Les crises des théories du Libéralisme Politique et des Socialismes au XXI e siècle

vendredi 12 août 2016.
 

Point de vue "philosophique républicain" sur l’histoire des courants progressistes en Europe du 18ème siècle à aujourd’hui.

- 1°- La trahison de l’inspiration libérale initiale

- 2 ° - La fragilité du « bloc progressiste » face à l’hégémonie nationale-autoritaire

1°- La trahison de l’inspiration libérale initiale :

Le XVIII ème siècle fut l’âge d’or de la pensée « libérale » dont les fondements philosophiques et politiques primaient sur leur soubassement économique. Montesquieu, Hume, Locke en furent les éclaireurs et les fondateurs et ce qui est moins connu, c’est qu’Adam Smith, l’auteur de la « richesse des Nations » et le créateur du concept de la « main invisible » était d’abord professeur de philosophie morale en Ecosse. Il ne serait venu à aucun des fondateurs de la pensée « libérale » de sacrifier le principe de Liberté à ceux d’autorité, de nationalisme ou même de sécurité !

Le paradoxe contemporain de l’usage du terme « libéral » depuis le tournant des années quatre-vingt du vingtième siècle, c’est qu’il s’est inversé et appauvri. Ceux qui se prétendent « libéraux » surtout en France, comme son nouveau converti Macron, ne le sont bien souvent qu’économiquement, au sens de la formule de Quesnay et de Turgot : « Laissez faire, laissez passer » (il s’agissait alors de grains ; il s’agit désormais de capitaux et de flux bancaires). En fait nos prétendus « libéraux » contemporains sont en fait de purs « libre-échangistes » qui se soucient comme d’une guigne de l’élévation des conditions de liberté et d’ amélioration matérielle et spirituelle des citoyen(ne)s. La seule chose qui leur importe c’est le maintien d’un « ordre social » pour assurer la marche des « affaires » qui selon le mot de Dumas fils, sont très souvent « les affaires des autres ». Les anglo-saxons ont une expression : « business as usual ».

L’inspiration réellement « libérale philosophique et politique » trouva l’un des meilleures expressions avec la philosophe Italien Benedetto Croce qui s’opposa au fascisme et écrivit un livre faisant l’apologie de ce qu’il nommait : « la religion de la Liberté. ». Nous étions loin de l’inspiration purement mercantile et patronaliste qui est celle , par exemple d’un Macron, ne montrant aucune sensibilité sociale aux exclus du système ou d’un Manuel Valls drapé dans la toge des « vieux romains » et engoncé dans la rhétorique d’un Républicanisme national-jacobin autoritaire qui n’est pas sans rappeler, la défense du colonialisme en moins , certes, la ligne politique défendue par un certain Guy Mollet.

2 ° - La fragilité du « bloc progressiste » face à l’hégémonie nationale-autoritaire

Historiquement les socialismes sont nés d’une protestation morale contre la misère et les limitations et promesses non tenues du « libéralisme politique ». Ces socialismes n’étaient pourtant pas des anti-libéraux ; ils étaient « anti libéristes », c’est à dire opposés à la mainmise du « tout argent » et du capital sur tous les aspects de la vie des êtres. Ces socialismes, tel Proudhon, Jean Allemane et Lucien Herr , la « Fabian society » étaient d’ailleurs fort peu étatistes, et même, très méfiants envers l’Etat se proposaient de développer l’ « association ouvrière » puis l’émancipation de tous ( que l’on nomma plus tard l’ « autogestion » puis l’ « autonomie des êtres », grâce à l’action politiques et depuis Jean Jaurès puis Léon Blum, au bulletin de vote .

Nombre de socialistes furent de parfaits « libéraux » en Politique rejetant le « laisser fairisme » en matière d’économie. Le grand paradoxe de la vie politique française fut que l’inspiration « libérale politique » ne trouva jamais, à de rares exceptions près, assez de soutiens politiques nécessaires dans une droite restée longtemps monarchiste ou post monarchiste et parfois bonapartiste avec le « bonapartisme », l’ « Action Française », les « Croix de feu » et bien plus tard cette figure politique nouvelle que fut le « Gaullisme ». Nécessité impérative fut faite aux vrais « libéraux politiques » minoritaires pour l’emporter face à ses adversaires de droite aussi considérable et tournés vers un passé national magnifié de s’appuyer sur les organisations ouvrières et socialistes en s’efforçant de dépasser le « guesdisme vulgaire » issu d’une lecture bien trop schématique et réductrice de Karl Marx précurseur en quelque sorte de cette politique suicidaire du Komintern stalinisé : « classe contre classe ».

L’alliance de socialistes les plus évolués et cultivés, les moins sectaires, tels Jean Jaurès, Léon Blum, Antonio Gramsci et les austro-marxistes leur fit nécessité de passer des alliances avec les représentants les plus éclairés du vrai « libéralisme politique », tels les républicains avancés lors de l’indispensable défense morale du capitaine Dreyfus et de Piero Gobetti en Italie et les fondateurs de « Giustizia e Libertà » en Italie contre le fascisme, plus tard des luttes anticolonialistes menées par le PSU, véritable plaque sensible et laboratoire des gauches des années 60 aux années 1980. Aucune victoire progressiste ne fut possible sans cette alliance du bloc socialiste et des couches les plus évolués politiquement de la « bourgeoisie libérale » au sens politique de ce terme qui en France fut souvent représentés au sein du parti radical bien que jamais majoritaire durablement en son sein mais aussi de la Franc-maçonnerie latine et par la ligue des droits de l’homme s’appuyant sur les nouvelles couches intellectuelles formées par les enseignants et les professions intellectuelles.

Les trop rares victoires des « Gauches » en France furent la traduction politique de cette alliance qui n’ allait pas sans contradictions ni dépassements vers une mutuelle définition d’objectifs à la fois de justice sociale et d’extension des Libertés, ainsi que le montre le destin du Front Populaire et de la première partie du septennat de François Mitterrand de 1981 en 1983 avant l’application de la funeste politique d’austérité /rigueur qui brisa la solidité de cette alliance. Les socialistes d’avant 1981, Chevènement y compris nommaient cette politique de large union le « front de classe », même si la notion d’hégémonie sociale et culturelle aurait été mieux appropriée.

Mais bien sûr les idéologues des classes dirigeantes ont eu l’habileté de « brouiller » et même d’ « embrouiller » la réalité des faits et des doctrines pour maintenir leur domination et la prééminence d’un système qui leur apportait tant ! C’est pour cela que le débat contemporain ne permet pas aux citoyens qui n’y consacrent pas suffisamment le temps et l’effort nécessaire de comprendre les ressorts profonds de l’action publique et de rester victime des « masques », des « mots valises » et des « postures ».

Mes ami(e)s Républicains, efforçons nous de trier le bon blé de l’ivraie et la vérité des êtres et des enjeux bien réels d’émancipation et de libération qui nous sont masqués par les fumerolles de ces dominations, idéologique, économique et sociale, qui pèsent sur nous et nous paralysent trop souvent.

Paul Saint-Sernin


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