Salaires et sécurité au travail : victoires des salarié(e)s du Bengladesh

mercredi 20 novembre 2013.
 

B) Victoire pour les petites mains du Bangladesh

Après l’accord de prévention sur la sécurité des usines, les ouvriers du textile ont obtenu une augmentation de près de 80 % du salaire minimum mensuel, qui va passer à 50,50 euros.

Après plusieurs semaines de lutte, les quatre millions d’ouvriers du textile du Bangladesh ont emporté une première victoire d’importance contre le patronat. Face à la paralysie de centaines d’usines, les producteurs et le premier ministre Sheikh Hasina ont signé, mercredi soir, un accord afin d’augmenter le salaire minimum mensuel. Le revenu passe ainsi de 29 euros à 50,50 euros. Alors que la campagne électorale se déroule dans un contexte tendu, Sheikh Hasina a donné «  l’ordre  » aux propriétaires d’usines de mettre l’accord en place dès décembre. Au début de leur lutte, en septembre, les centaines de milliers d’ouvriers demandaient à ce que le salaire minimum soit porté à 74 euros, au regard d’un taux d’inflation qui dépasse parfois les 10 %, comme ce fut le cas en 2011. Un état de fait qui a conduit les ouvriers à redescendre dans la rue, hier, pour réclamer des augmentations plus fortes. Pour seule réponse, la police a usé de gaz lacrymogènes et de balles en caoutchouc. «  Nous continuerons de manifester jusqu’à satisfaction de nos revendications  », prévenait un manifestant. Le patronat explique que la crise économique mondiale et les grandes marques occidentales l’empêchent de consentir à une augmentation plus importante. «  Ce sera difficile pour un grand nombre d’entre nous d’augmenter les salaires si les détaillants occidentaux n’augmentent pas les prix, pour les commandes passées avec nous, de 10 à 15 %  », a expliqué Area Bin Mahmoud, le vice-président de l’association des producteurs et exportateurs de vêtements, une fois l’accord conclu.

Nombre d’élus ont également ralenti l’instauration d’une augmentation. Liés au capital, les députés se sont souvent accommodés du moins-disant social afin de sauvegarder un environnement «  favorable aux investissements étrangers  ». Rien de plus logique quand «  un député sur dix possède, lui ou sa famille, une usine de textile  », selon Kalpona Akter, la directrice du Bangladesh Center for Workers Solidarity, une ONG de défense des droits des travailleurs. Grâce aux grèves de 2006 et de 2010 qui avaient pris d’assaut 4 000 usines, et malgré la sanglante répression policière, les ouvriers avaient arraché une loi sur le revenu minimum légal.

Dans un pays à forte tradition syndicale, de nombreux mouvements ont déjà émergé pour amener les propriétaires d’usines à améliorer les conditions de travail désastreuses sur le plan sanitaire et de la sécurité. L’effondrement de plusieurs immeubles, dont celui du Rana Plaza en avril qui avait fait 1 135 morts, ont révélé au grand jour les conditions de travail de millions d’esclaves modernes qui assurent un flux continu de nouveaux vêtements dans le circuit mondial. En octobre dernier, Peuples solidaires expliquait qu’Auchan refusait toujours d’indemniser les familles des victimes. À la suite de l’accident mortel, cent marques ont signé un accord de prévention des incendies et de sécurité des bâtiments abritant des usines de confection.

Cambodge : la lutte s’étend La mort d’une vendeuse de riz, mardi, au Cambodge, en marge d’une manifestation des ouvriers du textile, n’a pas entamé 
la détermination du secteur à voir les salaires revalorisés. 
Bien au contraire. Essentiellement concentré à Phnom Penh,
le mouvement s’étend aujourd’hui à l’ensemble du pays, malgré la violence de la répression. Vendredi, la police a tiré à balles réelles sur des ouvriers qui travaillent pour une usine sous-traitante de Gap et H&M, et qui tentaient de se diriger vers la résidence du premier ministre. La filière du textile emploie aujourd’hui 615 000 Cambodgiens, essentiellement des femmes, dont le salaire mensuel a récemment été relevé à 59,50 euros, contre 45,50 euros auparavant. Les syndicats estiment que 111 euros seraient nécessaires à ces travailleurs pour pouvoir subvenir à leurs besoins.

Lina Sankari

A) Bangladesh : Mouvement social massif et dur des ouvriers payés 28 euros par mois

Jusqu’à 200.000 ouvriers ont manifesté lundi pour le troisième jour consécutif, selon Abdul BAten, chef de la police du district de Gazipur, près de la capitale Dacca, où plusieurs centaines d’usines textiles sont implantées.

Quelque 300 usines ont été fermées pour prévenir toute attaque d’usines de la part de manifestants, a précisé son adjoint, Mustafizur Rahman. « La situation est très volatile. La police a tiré des balles en caoutchouc et des gaz lacrymogènes pour disperser les ouvriers incontrôlables », a-t-il ajouté, précisant que plusieurs dizaines d’ouvriers et quelques policiers avaient été blessés.

Les manifestations contre les faibles salaires et les mauvaises conditions de travail ont secoué le secteur de l’habillement du Bangladesh depuis l’effondrement en avril du Rana Plaza, qui a tué plus de 1.100 personnes. Dans le faubourg de Savar, où l’immeuble s’est effondré, des ouvriers en colère ont mis le feu à au moins deux usines, a déclaré Reaz-Bin-Mahmood, vice-president de l’association des fabricants et exportateurs de vêtements du Bangladesh.

Le pays exporte pour Walmart, H&M et Carrefour

Le Bangladesh est le deuxième exportateur de vêtements au monde, fournissant notamment des grands noms tels que l’américain Walmart, le français Carrefour ou encore le suédois H&M. Pilier de l’économie, le secteur avec ses 4.500 usines représente 80% des exportations annuelles s’élevant à 27 milliards de dollars.

Mais la grande majorité des 3 millions de travailleurs ne gagnent qu’un salaire de base mensuel de 3.000 taka (38 dollars) - soit un des plus bas au monde - suite à un accord tripartite entre les syndicats, le gouvernement et les fabricants signé en août 2010.

En juin, le gouvernement avait mis en place un groupe de travail spécial pour examiner les salaires et les syndicats ont demandé un salaire mensuel minimum de 8.114 taka (100 dollars). Les propriétaires d’usine ont rejeté la demande, affirmant qu’ils pouvaient augmenter les salaires de seulement 20%, à 3.600 taka, en raison de la conjoncture économique mondiale morose.


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