Les municipales peuvent construire une nouvelle majorité politique de gauche

vendredi 18 octobre 2013.
 

Comme on le sait, j’ai pensé jusqu’à cet été qu’il était possible d’enjamber ces élections municipales dont je pressentais qu’elles pouvaient créer un sérieux désordre dans le Front de Gauche. Mon repère était et reste encore l’élection européenne, qui sera le moment fort de politique nationale. Dans mon interview du « Journal du Dimanche » d’aout, je soulignai qu’il ne fallait pas dramatiser les divergences au sein du Front de Gauche à propos de ces élections municipales. Mais la réplique violente contre moi à propos de Manuel Valls m’a fait comprendre quel serait le contexte de l’année. En échange d’alliance avec eux, ici ou là, et dans le cadre de la négociation nationale sur le découpage des circonscriptions départementales, les socialistes exigeront de tous ceux qui signent avec eux une prise de distance avec le Front de Gauche. La dilution de notre mouvement, rendu illisible du fait d’une stratégie à géométrie variable, est leur objectif. Vous en doutez ? Alors demandez-vous pourquoi ce n’est pas sur EELV que s’exerce le chantage aux places, alors même que leur décision nationale est de faire partout des listes autonomes. Pourquoi c’est aux communistes que Marie Noëlle Lienemann, sénatrice de Paris, demande de s’allier aux socialistes, et non aux écolos ?

J’ai donc commencé à envisager avec mes amis le problème tout autrement, dans des termes et avec des échéances différentes. Nous nous sommes posé la question de savoir comment ce moment électoral pouvait, au contraire de ce qui semblait se dessiner, être un moment de cohérence en direction des objectifs que nous nous sommes assignés au sens le plus large. Comment, en assumant pleinement la bataille des municipales, construire en même temps le rapport de force dont nous avons besoin pour les élections européennes qui auront lieu moins de deux mois après les municipales ? Il n’y a qu’une façon : faire de la politique, c’est à dire agir à chaque étape en fonction du but que l’on cherche à atteindre. Le raisonnement est que tous les reniements gouvernementaux, la honte de sa politique nationale, la résignation et la démoralisation que répandent Hollande et Ayrault, vont certainement pousser beaucoup d’électeurs vers l’abstention et certains vers un vote de colère que le martèlement médiatique dirige du côté du Front National. Mais en même temps, une fraction qui pourrait ne pas être négligeable parmi les électeurs de gauche peut aussi faire le choix de vouloir nous aider et, en donnant ses voix, d’exprimer leur colère et leur volonté de changement. Il n’y a pas d’autres méthodes que de faciliter ce transfert. Et comme toujours, une fois de plus, tout commence par la crédibilité et le rassemblement.

Il ne faut pas se laisser rabougrir dans un enfermement stérile et démoralisant avec les socialistes ! Mieux vaut s’ouvrir à tous ceux qui, à gauche, veulent s’en démarquer. Depuis l’acte politique de Noël Mamère et le texte d’Eva Joly, il est prouvé que de larges secteurs de l’écologie sont de nouveau disponibles pour faire du neuf. Sur le terrain, cela se traduit par des dizaines de prises de contact en vue des prochaines élections municipales et des listes à constituer. D’une façon générale, les militants du Front de Gauche, et chacun comprend que j’inclus ici en premier lieu les communistes qui souvent sont nos têtes de liste, ont immédiatement accepté l’ouverture de ces discussions. Mais il est vrai aussi que, parfois, quand localement nos camarades communistes ont préféré l’alliance avec les socialistes, c’est avec tous les autres membres du Front de Gauche que la discussion et les accords se font. A Grenoble, par exemple, le Front de Gauche est uni pour se présenter de façon autonome. C’est donc avec lui dans son ensemble qu’a le lieu la discussion avec EELV. Mais à Rennes, les communistes ayant choisi l’accord avec les socialistes, le Parti de Gauche a signé avec EELV en compagnie des autres composantes du Front de Gauche représentées sur place comme la GA, la GU et la FASE ! Ces deux exemples, pris parmi des dizaines de discussions actuellement en cours, montrent comment s’articulent étroitement la question de l’autonomie au premier tour et celle de l’élargissement en vue d’une nouvelle majorité de gauche. Dans toutes ces circonstances, l’accord local avec EELV constitue un fait politique à mes yeux essentiels.

Cette démarche qui repose sur une volonté de libre association a été rendue possible à partir du moment où Eva Joly avait fait le choix d’appeler avec nous à la marche du 5 mai à Paris pour la 6e République. Tout se tient quand une stratégie est menée avec constance et application. On voit ce que valent les songes creux de la table ronde finale des « assises du 6 juin » restant, et pour cause, sans lendemain : Pascal Durand a été éliminé au premier acte de résistance et Marie-Noëlle Lienemann, sénatrice de Paris, sert de rabatteur pour les listes d’union avec les socialistes et la dislocation du Front de Gauche ! À l’inverse, miser sur le clivage et les idées claires a produit ses premiers effets de rassemblement le 5 mai. Cela se concrétise à présent localement d’une manière beaucoup plus profondément ancrée, mais tout aussi libre ! Dans ces conditions, je considère que, quoi qu’il arrive, les bases de cette nouvelle majorité de gauche, et du front politique qui va avec, sont en train de se construire à travers les élections municipales. Mon souhait est qu’il se prolonge dans toutes les batailles du futur.


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