elle est donc aussi aveuglée que le candidat lui-même sur ce qui se passe autour. On vient de le voir quand aucun journaliste n’a relevé que Bayrou faisait du Mélenchon.

Si le journaliste qui suit la campagne de François Bayrou était venu dans un de nos meetings, il aurait immédiatement relevé l’imitation. Mais pour cela, il faut qu’il ait du temps pour le faire. Et il faudrait des équipes de journalistes assez nombreuses. Le modèle économique de la presse actuelle ne le permet pas. Par conséquence, il n’y pas non plus de temps disponible pour recouper et échanger entre collègues de travail, pour comparer les déplacements de tous les candidats. Autre aspect de ce modèle de presse, la répartition des moyens pour couvrir tout le champ des candidatures. Exemple : Nous. Quand une personne ou deux est chargée de suivre le candidat PS, il n’y en a qu’une qui suit les quatre candidats du Front de Gauche, des Verts et de l’extrême gauche. Comme c’est bien normal cette personne organise son temps de travail et répartit ses papiers entre les événements des uns et des autres selon sa propre perception de l’importance comparée des événements proposés. La visibilité de chacun d’entre eux dépend donc entièrement de cette répartition. En ce sens, la scène politique donnée à voir n’est pas celle qui fonctionne mais celle qui est composée et reconstruite en raison d’un modèle économique et social qui obéit à d’autres exigences que les siennes.

1) À François Bayrou : copier n’est pas résister !

Pour la droite et l’extrême droite, piller Jean-Luc Mélenchon et le Front de Gauche devient une méthode à la mode.

Après Marine Le Pen annonçant vouloir "rendre visible les invisibles", reprise mot pour mot de l’expression lancée par le candidat du Front de gauche devant les ouvriers de Fralib six mois auparavant, voilà que François Bayrou s’ essaie à son tour à la copie.

Son appel à la "Résistance" hier soir devant la sage public de son premier meeting de Dunkerque renvoie évidemment au lancement de la campagne de Jean-Luc Mélenchon en juin dernier Place Stalingrad. Mais tout cela avait des airs de mauvais remake.

Sans doute parce qu’aucun déguisement ne pourra travestir la purge austéritaire que ces candidats ont en commun de vouloir imposer au peuple. Et sur ce point, il n’y a pas de danger qu’ils s’essaient à copier le candidat du Front de Gauche.

Eric Coquerel, Secrétaire National du Parti de Gauche

Source :

http://www.lepartidegauche.fr/edito...


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