Le Comité de suivi des retraites veut poursuivre les contre-réformes

mercredi 24 août 2016.
 

Le Conseil d’orientation des retraites (COR) rendait hier son rapport annuel à Matignon, comme il le fait depuis trois ans. Comme en 2015, et ainsi qu’ont pu le constater de nombreux travailleurs ayant fait valoir leurs droits à la retraite, le niveau de leur pension moyenne a diminué par rapport au revenu d’activité moyen. Pour le COR, dont le rapport est public depuis le 15 juin dernier, cette baisse serait due aux mécaniques « d’indexation sur l’inflation des droits acquis en cours de carrière et des pensions liquidées ». Le Comité de suivi des retraites a réagi. Sans pour autant émettre de recommandations, ce comité de cinq membres créé par la loi du 20 janvier 2014 émet néanmoins quelques observations relatives aux conséquences des prévisions du COR, considérant que « la situation et les perspectives du système de retraite ne s’éloignent pas de façon significative ». Le comité note en effet que « les résultats sont en amélioration lente mais sensible, sous l’effet des réformes intervenues au cours de la dernière décennie ».

Augmentation du taux de cotisation des fonctionnaires de 2,70 %

En d’autres termes, le comité se satisfait d’un redressement de l’équilibre du système de retraite en saluant les dernières contre-réformes adoptées, notamment celles de 2010 et de 2014. La première, votée le 9 novembre 2010, entraîna plusieurs modifications du régime des retraites. Elle fit passer l’âge de la retraite de soixante à soixante-deux ans, augmenta le taux de cotisation des fonctionnaires, le faisant passer de 7,85 % à 10,55 %. La durée de cotisation fut elle aussi remise en cause, passant de 41 ans à 41,5. La contre-réforme gela l’effort de l’État pour le financement des retraites des fonctionnaires et permit l’utilisation du Fonds de réserve pour les retraites (FRR), censé être utilisé en 2020.

En 2014, le premier ministre Jean-Marc Ayrault initia une nouvelle contre-réforme des retraites. À nouveau, le temps de cotisation fut revu à la hausse, passant de 41,5 à 43 ans. La cotisation augmenta de 0,15 point pour les salariés. Les employeurs se sont vu soumettre au même régime, mais en contrepartie ils ont bénéficié d’une baisse de leurs cotisations patronales. Les majorations de pension dont bénéficiaient les parents avec trois enfants ou plus ont été soumises à l’impôt. La réforme Ayrault modifia aussi le statut des retraités ayant un emploi, si bien que tous les retraités qui continuent à travailler cotiseront à fonds perdus.

Hier, Manuel Valls s’est satisfait de l’avis positif du Comité de suivi

Ignorant toutes ces conséquences qualitatives de ces contre-réformes et ne s’appuyant que sur des effets quantitatifs, le COR persiste en ajoutant que l’équilibre financier « ne pourrait être atteint sans mesures complémentaires ». Il suggère donc d’harmoniser les avantages familiaux et les pensions de réversion en continuant à « rapprocher sensiblement » les différents régimes. Il précise d’ailleurs vouloir rapprocher les modes de calcul « pour rendre le système plus lisible et plus aisé à piloter », faisant référence au régime de la fonction publique. Des éléments de langage que l’on retrouvait déjà dans les propositions du Medef pour équilibrer le système de retraite puisque l’organisation patronale déclarait en 2013  : « Un rapprochement des différents régimes de retraite doit être engagé sans tarder. » Arguant que « la juxtaposition de régimes nombreux, et encore pour une part cloisonnés, nuit à l’efficacité globale » pour mieux justifier le recours à la retraite par capitalisation. De son côté, Manuel Valls s’est satisfait hier de l’avis positif du Comité de suivi en annonçant  : « Les rapports montrent que la France a su remettre son système de retraite sur la voie d’un équilibre financier durable. (...) Ces résultats démontrent que nos efforts pour préserver le système de retraite par répartition, un modèle de solidarité auquel les Français sont attachés, portent leurs fruits. » Par contre, le premier ministre socialiste n’a pas eu un mot sur la baisse du niveau de vie des retraités, que le rapport révèle par ailleurs.

Le scénario fantasque du COR. Dans le rapport, un scénario prévoit quesi le taux de chômage est stabilisé autour des 7 % et que la croissance est au minimum de 1,5 %, le système reviendrait à l’équilibre dès le milieu des années 2020 et deviendrait excédentaire à plus long terme. Comment arriver à de tels chiffres en poursuivant les mêmes politiques  ? Cela fait trente-deux ans que le taux de chômage, en France, n’est pas tombé au-dessous des 7 % et depuis 2008 la croissance n’a jamais atteint le 1,5 %.

Pierre-Yves Baillet et Olivier Morin (L’Humanité)


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