Pologne Défendre le droit à l’avortement

samedi 8 octobre 2016.
 

- 4) Insoumission noire pour les droits des femmes ! (PG)

- 3) Une « manifestation noire » en Pologne contre le projet de loi visant à interdire l’avortement

- 2) Pologne : un projet obscurantiste sur l’avortement – Les femmes, cibles d’une « contre-révolution culturelle »

- 1) Avortement : stop à l’obscurantisme ! (PG)

4) Insoumission noire pour les droits des femmes ! (PG)

La Pologne s’apprête à interdire complètement le droit à l’avortement et à rendre passible de 5 ans de prison toute femme, médecin ou toute personne aidant à l’avortement. Déjà, la législation polonaise en la matière est une des plus restrictives d’Europe. Les femmes ne peuvent y avoir recours que dans trois cas très restrictifs : si leur grossesse est consécutive à un viol ou un inceste, en cas de graves pathologies du fœtus ou de risques avérés pour la santé ou la vie de la mère. Si le projet passe, les Polonaises ne pourront recourir à un avortement que si leur vie est en danger.

Toute fausse couche sera de fait également suspectée d’avortement. La situation actuelle, déjà inacceptable en Pologne, a résulté d’un compromis passé en 1993 avec l’Église catholique, qui pèse de tout son poids sur la vie politique. Et le pouvoir réactionnaire, qui chaque jour grignote un peu plus les libertés fondamentales s’appuie sur son poids dans l’opinion publique. La situation est catastrophique pour un pays où nombre de femmes meurent déjà des suites d’un avortement clandestin. Elles sont 47 000 chaque année dans le monde à mourir d’un avortement illégal et dangereux, soit une femme qui décède toutes les 9 minutes…

L’Union Européenne a-t-elle une réaction à la hauteur devant une telle décision réactionnaire ? Non. Elle a pu menacer d’exclure de la zone euro la Grèce pour son refus des politiques d’austérité, sa volonté d’instaurer des politiques répondant aux urgences humanitaires, mais elle n’engage pas de réelles pressions contre la Pologne. Pas plus que l’Espagne, dont le gouvernement voulait récemment remettre en cause l’avortement ; la Hongrie n’a rien à craindre de Bruxelles non plus après son référendum contre l’accueil des réfugiés. Peu importe pour l’Union Européenne que les droits fondamentaux régressent, que l’extrême droite réactionnaire soit aux manettes dans différents Etats-membres, tant que les intérêts de la finance sont protégés. Et précisément, ce n’est pas l’extrême droite qui les remet en cause.

Le droit à l’avortement est un droit fondamental. Mais comment avoir accepté dans la constitution même de l’Union européenne, le TCE de 2005, la référence aux « racines chrétiennes de l’Europe » ? Si la référence n’est plus dans le Traité de Lisbonne, la droite réactionnaire polonaise ne cesse de s’en référer. Et en France également, les intégristes catholiques ne relâchent pas leur pression contre le droit à l’avortement, de façon assumée dans la suite des manifestations contre le mariage pour tous, ou via le développement de faux sites d’accompagnement destinés en réalité à dissuader les femmes d’avorter, jusqu’à la publication et la diffusion de brochures de propagande au sein de lycées privés. « Gardez vos rosaires loin de nos ovaires ! », criaient les participant-e-s au rassemblement devant l’ambassade de Pologne ce dimanche. Oui, la laïcité nous émancipe !

Certes, la Pologne a officiellement trois mois pour prouver qu’elle respecte l’état de droit sur ses dernières réformes particulièrement dures et liberticides. Elle pourrait même subir des sanctions, ce qui serait une première pour des questions non économiques, mais la question de l’IVG ne fait pas partie de la pression. Le Parlement Européen, avec y compris une partie de la droite européenne, a cependant adopté plusieurs résolutions pour que la commission européenne ouvre un « dialogue structuré » sur l’état de droit et les droits fondamentaux, afin notamment d’y intégrer le droit à l’avortement. Si la bataille pour inscrire des droits fondamentaux dans la Charte Européenne est à soutenir, elle révèle la logique intrinsèque de l’Union Européenne, basée essentiellement sur des orientations libérales conformes aux intérêts de l’Allemagne, totalement éloignée de l’idéal d’une « Europe qui protège » au service du progrès humain.

