Récit de l’Assemblée Plénière du conseil régional Languedoc-Roussillon/Midi-Pyrénées du 15 avril 2016

mardi 10 mai 2016.
 

Pour cette 3ème Assemblée plénière du mandat, nous allons débattre et voter principalement à propos du processus de détermination du nom de la Région et des orientations budgétaires de l’exercice 2016. Notre groupe de 27 élus issu de la démarche de rassemblement citoyen et politique « Nouveau Monde en commun » a également déposé 2 vœux en continuité avec nos engagements de campagne qui seront mis au vote. L’un pour déclarer la Région « hors Tafta », l’autre pour « une Région terre d’accueil des réfugié-es ». Nous espérons bien parvenir à les rendre majoritaires, cela traduirait notre utilité et redonnerait du souffle à notre démarche politique à cette échelle régionale. Car si notre expérience de rassemblement citoyen et politique de la campagne électorale est positive, je regrette que la « pluralité » de notre groupe « Nouveau Monde » se traduise parfois en illisibilité politique. Nous avons choisi de surmonter le fait que des choix différents aient été faits concernant le vote pour la présidence de Région ou la participation à l’exécutif régional. Nous avons aussi une position unie et offensive concernant la préparation budgétaire exprimée par une tribune du groupe dans le journal de la région (lien). Pour autant, le positionnement par rapport à l’exécutif pose parfois de vrais problèmes de crédibilité.

Par exemple, la commission permanente de la veille me reste en travers de la gorge. Alors qu’il était convenu que j’intervienne au nom de tout notre groupe contre une subvention de 300 000 euros pour l’euro 2016 de football (La Région ayant déjà participé à hauteur de 6 millions d’euros à la rénovation du Stadium de Toulouse), j’ai dû constater être lâché par 2 élus du groupe, lesquels trouvant même le moyen d’intervenir pour justifier leur vote pour le rapport et donc contre l’avis que je venais d’exprimer au nom du groupe. Au final j’ai voté contre avec 3 élus d’EELV, les 2 élus pcf votant eux pour la subvention de 300 000 euros et une autre élue EELV s’abstenant. Sauf à être illisibles, le groupe devra donc discuter et trancher entre 2 méthodes dans les semaines à venir (en gros, soit une méthode de négociation permanente et de fidélité à « l’exécutif » avec des votes bloqués avec le PS, soit une méthode faisant vivre le débat, les accords et les désaccords de façon respectueuse mais publique en s’appuyant sur l’implication citoyenne).

Le piège du FN qui unit loups, brebis et petits cochons

Après le discours liminaire de la présidente de Région, les observateurs ont assisté dans un premier temps ébahis à un spectacle pitoyable des élus FN mêlant pitreries diverses, propos haineux, racistes ou sexistes, la presse ne retenant que cet aspect de la journée. Prenant prétexte de l’impréparation de la fusion entre les régions et des conditions de travail des conseillers régionaux, leur comportement a justement rendu impossible un débat qui aurait été nécessaire sur ces questions. Comme souvent, le FN, par ses pratiques détestables, unit rapidement les esprits contre lui. C’est un piège car il conduit à l’effacement des débats politiques et des désaccords derrière la détestation commune du Front National.

L’aspect pathétique et ordurier du comportement des élus FN rendrait en effet solidaires contre eux à la fois les chiens, les loups, les chats, les brebis et les petits cochons réunis, même ceux de pure race. Lesquels ont donc assisté à l’utilisation par les élus FN de notre hymne national à des fins guignolesque, à des insultes sexistes contre Mme Delga, appelée « la présidente en tailleurs », à la mise en scène de pancartes « bienvenu au Delgastan » et à toute sorte de prise en otage des débats. Ces gens font n’importe quoi et c’est en faisant n’importe quoi que l’on devient n’importe qui. Sachez que ces fanfaronnades spectaculaires des élus FN n’ont qu’une seule raison : l’aspect public de l’assemblée plénière. Car dans le reste des réunions et instances du conseil régional, notamment dans les commissions, les élus FN sont soit mutiques soit rêveurs, pour tout dire inexistants.

Fusion, Plan Marshall et La Mogère

Avant d’en venir aux sujets de l’Assemblée elle-même, des explications sont nécessaires concernant l’impréparation de la fusion des deux Régions, le « coup de com » du Plan Marshall ou encore le dossier explosif des Etats Généraux du rail.

