Climat : empêchons-les de saccager la planète

jeudi 24 janvier 2013.
 

« Notre consommation, d’ici à 2050, ne devra pas représenter plus d’un tiers des réserves prouvées de combustibles fossiles » afin de ne pas dépasser les 2°C de réchauffement global maximal d’ici la fin du siècle.

Ce n’est pas Attac France qui le dit, mais l’Agence internationale de l’énergie dans son rapport World Energy Outlook 2012.

Laisser les énergies fossiles dans le sol, en l’occurrence plus des deux tiers des réserves prouvées, pour les motifs de stabilisation du climat, voilà qui devrait être la feuille de route des gouvernements des pays de la planète lors des conférences internationales sur climat. Les résultats de la conférence de Doha (Qatar) démontrent que ce n’est pas le cas. Pas plus que ce n’est la feuille de route de l’Union européenne qui s’est félicitée des résultats de Doha, ni celle de la France qui a envoyé sur place pas moins de trois ministres, dont Laurent Fabius, pour ne faire qu’une seule annonce, celle de désirer recevoir la conférence en 2015.

Cela pourrait être risible si la fréquence et l’intensité des phénomènes climatiques extrêmes n’augmentaient pas d’année en année, causant des dégâts écologiques, humains et sociaux extrêmement lourds. Selon certaines prévisions2, ce sont des millions de personnes qui pourraient mourir dans les années à venir des conséquences du réchauffement climatique (maladies et famines) et du modèle énergétique actuel hautement carboné (pollution de l’air, cancers, etc.). L’inertie des États est donc chaque année un peu plus criminelle que l’année précédente.

Doha a confirmé la tendance. Sous couvert de seconde période d’engagements dans le cadre du protocole de Kyoto, les négociations ont prolongé la séquence Copenhague-Durban, écartant toute possibilité d’engagement contraignant en termes de réductions d’émissions, poursuivant l’affaiblissement du protocole de Kyoto (très peu de pays et engagements faibles), et ce sans fournir les financements additionnels attendus. Les responsabilités sont désormais diluées à travers la négociation d’un nouveau mandat pour 2015 qui ne serait applicable qu’en 2020. Peu à peu, les gouvernements condamnent la planète à une augmentation de la température globale de plus de 4°C.

C’est le pronostic alarmant que viennent de délivrer plusieurs recherches. C’est notamment le dernier rapport de la Banque mondiale rédigé par le Potsdam Institute for Climate Impact Research3, qui prévoit pêle-mêle « inondation des villes côtières, menaces sur la production alimentaire menant à une hausse des taux de sous-alimentation et de malnutrition ; désertification accrue des régions sèches, humidification accrue des régions humides ; vagues de chaleur sans précédent dans de nombreuses régions, en particulier sous les tropiques ; aggravation substantielle de la pénurie d’eau dans de nombreuses régions, augmentation de la fréquence des cyclones tropicaux de grande intensité ; perte irréversible de biodiversité, avec notamment la disparition des récifs coralliens ». Les dommages subis par les écosystèmes réduiraient sans doute considérablement la capacité de la nature à assurer une série de fonctions écologiques pourtant essentielles à la vie humaine et la vie en général. Ce monde serait si différent que « les capacités de prévision et de planification indispensables » seraient remises en cause. Tout comme la possibilité de s’adapter à ces nouvelles conditions.

Ce monde-là, celui qu’ils nous préparent, n’est pas le nôtre. Il n’est pas celui que nous voulons. S’en remettre à chaque fois « au sommet de la dernière chance » – c’est ainsi qu’est déjà annoncée la conférence de l’ONU de 2015 qui pourrait se dérouler en France – puis en être réduit à se lamenter de résultats décevants n’est pas à la hauteur des enjeux. La société civile y compris doit s’interroger sur ses stratégies jusqu’ici non couronnées de succès. La stabilisation du climat et la préservation des conditions indispensables à la vie sont des sujets bien trop importants pour être délégués à quelques-uns, qu’ils soient chefs d’État, scientifiques ou porte-parole médiatiques de la société civile.

Les mobilisations actuelles, contre l’aéroport de Notre-Dame des Landes ou contre les gaz et pétrole de schiste, sont des étapes clefs dans l’optique d’imposer des politiques publiques de sobriété et d’efficacité énergétiques, capables de financer la transition écologique et sociale à laquelle nous aspirons. Afin de construire dès aujourd’hui le monde de demain, il faut y ajouter une forme d’insurrection démocratique et d’innovation sociale, impliquant le plus grand nombre, capable de mettre en pratique et d’étendre toutes les expériences alternatives existantes qui renforcent notre autonomie et la résilience des territoires.

par Maxime Combes

Notes

1. http://iea.org/publications/freepub...

2. http://daraint.org/wp-content/uploa...

3. http://climatechange.worldbank.org/...


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