Vote Mélenchon : huit arguments pour ceux qui doutent

dimanche 23 avril 2017.
 

Mélénchon peut gagner. Tous les mauvais procès qui lui sont faits n’y changeront rien. L’efficacité de son programme peut décider ceux qui hésitent encore. Huit raisons pour les convaincre.

À CEUX QUI VEULENT LA GAUCHE AU POUVOIR

Qui aurait pu imaginer il y a quelques semaines qu’un candidat de gauche puisse être en capacité d’accéder au second tour, voire de gagner ? Jean-Luc Mélenchon est en position de créer la surprise et il est, aujourd’hui, l’unique chance de la gauche d’y parvenir. Cette fois, le fait qu’il soit le candidat préféré de l’électorat de gauche est beaucoup plus profond que l’habituel « vote utile ». Si le candidat de la France insoumise, soutenu par le PCF, est le mieux placé c’est avant tout parce que ses orientations politiques correspondent le mieux aux intérêts et aspirations de la base sociale de la gauche ; il veut à la fois réhabiliter la puissance publique dans l’économie pour protéger les travailleurs, démocratiser les institutions et promouvoir l’égalité pour les individus.

Le programme de JLM et celui de ses soutiens contient des propositions qui renouent avec tous les combats historiques de la gauche : augmentation des salaires, baisse du temps de travail, extension des libertés... C’est pour avoir renoncé à ses objectifs que la gauche s’est perdue et n’a pu compter ces dernières années que sur le rejet de la droite pour revenir au pouvoir. Pour la première fois depuis 1981, c’est en portant un projet que la gauche peut gagner. Et pour la première fois tout court, c’est un projet de transformation sociale qui pourrait être mis en oeuvre. La victoire de Jean-Luc Mélenchon permettrait la formation d’une majorité de gauche regroupant tous ceux qui veulent en finir avec l’austérité et tourner la France vers l’avenir. C’est la chance redonnée à la gauche de ne pas décevoir une nouvelle fois. « C’est une série d’engagements qui font écho à plusieurs de nos Amnesty InternatIonal revendications. »

À CEUX QUI S’INQUIÈTENT DE LA DÉRIVE ANTIDÉMOCRATIQUE

Jamais sans doute une campagne électorale n’aura autant été marquée par les « affai res », nom pudique pour évoquer l’oligarchie et les puissances d’argent. Avec deux des candidats favoris mis en examen (François Fillon et Mme Le Pen), un parfum d’argent sale flotte sur la République. Mais ces affaires ne sont que l’écume de la crise démocratique : le mal est profond. La Ve République exclut les citoyens de la décision politique et organise l’entre-soi. Passer à la VIe République, via une Assemblée constituante dont une part des membres seraient tirés au sort (et dont tous ne doivent jamais avoir été déjà élus), est donc le principal objectif de Jean-Luc Mélenchon. Et si, comme Laurent Berger, vous avez peur d’une « dérive assez totalitaire », sachez qu’Amnesty International a salué « une série d’engagements qui font écho à plusieurs de nos revendications ».

À commencer par la sortie de l’état d’urgence, qui s’est révélé inefficace sur le plan de la sécurité mais très dangereux sur celui des libertés. Quant à la probité des élus, thème incontournable, plusieurs mesures fortes figurent au prog ram me de Jean-Luc Mélenchon : inéligibilité à vie de toute personne condamnée pour corruption, droit de révocation des élus en cours de mandat. Et, afin de donner de l’air à la démocratie, élection législative à la proportionnelle, droit de vote à 16 ans et référendum d’initiative populaire.

À CEUX QUI PENSENT S’ABSTENIR

Voter, ça ne sert à rien, rien ne change jamais. Comment en vouloir aux électeurs (environ un tiers d’après les sondages) qui s’apprêteraient à ne pas voter. Malgré les promesses de changement, les deux derniers quinquennats, l’un avec un président de droite, Nicolas Sarkozy, et le second avec un président de gauche, François Hollande, se sont tous deux finis dans la déception et la régression sociale. 1 million de chômeurs supplémentaires sous le mandat du premier, 600 000 sous le second. Ces deux présidents comme leurs prédécesseurs ont appliqué les mêmes méthodes : cadeaux au patronat (10 milliards pour l’un, 40 milliards pour l’autre), avec baisses de cotisations sociales, de la fiscalité ainsi qu’un assouplissement du marché du travail. Jean-Luc Mélenchon et ses soutiens proposent un tout autre chemin : réorienter l’argent pour le rendre utile aux besoins de la population. Avec un plan d’investissement de 100 milliards (les aides aux entreprises représentent aujourd’hui 220 milliards par an), dans la transition écologique et les activités socialement utiles, réindustrialisation grâce au pilotage public notamment dans l’énergie et les transports... Pour le financement de ce nouveau mode de développement, le PCF propose la nationalisation de BNP et la Société générale. Le feront-ils ?