A propos de l’impréparation de la fusion des deux régions, voici un exemple technique mais révélateur. Figurez-vous que nous avons siégé dans une troisième salle différente à l’occasion de cette 3ème Assemblée plénière, et ce pour une location à hauteur de 60 000 euros la journée. Oui, oui, puisque le « siège » de la Région est à Toulouse, décision a été prise que les Assemblées plénières se tiendraient à Montpellier pour respecter une symbolique « égalité des territoires » à ce propos et tant pis si cela coûte la bagatelle de 60 000 euros par séance. La situation tourne au ridicule par bien des aspects et tous ceux qui ont défendu la réforme territoriale pour raisons d’économies ou d’efficacité de l’action publique en sont pour leurs frais puisqu’il se passe exactement l’inverse comme nous l’avions annoncé.

Concernant le « Plan Marshall » pour le BTP puisque les nouveaux élus sont régulièrement interrogés à son propos, soyons clair. Il s’agit principalement d’un coup de communication, le montant de 800 millions d’euros annoncé pour relancer l’activité et l’emploi étant surtout constitué par des projets et crédits déjà votés les années précédant 2016. Faire référence au « Plan Marshall » qui représentait des milliards de dollars investis par les Etats-Unis après la 2nde guerre mondiale pour amorcer la reconstruction de l’Europe est pour le moins maladroit. Si Madame Delga fait le choix d’une relance forte de la commande publique et de l’investissement, nous serons les premiers à nous en féliciter ; ce n’est pas dans la communication et dans les mots que cela s’évalue mais dans le budget en préparation, nous y reviendrons. Enfin, la concertation dans le cadre des états généraux du rail commence.

Rappelons-nous que les états généraux du rail ont été proposés pour mettre à plat un certain nombre de sujets polémiques, la présidente de Région acceptant la demande de « Nouveau Monde en commun » de moratoires sur la LGV Toulouse-Bordeaux et sur la gare de la Mogère en attente des conclusions des états généraux. Voici pourtant ce qu’a déclaré Mme Delga à propos de la gare de la Mogère le 30 mars dernier : « J’ai demandé une réunion au préfet pour que la gare de la Mogère accueille des TGV. 47 à 49 TGV passent par Saint-Roch chaque jour. Il faut qu’une partie de ces TGV aillent à la Mogère pour libérer des sillons en gare Saint-Roch, et permettre ainsi une montée en puissance des TER. On ne peut pas financer des équipements qui ne servent pas rapidement. Il faut donc une concordance entre l’ouverture de la gare nouvelle et le passage de TGV dans cette gare de la Mogère. ». On aura vu plus ferme comme proposition de moratoire !

Pour les novices, le refus de cette nouvelle gare en périphérie de Montpellier, construite en Partenariat Public Privé sur un terrain inondable a été un point fort de la campagne électorale de « Nouveau Monde en commun » et un point fort de l’accord de majorité conclu entre le PS, le PRG, le PCF EELV pour une participation commune à l’exécutif régional. Le retournement de Mme Delga concentre donc ici plusieurs questions. Bref, comme prévu, ne comptez pas sur les accords au sommet ! Que les militants résolus du rail participent aux réunions de concertation organisées dans les départements pour y porter leurs exigences d’un service public de qualité qui prenne vraiment en compte les besoins quotidiens en matière de choix d’aménagement, de priorités ou de tarification.

Le nom de la Région

L’ordre du jour de la plénière appelait en premier lieu le débat sur le processus de détermination du nom de la Région et la phase de concertation citoyenne. La presse et une partie des élus donnent une importance considérable à ce sujet, j’en dis donc un mot. Sur la forme, je trouve que le choix d’une large concertation citoyenne par internet est opportun même si des sujets bien plus importants mériteraient la même implication de l’institution pour favoriser l’expression démocratique. Sur le fond des noms proposés à la consultation (Occitanie, Occitanie-Pays catalan, Languedoc, Languedoc-Pyrénées, Pyrénées-Méditerranée), le débat est ouvert. De nombreux ami(e)s ayant participé à l’aventure « Nouveau Monde en commun » sont partisans du terme « Occitanie » associé ou non à « Pays catalan ». Rappelons à ce sujet que l’identité de notre Région est multiculturelle, pas seulement « occitane » ou « catalane ». Par ailleurs, si l’on comprend aisément l’importance affective de « l’Occitanie », celle-ci regroupe historiquement un territoire bien plus vaste allant de l’Aquitaine au Nord de l’Italie. D’autres amis défendent eux ce qu’ils considèrent comme un héritage républicain, à savoir le refus de désigner les noms de territoires par des qualificatifs « ethnolinguistiques » pour préférer des caractérisations géographiques. Bref, voilà matière à philosopher ou à meubler vos repas de famille.

Des orientations budgétaires au Panama

Le débat d’orientation budgétaire est un passage obligé dans chaque collectivité territoriale. Il permet la confrontation entre les choix politiques et la situation financière. Notre groupe a exprimé une position claire résumée dans cette tribune publique (lien). Jean-Christophe Sellin a lui justement rappelé dans son intervention la contradiction entre les ambitions politiques affichées régionalement et les choix gouvernementaux qui imposent une baisse massive des dotations globales de fonctionnement pour les collectivités.