Et de façon inhérente à l’Union Européenne, une fois qu’un pays est entré dans l’UE, les institutions ne se sont dotées d’aucun moyen de contraindre un État-membre, par des moyens juridiques ou répressifs, de respecter les droits humains fondamentaux. Par contre, si un État-membre ne respecte pas le semestre européen et ses critères austéritaires dictés par Merkel, là un mécanisme automatique de sanctions financières se déclenche !

Ayons conscience que ces injonctions du Semestre Européen qui conduisent la Commission à imposer ses « recommandations », dans les faits véritables injonctions à la baisse des dépenses publiques et aux réformes structurelles qui piétinent la souveraineté des parlements nationaux, aboutissent dans les faits… à la fermeture des centres d’IVG (CIVG) ! En France ces fermetures de CIVG se multiplient : plus de 170 en dix ans du fait des politiques libérales contre l’hôpital public, rendant leur accès très difficile voire parfois impossible dans les délais requis. Dès lors, celles qui n’ont pas les moyens de partir à l’étranger y renoncent. Ailleurs ? Qui sait combien de CIVG ont dû fermer en Grèce quand on sait la casse terrible qu’y a connu l’hôpital public ?

L’émancipation des femmes est étroitement liée à la question sociale et à la question laïque qui sont les deux faces d’une même pièce. Ce qui se passe en Pologne doit nous rappeler l’impérieuse nécessité de défendre le principe de laïcité.

Pour 2017, nous devons non seulement défendre l’inscription du droit à l’avortement dans la constitution de la 6ème République mais également rompre avec le carcan austéritaire européen : restaurer la souveraineté des peuples, pour garantir dans les faits l’accès à l’IVG.

Danielle Simonnet Co-coordinatrice politique du Parti de Gauche

3) Une « manifestation noire » en Pologne contre le projet de loi visant à interdire l’avortement

Des milliers de personnes se sont réunies dans le pays, samedi 1er octobre, notamment devant le Parlement à Varsovie, contre une « loi barbare ».

Elles sont venues habillées en noir, pour beaucoup d’entre elles munie d’un cintre - symbole de l’avortement clandestin - crier leur colère et dénoncer les « fanatiques », devant le Parlement polonais, samedi 1er octobre. Depuis que la majorité ultraconservatrice du PiS (Droit et Justice) a décidé de renvoyer en commission parlementaire, le 23 septembre, un projet de loi citoyen visant à l’interdiction totale de l’avortement dans le pays, la mobilisation, notamment via les réseaux sociaux autour du mot-clé #CzarnyProtest (« Protestation noire »), ne faiblit pas.

Le rassemblement a été moins important que ne l’espéraient les organisations féministes : 3 000 à 5 000 personnes à Varsovie, quelques milliers de plus dans toute la Pologne. Les manifestants n’en étaient pas moins déterminés à défendre leurs droits, dans un pays où la législation sur l’IVG fait déjà partie des plus restrictive d’Europe.

Ils ont profité de l’événement pour défendre à nouveau le projet de loi citoyen à l’initiative du collectif « Sauvons les femmes », qui avait recueilli 250 000 signatures. Visant à libéraliser l’avortement dans le pays, il a été rejeté. Celui initié par les organisations « pro vie » avait lui recueillis 450 000 signatures, et sera examiné prochainement par la Commission de Justice du Parlement.

« Solution extrémiste »

« Faites l’amour, pas des lois ! » ; « Nous voulons des médecins, pas des missionnaires ! » scandaient notamment les protestataires à Varsovie. Beaucoup sont venus dénoncer l’influence de l’Église sur la vie politique, alors que l’épiscopat polonais avait appelé, en avril, à durcir la législation actuelle.

« Nous ne voulons pas de cette loi barbare, qui enlève aux femmes la possibilité de choix, s’indigne Kinga Jurga, 32 ans. Notre mouvement ne vise à convaincre personne que l’avortement est une bonne chose, mais que personne ne limite la liberté des autres, surtout sur des sujets ou la santé des femmes est en jeux ! » Actuellement en Pologne, l’IVG est autorisé dans trois cas seulement : en cas de viol ou d’inceste, de graves pathologies du fœtus, ou de risques avérés pour la vie ou la santé de la mère. Trois exceptions que le projet de loi examiné vise à supprimer.