Contrairement aux autres candidats, Jean-Luc Mélenchon propose une VIe République dans laquelle le peuple a la parole et même la possibilité de révoquer les élus. Vaut-il mieux tenter de s’en sortir seul que de parier sur des règles collectives ? C’est le mirage américain basé sur la réussite individuelle. Résultat ? 80 % de la population se partage 7 % des richesses. Mais l’action collective et les systèmes de redistribution, comme la Sécu, permettent de relever les avantages des plus fortunés à 35 %. Voter peut donc permettre d’avancer dans le sens d’une plus juste répartition des richesses, l’immense majorité y a intérêt.

À CEUX QUI SONT PRÉOCCUPÉS PAR L’ENVIRONNEMENT ET L’AVENIR DE LA PLANÈTE

L’écologie, c’est le point de départ et le point d’arrivée de ma démarche. » Ces paroles prononcées par Jean-Luc Mélenchon, en juin 2016, illustrent bien la prise en compte de l’urgence écologique comme point central, et ce depuis plusieurs années. Au point de rallier de nombreux citoyens engagés dans cette lutte depuis longtemps : Nicolas Hulot luimême avait ainsi indiqué avoir voté pour lui en 2012. Il est loin d’être le seul : déçus par les renoncements du quinquennat Hollande en matière écologique, de nombreux membres d’EELV ont aussi rejoint la campagne de Mélenchon avec ce mot d’ordre : « Pour une écologie insoumise au libéralisme ». Car le candidat de la France insoumise, tout comme ses soutiens, estime qu’il est impossible de s’attaquer à la crise écologique sans faire de même avec la crise sociale et démocratique, les trois étant inextricablement liées. En guise de réponse, deux mesures phares : la transition écologique (via la planification, qui permettrait de créer près de 900 000 emplois) et l’inscription de la « règle verte » dans la Constitution. Sur ce dernier point, il s’agit de graver dans le marbre l’interdiction de « prélever sur la nature plus que ce qu’elle peut reconstituer ». Autres axes forts : la sortie du nucléaire à l’horizon 2050, le développement d’une économie de la mer, et celle d’une agriculture paysanne. Une écologie politique réelle, donc.

À CEUX QUI VOTERAIENT MACRON POUR VOTER UTILE

Àmesure que le scrutin approche, l’argument du « vote utile » en faveur d’Emmanuel Macron s’est dégonf lé. Quatre candidats sont désormais au coude-à-coude pour se qualifier pour le second t ou r : Emmanuel Macron, Mme Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et François Fillon. Le « vote utile » en faveur de Macron était fondé sur le risque d’un second tour François Fillon-Mme Le Pen. Ce cas de figure est aujourd’hui beaucoup moins probable, en raison des affaires ayant pollué la campagne du candidat de la droite. En revanche, Jean-Luc Mélenchon a de sérieuses chances d’assurer la présence de la gauche au second tour. Les sondages de second tour donnent également le candidat de la France insoumise vainqueur tant contre Mme Le Pen que contre François Fillon. Il s’impose donc désormais comme le vote utile le plus efficace non seulement pour barrer la route au FN, mais également pour faire gagner la gauche. Et sur les plans économique et social, c’est le programme de Jean-Luc Mélenchon qui est le plus à même de relancer la machine économique. Emmanuel Macron, prétendant « libérer l’économie », s’inscrit dans la continuation des politiques néolibérales menées par Nicolas Sarkozy et François Hollande, avec les conséquences que l’on connaît. Le programme de Jean-Luc Mélenchon prévoit un « choc d’investissements » de 100 milliards d’euros, dont 50 milliards dans la transition écologique, une masse qui permettra de remettre en route l’activité économique.

