« Ni pigeons, ni espions », les acteurs du numérique mobilisés contre la loi sur le renseignement

samedi 25 avril 2015.
 

« Nous, acteurs du numérique, sommes contre la surveillance généralisée d’Internet ». Ainsi commence l’appel du mouvement « Ni pigeons, ni espions », qui a recueilli plus de 600 signatures pour protester contre la loi sur le renseignement, qui doit être votée le 5 mai à l’Assemblée nationale. De grands hébergeurs comme OVH ou Gandi, des fournisseurs d’accès à Internet, des start-up comme Capitaine Train, des médias comme Libération et Mediapart ou encore des organisations comme le Conseil national du numérique font partie des signataires, qui dénoncent une loi « inefficace », mais surtout « dangereuse pour la croissance ».

La fronde a commencé avec les hébergeurs, le 9 avril. En ligne de mire : les « boîtes noires » que le projet de loi prévoit d’installer chez les fournisseurs d’accès, les hébergeurs et les grandes plateformes. Ce dispositif d’analyse automatique de données est censé, selon la formule du projet de loi, « révéler une menace terroriste ».

« Imposer aux hébergeurs français d’accepter une captation en temps réel des données de connexion (...), c’est donner aux services de renseignement français un accès et une visibilité sur toutes les données transitant sur les réseaux », expliquaient alors cinq hébergeurs – dont OVH, le principal hébergeur français – dans une tribune commune.

« L’argument économique est celui qui résonne »

Mais surtout, ils préviennent que « cet accès illimité insinuera le doute auprès des clients des hébergeurs sur l’utilisation de ces boîtes noires et la protection de leurs données personnelles ». Conclusion : pour faire pression sur le gouvernement, ces hébergeurs menacent, dans le texte, de délocaliser leurs activités, qui se verraient pénalisées selon eux si le projet de loi venait à être adopté. Deux hébergeurs, Eu.org et Altern.org, ont d’ailleurs déjà annoncé qu’ils allaient mettre cette menace à exécution. Sur le site de l’un d’entre eux, on peut lire : « Altern.org refuse la boîte noire des services secrets, ferme ses services immédiatement, pour les rouvrir dans quelques jours dans un pays plus respectueux des libertés individuelles. »

Parallèlement, Tristan Nitot, membre du Conseil national du numérique et spécialisé sur les questions de surveillance, s’étonne « de ne voir personne se mobiliser », explique-t-il au Monde. « J’avais beau parler de ce danger pour les libertés individuelles autour de moi, ça réagissait assez mollement. L’argument économique est, pour moi, de second ordre, mais c’est celui qui résonne. » Avec OVH et d’autres acteurs du numérique, ils décident, quelques jours après le coup d’éclat des hébergeurs, de lancer le mouvement « Ni pigeons, ni espions ».

Morgane Tual


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