Baron Pierre de Coubertin, tu nous prends pour des cons ?

jeudi 16 août 2012.
 

A l’époque, c’est-à-dire au début du XXe siècle, la phrase portait un message radical dans la bouche du baron : dédramatisons la défaite, relativisons la victoire. En somme, le sport devait être un moyen de rapprocher les peuples, de créer du lien social, du vivre-ensemble. Le projet social, le projet politique du sport avant la victoire ou la défaite.

Oui, mais voilà, le sport c’est aussi - et aujourd’hui surtout - la compétition. Le sport est devenu une guerre où l’enjeu a tué le jeu. Les disciplines, olympiques soient-elles, sont rattrapées par les enjeux de carrière, de notoriété, de business.

Alors, quand on entend : « L’important, c’est de participer » de la bouche d’un parent, d’un partenaire, d’un éducateur ou d’un commentateur, c’est simplement une façon de mieux faire passer la pilule de la défaite. Car aujourd’hui, l’important, c’est de gagner. Et aux Jeux, c’est d’être médaillé. Il faut être compétitif, performant, professionnel, pour faire monter sa nation dans le tableau d’honneur et permettre au président de la République de recevoir les champions à l’Elysée.

On calcule, on gère, on arnaque

Et pour atteindre ce seul but, tous les moyens sont bons. Le dopage existe certainement toujours pour améliorer ses performances mais maintenant on calcule, on gère, on arnaque...

C’est aussi ça, le nouvel esprit olympique. Les basketteurs espagnols ont sans doute décidé de laisser filer leur match face au Brésil pour éviter les Etats-Unis avant la finale. Le Comité international olympique a fermé les yeux alors qu’il a disqualifié huit joueuses de badminton originaires de Chine, de Corée du Sud et d’Indonésie pour les mêmes soupçons. Etrange ! Philip Hindes, le pistard britannique en or à la vitesse par équipes, lui, a simulé une chute pour se donner une deuxième chance après un départ raté. L’athlète algérien Taoufik Makhloufi s’est mis à marcher pendant les séries du 800 m pour ne pas hypothéquer ses chances sur le 1 500... Dans un autre genre, on pourrait ajouter à la liste Christophe Lemaitre qui a décidé de snober l’épreuve reine des Jeux pour ne s’aligner que sur 200 m, ou les footballeuses japonaises qui jouent la montre dans les arrêts de jeu de leur demi-finale face aux Françaises.

Oui, les meilleurs ne sont pas à Londres pour se balader au bord de la Tamise mais pour chercher l’or, quitte à bafouer le fameux esprit sportif. C’est dur de devenir un champion. C’est dur de se préparer pendant quatre ans pour une course, un combat qui ne dure parfois que quelques secondes et qui n’intéressera plus les médias une fois les Jeux terminés. C’est dur de sacrifier sa vie, de souffrir sur la piste, dans le bassin ou le gymnase, juste pour participer.

C’est tellement beau d’être, une fois dans sa vie, le dieu du stade, de porter les couleurs de son pays. Toi aussi, Baron, tu aurais certainement pleuré comme ces grands champions échouant au pied du podium. « L’important, c’est de participer ». Baron, tu nous prends pour des cons ?

Vikash Dhorasoo, footballeur


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