L’omniprésence de Marine Le Pen dans les médias contribue à sa légitimation

mardi 27 octobre 2015.
 

La banalisation du Front National passe d’abord par la fréquence d’exposition de Marine Le Pen dans les médias, notamment dans la presse écrite et parfois d’une manière qui paraît anodine : la photographie "sympathique". Or cette presse préfère rendre plus visible le Front National que le Front de gauche.

Réponse à l’article Vote FN : Déclaration des organisations syndicales CGT - CFDT - FSU - UNSA du 93

Prenons un exemple : celui du journal gratuit 20 minutes en date du 31 janvier 2012. On constate que Marine Le Pen occupe deux articles et une jolie photo, grand format, sur fond bleu, (couleur préférée des Français, c’est connu) et une deuxième, en présence de son père. Tapons alors dans le moteur de recherche de ce journal le nom de Le Pen : on obtient 23 800 occurrences. Mélenchon : on obtient 17 000 occurrences 23 800 – 17 000 = 6800 soit 40 % de plus pour Le Pen . Rappelons que ce journal gratuit a été lancé en novembre 2008. Son tirage s’élève à environ 104 400 exemplaires sur l’ensemble du territoire selon les chiffres de l’OJD. Ne soyons pas de mauvaise foi : le décalage de 40 % s’explique en partie par le fait que Mélenchon est apparu sur la scène médiatique qu’en 2010 alors que Le Pen était déjà sur scène depuis la création du journal.

Limitons maintenant la recherche depuis janvier 2011. Le Pen : 12 100 Mélenchon : 11 800 soit 25 % de moins. Pierre Laurent 1250 Front de gauche : 2000 Front National : 3480 soit 74 % de plus François Hollande : 6270 Sarkozy : 25 000 Attention néanmoins, ces données sont à prendre avec distance car elles sont approximatives : une erreur de dénombrement de 20 à 50 articles est possible lorsqu’il y en a plusieurs milliers d’occurrences. D’autre part, il serait intéressant de pouvoir compter toutes les photographies de Marine Le Pen et de son père, d’une part et celle de Jean-Luc Mélenchon d’autre part. Et il faudrait aussi comparer le contenu des articles à partir de critères permettant de déterminer quels sont ceux qui sont favorables et défavorables à chacun des candidats.

De même, la candidature de François Hollande suite aux primaires du PS ne date que de novembre 2011 : le score de 6270 est donc à replacer dans ce contexte. Il s’agit plus ici d’inviter à une démarche exploratoire plutôt que de prétendre faire un bilan qui se voudrait scientifique.

Ce genre de comptage pourrait s’appliquer aux principaux organes de presse et on pourrait avoir sans doute quelques surprises. Par exemple, j’ai remarqué que depuis janvier 2011 le nombre d’articles sur Le Pen est de 21 et sur Mélenchon de 13 dans le journal Marianne 2. Évidemment les articles concernant Marine Le Pen ne sont pas favorables sur le fond mais la plupart de ceux relatifs à Mélenchon ne le sont pas non plus ! Cela s’explique probablement par le fait que Marianne, comme le Nouvel Observateur, ne veut pas indisposer ou déstabiliser son lectorat réformiste ou social libéral. Bref, l’omniprésence de Marine Le Pen dans les médias, sans être forcément journalière, contribue à sa légitimation et à la banalisation ou dédiabolisation du FN.

Chacun sait que la meilleure arme médiatique de neutralisation d’un candidat considéré comme indésirable par une équipe de rédaction est le silence. Les médias au service des intérêts de la grande bourgeoisie utilisent le Front National comme outil de neutralisation du Front de gauche. Dans cette optique, dans le meilleur des cas, la surface médiatique donnée à Marine Le Pen est à peu près équivalente à celle attribuée à Jean-Luc Mélenchon. Mais comme nous le disions au début, il semble bien que la presse donne plus de place à Marine Le Pen.

Hervé Debonrivage


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