Accepter cette baisse des moyens, c’est accepter le repli de l’action publique alors même que 70% de l’investissement public est porté par les collectivités locales. Pour autant, au-delà de la bataille contre l’austérité gouvernementale, des choix politiques nouveaux sont possibles pour rééquilibrer et redéployer différents postes budgétaires : en fléchant les subventions publiques vers le service public, l’économie sociale et solidaire, l’aide à une agriculture de qualité, des transports efficaces au quotidien ; en relançant l’investissement pour des projets utiles, en harmonisant les interventions régionales par le haut pour assurer par exemple, dès la rentrée 2016, la gratuité totale des livres scolaires dans l’ensemble de la région pour tous les lycéens.

Dans notre région, des marges de manœuvre de plusieurs dizaines de millions d’euros existent, l’épargne brute est à 473,6 millions d’euros et l’endettement de la région est le plus faible de France. Comme le dit Jean-Christophe « nous avons été élus sur des marqueurs qui sont ceux des attentes et des besoins sociaux et écologiques car la population attend précisément de la puissance publique qu’elle rééquilibre l’inégalité de fait. Je conclurais donc en disant que vous pouvez considérablement augmenter l’emprunt pour financer des politiques nouvelles ». Muriel Ressiguier argumentera dans cette perspective pour réorienter les crédits « économie » vers l’économie sociale et solidaire.

En plein débat national sur la fuite de capitaux vers les paradis fiscaux, nous avons estimé important de porter les projecteurs sur la nécessité qu’aucun euro de fond public ne soit placé dans des placements toxiques ou des paradis fiscaux. Raison pour laquelle Jean-Christophe profita de ce sujet pour mettre la lumière sur une des nombreuses incohérences du Front National. Que ce Parti fasse des leçons d’éthique et de patriotisme économique alors qu’une entreprise prestataire de la campagne de Mme Le Pen recycle les fonds publics d’une campagne électorale dans des paradis fiscaux, voilà qui méritait bien ce Panama offert de façon théâtrale par Jean-Christophe Sellin à Mme Jamet, présidente du groupe FN, sous les applaudissement d’une grande partie de l’hémicycle (lien vidéo).

La Région MPLR déclarée « hors Tafta » et « Terre d’accueil des réfugiés » !

En continuité avec deux engagements électoraux importants de « Nouveau Monde en commun », nous avons proposé 2 vœux à l’occasion de cette Assemblée plénière. L’un pour déclarer notre Région « hors Tafta » (lien), l’autre pour la déclarer « terre d’accueil des réfugiés » (lien). J’ai été chargé par notre groupe d’intervenir pour présenter le vœu « Tafta ». Je me souviens que dès 2011, nous cherchions avec mes amis du Parti de Gauche à alerter l’opinion publique à propos de ce « Grand Marché Transatlantique » en préparation. Jean-Luc Mélenchon profita de la fenêtre médiatique de l’élection présidentielle pour en dénoncer les dangers. Depuis, de nombreux collectifs locaux, souvent structurés autour des militants d’ATTAC, se sont déployés dans les localités. Un des moyens d’action est d’inciter les collectivités locales à se prononcer pour l’arrêt des négociations et à se déclarer « hors Tafta ». Nous avions présenté un même vœu en 2014 au conseil régional Midi-Pyrénées. Seuls les élus du Front de Gauche et d’EELV l’avaient voté, les élus PS et PRG empêchant son adoption. Je ne me suis pas privé de rappeler cet épisode tout en me félicitant que les positons aient évoluées puisque les élus PS ont cette fois décidé de voter pour notre vœu. Seuls les groupes de droite et celui du Front National ont finalement voté contre notre vœu. Rien de surprenant pour le FN. Comme souvent, son opposition de façade est contredite par les faits qui font du FN un opposant de pacotille aux libéraux européens dont il est en réalité un complice avéré, ce que j’ai rappelé dans mon intervention (lien), exemples à l’appui concernant le Tafta. En effet, les élus FN ont déjà voté contre des vœux « anti-Tafta » dans les conseils régionaux en PACA et en Picardie. Mme Le Pen ayant été pour ce qui la concerne, absente du vote en commission à ce sujet au Parlement européen. L’adoption de cette position à propos du Tafta et celle concernant les réfugiés symbolisent la capacité de notre groupe de 27 élus à se montrer utile et efficace quand nous assumons de façon claire et publique nos propositions et qu’elles s’appuient sur l’implication citoyenne et non sur d’uniques discussions de couloir. C’est la méthode que nous devons privilégier pour nous positionner sur le contenu précis du budget 2016 qui sera présenté au cours du mois de mai.


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