Pour Kinga, ce « compromis » passé en 1993 entre l’Église et l’Etat n’en est pas un. « La Pologne devrait se conformer aux standards européens, affirme-t-elle. Ce que nous avons actuellement, c’est le strict minimum. »

Mais toutes les manifestantes ne sont pas de cet avis. « Je suis personnellement favorable au compromis actuel. Je trouve que c’est un bon juste milieu, qu’il faut défendre, affirme Klaudia Kielbasa, 22 ans. Mais je manifeste, car je suis contre toute solution extrémiste, qui ne fera qu’augmenter l’avortement clandestin. » À l’image de Klaudia, 70 % des Polonais sont pour le maintient du statu quo actuel, selon les dernières études d’opinion des instituts de sondage nationaux.

« Colère et peur »

« Ce projet aura des conséquences très négatives sur la médecine prénatale en Pologne, et sur tous les soins aux femmes enceintes, souligne pour sa part Anna Wieczorek, 32 ans. Les médecins ne voudront procéder à des opérations sur fœtus, car le risque sera trop grand. Ils auront les mains liées. » Le projet de loi prévoit des peines jusqu’à 5 ans de prison pour les femmes, les médecins, ou toute personne aidant à l’avortement. « Cette loi criminalise les médecins et les femmes. Toute perte de l’enfant, même en fausse couche, sera suspecte. Cette loi ne défend pas la vie, mais la menace. Elle est complètement contre-productive » ajoute Ewa Domardzka, 32 ans.

« Je crains que les choses aillent dans la mauvaise direction, et que la prochaine étape pourrait être l’interdiction de la contraception, ajoute Julia Sznajwajs, 32 ans. On voit déjà des mouvements dans ce sens. Ce serait un retour au moyen âge ! » Le gouvernement projette notamment de rendre accessible la « pilule du lendemain » uniquement sur ordonnance, et a décidé de ne plus rembourser la fécondation in vitro.

« C’est un mélange de colère et de peur que nous ressentons. Cette loi est vraiment sadique, elle provoquera beaucoup de souffrances, s’inquiète Zofia Waslicka, 32 ans. Les femmes ayant des grosses extra-utérines mourront. Des mineures violées par leur père seront forcées à accoucher. Vous imaginez le cauchemar ! »

« Ce qui se passe avec cette loi n’est qu’une partie d’un contexte plus général, où les libertés citoyennes sont chaque jour grignotées par un pouvoir autoritaire, souligne pour sa part Ewa, qui souhaite rester anonyme. « Je suis enseignante à l’école primaire. Si je dévoile ma participation à cette manifestation, je n’ai aucune chance de garder mon travail » soupire-t-elle. La plupart des manifestantes interrogées disent vouloir poursuivre leur mobilisation lundi, journée où de nombreuses femmes polonaises seront en grève pour descendre dans la rue.

Jakub Iwaniuk (Varsovie, correspondance)

Source : http://www.lemonde.fr/europe/articl...

2) Pologne : un projet obscurantiste sur l’avortement – Les femmes, cibles d’une « contre-révolution culturelle »

Source : http://www.lemonde.fr/idees/article...

Dans un pays qui a pourtant une longue pratique de la grève, c’est une première : lundi 3 octobre, les femmes polonaises, toutes professions confondues, sont appelées à cesser le travail. Deux jours plus tôt, elles ont également été appelées à manifester, vêtues de noir, pour protester contre une initiative législative visant à imposer une interdiction totale de l’avortement en Pologne.

Pays catholique où l’influence de l’Eglise est puissante, la Pologne a déjà l’une des législations les plus restrictives d’Europe en matière d’interruption volontaire de grossesse (IVG) : cette procédure n’est légalement autorisée que lorsque la santé de la mère est en danger, en cas de viol ou d’inceste, et en cas de pathologie fœtale grave. La proposition de loi, dont l’initiative revient aux organisations militantes « pro-vie » soutenues par l’épiscopat, et qui a été soumise le 23 septembre à une commission parlementaire, vise à rendre la procédure illégale quelles que soient les circonstances, et donc impossible à réaliser en Pologne.

Si ce texte est approuvé, ce sera la première fois qu’un pays de l’Union européenne revient sur l’avortement légal. L’IVG est également interdite en République d’Irlande (où le mariage homosexuel est autorisé) et à Malte, mais elle l’a toujours été. L’Espagne a un moment envisagé, en 2014, de restreindre l’accès à l’avortement, puis y a renoncé.

