Bernard Lavilliers. « Que Mélenchon cite des vers de Victor Hugo, ça fait du bien »

vendredi 20 avril 2012.
 

Bernard Lavilliers souhaite que les questions de la culture soient également abordées dans la campagne. Il explique pourquoi il votera pour le candidat du Front de gauche.

Que pensez-vous du climat général de la campagne 
de l’élection présidentielle ?

Bernard Lavilliers. C’est assez ennuyeux et si on regarde les programmes à la loupe, il n’y a rien de très révolutionnaire  ! En tout cas, par rapport à la crise, je ne vois pas de plan précis. Heureusement qu’il y a Jean-Luc Mélenchon qui rallie une certaine idée de la gauche. Le seul qui fasse un peu d’effet, c’est lui. Je ne m’étais pas trompé  !

Vous avez fait connaître 
votre intention de voter pour 
Jean-Luc Mélenchon dès l’été dernier. Qu’est-ce qui vous séduit dans sa campagne ?

Bernard Lavilliers. C’est un bon orateur et les thèmes qu’il aborde avaient été, hélas, abandonnés par les pragmatiques depuis fort longtemps. On entend une certaine noblesse dans le discours, il lit des poèmes de Victor Hugo et cite d’autres poètes. Et ça fait du bien. Si les gens viennent en aussi grand nombre, c’est parce que cela leur rappelle des paroles, des périodes où de grands orateurs s’inspiraient des artistes. Lui, il s’en inspire largement. Il a une culture, il connaît bien l’histoire. Il y a un besoin d’enthousiasme. Je pense qu’une partie des gens qui ne votent plus vont voter justement pour ces raisons-là.

La dynamique des sondages 
lui est favorable. Est-ce que 
cela vous étonne ?

Bernard Lavilliers. Cela ne m’étonne pas vraiment. Même si le vote ouvrier, selon les sondages, n’est pas encore significatif pour Mélenchon. Mais les gens sont vraiment raides et, malheureusement, dans ces cas-là, ils ont plutôt tendance à devenir nationalistes. Il ne faut pas se laisser rouler dans la farine et, par désarroi ou déception ou ras-le-bol, aller aux extrêmes, à droite. À mon avis, par rapport aux socialistes, ce qu’il tient comme discours et l’enthousiasme qu’il y a, cela me semble possible de reconquérir l’électorat ouvrier. Je ne suis pas certain que ceux qui vont aux meetings de Mélenchon le vivent comme ça. Mais disons que s’il peut faire voter, en tout cas au premier tour, des gens qui n’ont jamais voté, ça devient intéressant. Cela fait bouger et peut-être que la conscience politique peut s’ouvrir. Tous ceux qui râlaient dans leur coin, là, ils ont quand même trouvé une grille de lecture.

Quels sont les thèmes de campagne que vous aimeriez voir défendus 
par les candidats ?

Bernard Lavilliers. L’emploi en premier (1). Cela concerne tout le monde, pas seulement les ouvriers, les employés mais aussi les cadres qui savent qu’ils peuvent se faire jeter d’un jour à l’autre. Dans les discours des uns et des autres, on ne parle pas de la culture. Je voudrais dire qu’il ne faut pas confondre le commerce et la culture. S’il faut faire du formaté et du vendable, cela empêchera toute création. Moi, je ne mélange pas ce qui est passable à la radio et une belle chanson. Si j’ai connu Brecht, c’est parce que Jean Dasté, Jean Vilar et Roger Planchon ont été les premiers à décentraliser la culture, ils jouaient des pièces de théâtre dans les usines, n’hésitaient pas à monter et montrer du Goldoni ou du Molière. Aujourd’hui, quand on parle culture, on entend commerce. Je ne suis pas franchement favorable à l’aide systématique, mais un artiste, il faut quand même lui donner les moyens de créer et de vivre. Quand André Malraux a fait ses maisons de la culture, il a beaucoup aidé. Un bon président doit avoir un bon ministre de la Culture, qui s’intéresse à toutes les formes artistiques, à la musique classique, contemporaine, à la chanson, au rock, au rap, à la danse. Ce sont des domaines qu’il faut suivre. Aujourd’hui, ils coupent dans les budgets de l’État et dans ceux des collectivités territoriales. Moi, j’attends d’un ministre de la Culture qu’il s’intéresse au mouvement, à ce qui compte, qu’il se déplace. Si Mélenchon est président de la République, j’espère qu’il nommera un ministre de la Culture efficace et pas une espèce de potiche. Quand on pense qu’aucun gouvernement n’est arrivé à donner 1% à la culture nationale…


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