Taxe à 75% : la mesure de François Hollande s’annonce très décevante

vendredi 14 septembre 2012.
 

L’annonce a marqué la campagne présidentielle. Le candidat Hollande avait annoncé sur le plateau de TF1 une taxation à 75% pour les plus riches. Désormais président de la République, il n’aurait pas renoncé à cette mesure mais c’est une version édulcorée qui pourrait être mise en place. Insuffisant pour Simon Ulrich, militant du Front de gauche.

Que le temps de la campagne s’éloigne. Souvenez-vous, à une époque révolue, un candidat rouge effrayait les hautes sphères de la société française. Jean-Luc Mélenchon séduisait, interrogeait les citoyens sur la réalité du partage des richesses en France. Les stratégies de tant d’édidocrates s’écroulaient sur elles-mêmes. Hollande n’était alors plus assurée d’une victoire facile par la simple image d’antisarkozyste.

Avant avril, les Français semblaient vouloir une gauche à l’ancienne, sûre d’elle-même, revendicatrice et offensive. François Hollande, par nécessité électorale, se devait alors de bouger. Martine Aubry a surement du le sommer, avec sa connaissance du personnage, de durcir la mollesse de son discours.

Ainsi, un soir où Jean-Luc Mélenchon réunissait plusieurs dizaines de milliers de militants dans une salle de province, François Hollande, face à une Laurence Ferrari ahurie, affirmait vouloir imposer à 75% les revenus des riches gagnant plus d’un million d’euros par an.

Il faut une plus grande progressivité de l’impôt

En voilà une bonne idée : taxer les riches par l’impôt. C’est même l’un des droits de l’Homme. En effet, l’article 13 de la déclaration universelle des Droits de l’Homme, écrite dans des temps pas si étranger, en 1789 stipule que "pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable. Elle doit être également répartie entre tous les Citoyens, en raison de leurs facultés".

Ainsi, sans répartition juste des richesses et sans progressivité de l’impôt, il n’y a pas de liberté dans la société. Cette dernière est dépendante de l’égalité face à la charge publique.

75 %, c’est moins que la taxe confiscatoire de 100 % au-dessus de 360.000 euros annuels que nous défendons au Front de gauche. Ce qui, tout de même, laisse 30.000 euros mensuels d’argents de poche à nos pauvres amis nécessiteux.

Au Front de gauche, nous voulons un impôt progressif, justement car il permet cette répartition des richesses, préalable à la concrétisation politique des Droits de l’Homme. Le gouvernement se refuse pour l’instant à créer de nouvelles tranches d’impôt sur le revenu. Ainsi, les écarts restent trop importants. Il n’a pas profité de sa proposition pour améliorer la progressivité et l’efficacité de l’impôt.

Imposer les plus riches pour le bien de la majorité

Il me semble nécessaire de s’approcher des 100 % au-dessus de 360.000 euros avec un impôt progressif plutôt que le simple artifice marketing désuet qu’est la tranche de Hollande à 75 %.

Dans une patrie du communisme sanguinaire, les États-Unis, à une époque où le monde connaissait une croissance bénéfique pour le plus grand nombre, la dernière tranche de l’impôt sur le revenu était fixée à 91 % de 1941 à 1964. Roosevelt l’avait imposé. Elle perdura jusqu’à Nixon. Ce même Nixon qui a réunit les conditions préalables au dérèglement de l’économie mondiale et à qui on doit, si on veut être juste, une partie de nos malheurs.

Ainsi, dans le pays chantre de l’économie de marché, les dirigeants avaient compris que le gavage de certains était contre-productif à l’intérêt général. Il fallait mieux imposer les plus riches que d’appauvrir la majorité, ce qui revenait alors à tuer l’avenir de la nation et donc, un jour ou l’autre, amener au malheur général, y compris à celui des plus riches. Malgré cette tranche à hauteur de 90%, les riches contribuables américains continuaient toujours de l’être.

Aujourd’hui, si les États s’endettent, c’est justement parce que partout dans le monde, le taux d’imposition des plus hautes fortunes a été réduit. Face à ce manque à gagner fiscal, les États n’ont d’autres solutions que de se serrer la ceinture.

L’État doit être maître de son destin et cela passe par l’impôt

Le pire, c’est que ce n’est pas suffisant. L’austérité étant contre-productive, il est nécessaire d’aller chercher de l’argent ailleurs. Voilà la véritable cause de l’endettement. Les oligarques ont décidé de ne plus imposer ceux qui pouvaient l’être. Cela oblige forcément, rapidement, d’aller presser les classes populaires et moyennes.

Ainsi, ces dernières ne peuvent plus soutenir la croissance par la consommation et combler le manque à gagner laissé par les plus riches, qui eux continuent de s’enrichir. Le cercle vicieux est initié. Nous sommes aujourd’hui en plein dedans.

La France a besoin de son "New Deal", d’une "révolution citoyenne". Il faut un électrochoc fiscal qui puisse permettre à l’état de se financer sans enrichir les banquiers (emprunt sans intérêt à la BCE), mais surtout qui permette de reprendre l’argent qui alimente les bulles spéculatives, c’est-à-dire la richesse abusive des plus riches.

Dans un état de droit, cela ne se fait pas avec des marteaux ou des faucilles, mais par l’impôt. Ainsi, en créant un salaire maximum et en imposant très fortement les plus fortunés, l’État se retrouve à nouveau maître de son destin. Il peut mener les politiques que le peuple considère comme prioritaires.

Une mesure pas assez radicale pour être efficace

La nation pourra alors investir dans la bifurcation écologique, l’éducation, le logement, la santé... Nous pouvons faire de l’assouvissement des besoins humain l’égal des grands chantiers du New Deal.

Je trouve inutile la taxation à 75% de François Hollande car elle n’est pas suffisamment forte pour casser le cercle vicieux que j’ai cité plus haut. Malheureusement, l’intégration dans un programme structuré lui fait défaut, or c’est ce qui lui assurerait l’efficacité du prélèvement et de la relance.

Un impôt confiscatoire mais nécessaire doit être forcement accompagné de mesures limitant la libre circulation des capitaux (que les riches partent, on garde les coffres) et de la création de l’impôt-citoyen français (où qu’il soit dans le monde, un Français devra payer sa différence fiscale à la France).

La mesure de François Hollande n’est pas assez radicale. Un impôt, pour qu’il puisse être compris et accepté, doit être juste. Pour être juste, il doit s’appliquer de la même façon à tous. Or, Hollande, dans une vision électoraliste du paysage politique français, ne semble pas vouloir veut imposer les artistes et les sportifs...

Hollande crée donc des privilèges et casse le sens politique de sa décision. C’est dommage, car cela permet aux opposants à la justice fiscale de trouver des arguments faciles et des exemples tronqués.

La France a besoin d’un véritable courage fiscal. Nous avons besoin d’une révolution fiscale portée et imposée par la souveraineté populaire. L’impôt citoyen, c’est celui qui permet à tous de vivre convenablement. Imposons-le rapidement !

Par Simon Ulrich

Etudiant en droit. Militant PG


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