Politique industrielle : François Hollande donne les clés au privé

dimanche 15 septembre 2013.
 

Ce jeudi matin, François Hollande et le ministre du redressement productif Arnaud Montebourg ont présenté un beau catalogue de projets pour la « nouvelle France industrielle. » Mais, derrière les paillettes technologiques, le gouvernement laisse les clés de la politique industrielle au privé.

Ça pourrait être un inventaire des plus grand rêves technologiques, mais il s’agit en fait du plan du gouvernement pour relancer l’économie française. Les amateurs de science-fiction apprécieront certainement les ambitions futuristes affichées dans le document présenté par le ministère du redressement productif : hôpital numérique, e-éducation, textiles intelligents ou réalité augmentée. François Hollande n’a pas lésiné sur l’emphase pour les présenter ce jeudi matin : "Autant de plans de bataille pour hisser la France, ses entreprises au meilleur niveau de la compétition mondiale" et "autant de nouvelles frontières technologiques que nous voulons dépasser, repousser".

Mais derrière ces superlatifs, rien n’assure que l’augmentation de croissance attendue soit bien réelle. Arnaud Montebourg l’a d’ailleurs admis. Il n’est "pas certain que ces 34 plans industriels seront à coup sûr 34 tirs au but", a dit le ministre, "mais si nous pouvions en marquer 20 à 25 dans les cinq à dix ans, nous saurons déjà que la France se sera relevée."

Cabinet de conseil et groupes du Cac40

Le ministère d’Arnaud Montebourg a travaillé conjointement avec le cabinet de conseil McKinsey pour établir une liste de 34 filières dans lesquelles les industries françaises pourraient gagner des parts de marchés à l’horizon 2023. Objectif annoncé : utiliser les innovations françaises pour développer une nouvelle industrie de pointe qui remplacerait les secteurs en perte de vitesse. Mais dès la présentation, le compte n’y est pas. Le projet présenté dans « la nouvelle France industrielle » compte sur un potentiel maximal de 480 000 créations d’emplois sur 10 ans, alors que le ministre relève que les 10 dernières années ont vu 750 000 suppressions d’emplois bien concrètes dans l’industrie.

Et au-delà des calculs, comment ne pas remarquer que le document présenté est un document de conseil stratégique pour les fleurons de l’industrie française. On y retrouve pêle-mêle Renault, PSA, Valeo, Michelin, Schneider, Bolloré, Airbus, Dassault Systèmes … De grandes entreprises qui ne sont pas toujours étrangères aux derniers grands plans de licenciements. Difficile de croire qu’ils seront les grands embaucheurs de demain

"Socialisme de l’offre"...

Pour obtenir le vrai plan industriel du gouvernement, il faut plutôt consulter le projet de budget 2014 dévoilé hier, qui transfère une partie de l’effort fiscal des entreprises vers les particuliers.

L’Etat version François Hollande s’en remet au bon vouloir des entreprises pour créer l’hypothétique emploi industriel de demain. François Hollande ne s’en est pas caché lors de son intervention ce jeudi matin. "L’Etat n’a pas à se substituer à l’initiative privée car ce sont les industriels qui connaissent les marchés (...) mais à l’Etat, il lui revient de désigner un cadre, d’accompagner, de stimuler", a dit le président devant un parterre d’industriels. "Chaque plan sera animé par un chef de projet issu du monde industriel", a promis François Hollande, qui revendique une philosophie économique à l’image du "socialisme de l’offre" qu’il défend pour vendre des produits compétitifs et innovants. La politique industrielle française "n’est ni libérale, ni dirigiste, elle ne se veut ni rhénane, ni anglo-saxonne, elle est française et pragmatique", a-t-il poursuivi, promettant que l’Etat jouerait son rôle de stratège.

...et cadeaux fiscaux pour les entreprises

L’intervention de l’Etat se limitera donc à de nouveaux cadeaux fiscaux adaptés aux besoins des entreprises et la mobilisation de moyens via la nouvelle Banque publique d’investissement ou le Programme des investissements d’avenir, dont 3,5 milliards d’euros seront disponibles. Et, signe du glissement à droite du gouvernement, son ministre du Redressement productif, qui occupait avant la présidentielle 2012 l’aile gauche du PS, a vanté la philosophie de partenariat public-privé. "Ils (les 34 plans) conjuguent action publique et initiative privée, financement public, investissement privé, recherche publique, recherche-développement privée, vision collective et entreprise privée", a-t-il ainsi claironné.

Florent Lacaille-Albiges


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