À CEUX QUI CROIENT TOUT FAIRE SAUTER AVEC LE FN

Le matraquage médiatique autour du ravalement de façade du Front national a séduit nombre de citoyens français persuadés que le vote d’extrême droite serait un vote « antisystème ». Il n’est en réalité qu’un vote qui neutralise la colère populaire, utilisé comme argument de peur par les candidats des droites qui font tout pour prolonger le système, Emmanuel Macron en tête. Loin d’être antisystème, ou en faveur des classes populaires, le vote FN ne fait que renforcer la droitisation de l’échiquier politique et placer en position de force les partisans d’un programme ultralibéral très radical... Comme en témoignent les affaires qui menacent le parti d’extrême droite et sa candidate (les soupçons d’emplois fictifs au Parlement européen), le FN s’y connaît en affaires financières.

D’autre part, la perspective d’une arrivée au pouvoir du FN constituerait, certes, une déflagration dans le système politique, mais pour aller vers bien pire : un gouvernement de guerre civile qui montera les Français les uns contre les autres, en assurant les affaires du patronat. Voter pour Jean-Luc Mélenchon ouvre au contraire une sortie positive à la crise de régime que nous traversons : celle qui conduira vers une VIe République construite par les citoyens eux-mêmes, mettant fin à la monarchie présidentielle, qui n’écoutait plus la volonté exprimée par les Français dans leurs votes et lors des mouvements sociaux.

À CEUX QUI DÉSIRENT LA PAIX

Le Proche-Orient est en partie ravagé par la guerre. Elle menace aussi le continent européen où se multiplient les tensions, notamment à l’égard de la Russie. Jusqu’ici, les gouvernements aux affaires en France ont adopté des positions atlantistes, alignées sur celles des États-Unis, conduisant à la confrontation avec la Russie, notamment sur le dossier ukrainien. À plusieurs reprises dans cette campagne, Jean-Luc Mélenchon a critiqué cet alignement de la diplomatie française, et rappelé le caractère « universaliste » de la République française. Jean-Luc Mélenchon propose de sortir de l’Otan, instrument hérité de la guerre froide, qui aurait dû disparaître avec la fin du bloc de l’Est, et n’a cessé au contraire de s’étendre vers l’ancienne zone d’influence soviétique. Il refuse également la défense commune européenne, afin que la France puisse rester maîtresse de ses choix en matière de politique de défense, sans se retrouver emportée dans un engrenage propre aux alliances. Il propose également une conférence sur la sécurité de l’Atlantique à l’Oural, afin de rétablir un dialogue de paix avec la Russie, traitée en partenaire et non en ennemie, et de régler les contentieux frontaliers en Europe. Ces propositions en faveur du respect du droit international et du dialogue diplomatique font du bulletin de vote Jean-Luc Mélenchon le bulletin de la paix.

Ni maintien dans l’Otan, ni défense commune européenne : deux exigences pour aller vers la paix.

À CEUX QUI ONT PEUR DU ROUGE

Depuis sa percée dans les sondages, Jean-Luc Mélenchon est la cible de caricatures sans précédent dans la même veine que les prédictions apocalyptiques en cas de victoire du non au référendum de 2005. Tel éditorialiste le qualifie d’« ami des dictateurs ». Tel intellectuel l’assimile à Mme Le Pen dans un « soutien » à Bachar Al Assad. Tel chroniqueur nous affirme haut et fort que son programme économique « est celui du Venezuela », sans pour autant être capable de nous expliquer ce qu’est le programme économique du Venezuela... Taxé de « révolutionnaire communiste » par Emmanuel Macron, véritable « révolutionnaire » néolibéral, ou de « communiste » tout court par un Fillon trop heureux de tenter de cette façon de faire oublier ses costumes et ressouder son camp autour de la bonne vieille peur du rouge, il est aussi accusé de vouloir « quitter l’UE pour rejoindre l’Alba (alliance entre 11 États d’Amérique du Sud ­ NDLR) »... Face à la montée d’un candidat de gauche susceptible d’arriver au second tour et d’être élu, la droite et les soutiens du système vacillant de la Ve République ressortent les vieilles ficelles en tentant de diaboliser et discréditer un programme qui n’est pourtant que keynésien... Il fait peur à l’oligarchie parce qu’il risque de lui faire payer un rééquilibrage dans le partage des richesses du pays. C’est suffisant à susciter cette bronca. Mais on est loin des chars de l’Armée rouge à Paris.

Cédric Clérin Journaliste à l’Humanité dimanche


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