« Contre-révolution culturelle »

Une telle régression serait grave – et pas seulement pour les milliers de femmes qui en subiront les conséquences. Car cette initiative, qui s’inscrit dans la dynamique ultra-conservatrice à l’œuvre depuis l’arrivée au pouvoir du parti de Jaroslaw Kaczynski, le parti Droit et justice (PiS,) en 2015, enverrait un signal de retour en arrière dans un pays qui a si courageusement et efficacement travaillé pour réussir son intégration dans la famille européenne depuis la chute du communisme. Lors d’une récente rencontre, M. Kaczynski et le premier ministre hongrois, Viktor Orban, son plus sûr allié dans l’UE, ont appelé ensemble à une « contre-révolution culturelle ». Que les femmes soient les premières cibles de cette contre-révolution est particulièrement inquiétant. L’un de ses effets sera d’encourager un peu plus les jeunes Polonaises à émigrer dans d’autres pays de l’UE.

Le gouvernement polonais, actuellement dirigé par une femme, Beata Szydlo, est déjà en butte aux critiques de l’UE à propos de la Cour constitutionnelle, paralysée depuis près d’un an par un conflit politique sur la nomination de juges et à propos du traitement des médias publics. L’équipe au pouvoir paraît divisée sur ce projet d’interdiction totale de l’avortement : une partie des responsables du PiS préféreraient éviter d’ouvrir un nouveau front de contestation populaire et de créer un contentieux supplémentaire avec les partenaires européens de la Pologne.

Ils ont raison. A eux de mettre en échec ce projet de loi, qui viole les droits des femmes et ternit considérablement l’image de leur pays. Conquis de haute lutte, le droit à l’IVG fait partie des grands combats des femmes de l’Europe moderne, même si, dans l’UE, il relève de la compétence des Etats membres. L’égalité et la liberté des femmes sont des valeurs qui unissent les sociétés démocratiques européennes. La Pologne, dont les femmes jouent un rôle de premier plan dans l’économie et la politique, ne doit pas se mettre au ban de ces sociétés par une loi obscurantiste.

1) Avortement : stop à l’obscurantisme ! (PG)

Partout en Europe, la montée des réactionnaires met en danger les droits des femmes et notamment le droit à l’avortement. Après avoir été lourdement menacé en Espagne, il l’est aujourd’hui en Pologne où un projet de loi envisage de l’interdire.

En France, les obstacles auxquels font face les femmes souhaitant avorter sont de plus en plus nombreux. Les logiques libérales et l’austérité font leur effet : depuis la loi HPST, les fermetures de CIVG se multiplient (plus de 170 en dix ans), rendant leur accès très difficile voire parfois impossible dans les délais nécessaires.

Parallèlement, les réactionnaires usent de tous les moyens imaginables pour diffuser leur propagande et entraver le droit des femmes à disposer de leur corps. Depuis le développement de faux sites d’accompagnement destinés en réalité à dissuader les femmes d’avorter, jusqu’à la publication et la diffusion de brochures de propagande au sein de lycées privés, ils avancent masqués et ciblent les personnes les plus vulnérables (femmes en quête d’informations, lycéen-ne-s en cours d’apprentissage).

Le statut de ces lycées ne peut pas servir de prétexte à la diffusion de documents obscurantistes en leur sein, alors même que l’Etat continue de les financer contre les principes de la laïcité et l’égalité de l’éducation sur le territoire !

Le Parti de Gauche demande donc à ce que tous les moyens soient mis pour que ce droit essentiel qu’est l’avortement soit véritablement garanti : en mettant fin à ces procédés scandaleux et aux attaques répétées qu’il subit, mais aussi en rouvrant les CIVG afin d’être à la hauteur des besoins des femmes concernées.

Le Parti de Gauche appelle également à participer dimanche 2 octobre au rassemblement contre l’interdiction de l’IVG en Pologne qui se tiendra à 15h devant l’ambassade de Pologne à Paris (en présence de Danielle Simonnet et Eric Coquerel, coordinateurs du PG, et de Layla Yakoub, SEN au féminisme), et rappelle que l’avortement est un droit fondamental qui doit être pleinement garanti et défendu partout en France et ailleurs.

Layla Yakoub, Secrétaire Nationale au Féminisme et au Réseau Jeunes


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