Hollande, Valls, Macron ou la caricature des deux gauches

lundi 1er septembre 2014.
 

Le président de la République, le Premier ministre et le ministre de l’Economie s’intronisent comme les porte-paroles d’une gauche moderne face à des contradicteurs présentés comme des irresponsables de la dépense publique, crispés sur les acquis, anti entreprises et anti mondialisation. Une caricature qui ne tient pas l’analyse.

Monsieur Manuel Valls dispose d’un don indéniable pour la communication. Après avoir recueillis 5,6 % des voix de son camp lors de la primaire socialiste de 2011, le voici Premier ministre de la France et coupeur de têtes de ses opposants. Pour compenser cette faiblesse de légitimité politique, il a aujourd’hui recours à une stratégie classique dans le monde politique : se présenter comme le chantre d’une élite moderniste éclairée face à l’obscurantisme d’adversaires renvoyés à l’irresponsabilité économique. C’est également le positionnement du nouveau ministre de l’Economie dont les idées de ceux qui ne pensent pas comme lui sont qualifiées « d’étoiles mortes ».

Il faut apprécier cette façon de présenter le débat économique à gauche pour ce qu’elle est : une caricature éhontée. Un rapide regard sur les propositions des frondeurs de Vive la Gauche ou celles d’Arnaud Montebourg suffit à s’en convaincre.

Sur la dépense publique, personne ne remet en cause la nécessité de maîtriser les déficits publics et la dette française. Mais il se trouve qu’il y a plusieurs façons d’y arriver. Le trio Hollande-Valls-Macron souhaite y parvenir par un libéralisme de l’offre qui consiste à : tout miser sur le signal prix – si le travail est moins cher, il sera plus demandé ; aménager tout ce que le principal syndicat patronal présente comme des contraintes à l’activité (les seuils sociaux, les 35 H, les impôts sur les sociétés). Mieux armées, les entreprises pourront embaucher et investir, ce qui relancera la croissance et l’emploi.

Cette politique pose trois problèmes, affirment ses opposants. D’abord, elle est inefficace : l’activité est en berne, le chômage continue à monter et les prévisions persistent à placer notre pays dans l’atonie économique et le manque d’emploi. Ensuite, sur les 41 milliards d’euros prévus pour les entreprises, seul un tiers (12 milliards) va aux secteurs exposés à la concurrence internationale. Beaucoup d’argent dépensé mais mal ciblé s’il doit aider à renforcer la compétitivité de l’appareil productif. Enfin, interrogés par l’Insee, près de la moitié des chefs d’entreprise déclarent qu’ils ont d’abord un problème de demande, de carnets de commande insuffisants, contre 18 % un problème d’offre. Conclusion logique : il faut faire moins – et mieux – de politique d’offre et davantage de politique de demande.

Quelle autre politique suivre ? Soutenir différemment les entreprises en leur offrant ce dont elles manquent le plus, des carnets de commande. Pour cela, il faut augmenter le pouvoir d’achat des Français. Comment ? De trois façons.

En créant de l’emploi. Si le secteur privé n’est pas en mesure de le faire, l’Etat doit y aider : avec deux milliards, disent les députés frondeurs de Vive la Gauche, on peut créer 300 000 emplois aidés afin de pallier pour quelques années l’incapacité du secteur privé à créer des emplois. Même dans la logique gouvernementale, 39 milliards de baisse d’impôts et cotisations pour les entreprises et 2 milliards pour l’emploi ne constitueraient pas une remise en cause de la politique choisie

En développant l’investissement public. La France manque de crèches, d’infirmières, d’écoles, de moyens pour l’université etc., l’investissement public ne doit pas être tué mais encouragé. La France emprunte à des taux d’intérêt historiquement bas, le moment est adéquat pour des politiques d’investissements publisc dont le pays a besoin. Le retour sur investissement est long ? Oui mais il est garanti. Celui de la politique de l’offre l’est tout autant mais sans garanties sur la croissance et l’emploi.

En engageant la transition écologique. Plusieurs centaines de milliers d’emplois sont en jeu pour une politique qui réduirait en même temps que notre contribution au réchauffement climatique notre déficit extérieur.

On peut discuter de ces pistes. Mais elles ne s’appuient ni sur une logique de fermeture au monde, ni sur une baisse de l’effort de réduction des déficits (la baisse des dépenses de 50 Mds est toujours là). Elles offrent un débat légitime. Encore faut-il accepter de les écouter et d’en débattre sans tomber dans la caricature communicationnelle.


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