Présidentielle 2017 : et si Mélenchon passait lui aussi devant Fillon...

mardi 4 avril 2017.
 

Un croisement des courbes des sondages de Jean-Luc et de François Fillon pourrait conduire à un choc politique et à la décomposition de la Ve République et de ses institutions.

Il est une récente étude, celle de l’institut BVA, qui mérite de retenir un instant l’attention : elle place en effet Jean-Luc Mélenchon à 3 points seulement derrière François Fillon - 17% d’un côté, 14% de l’autre.

Parmi les multiples sondages qui tous constatent les mêmes évolutions au premier tour de l’élection présidentielle - Macron devant Le Pen, Fillon "scotché" autour de 18 points, Mélenchon précédent Hamon -, il est une récente étude, celle de l’institut BVA, qui mérite de retenir un instant l’attention : elle place en effet Jean-Luc Mélenchon à 3 points seulement derrière François Fillon - 17% d’un côté, 14% de l’autre. Selon BVA, le candidat de la droite républicaine poursuivait sa chute en "égarant" trois points en deux semaines tandis que le leader de "La France Insoumise", porté par une incontestable dynamique, en grappillait 2,5 supplémentaires.

A l’évidence, les électorats Fillon et Mélenchon ne partagent rien en commun. Quand des électeurs "abandonnent" l’ex-Premier ministre, ils ne renforcent pas les rangs de la gauche de la gauche ; ils se rabattent, selon leurs sensibilités, sur Marine Le Pen, Emmanuel Macron, parfois Nicolas Dupont-Aignan ou rejoignent d’éventuels abstentionnistes. S’il est nécessaire de s’arrêter sur les chiffres BVA, et de les commenter, c’est qu’ils attestent d’un fait nouveau : il n’est plus (tout à fait) exclu que la courbe Mélenchon "croise" la courbe Fillon. Certes, c’est encore loin, fort loin, d’être fait ; ce n’est toutefois plus impossible.

Et ce serait, avec la persistance du phénomène Macron, la confirmation de l’impact Le Pen, l’apparition d’un nouveau choc politique :

la gauche de la gauche au 3e rang reléguant le candidat PS dans les bas-fonds électoraux... la droite républicaine à la 4e place ratatinée davantage encore que prévu par l’extrême-droite...

Mais que resterait-il alors du système politique français ? De cette Ve République décrétée surpuissante depuis tant d’années et de ses institutions a priori inoxydables ? Un état de décomposition, et même plus que cela. Un écroulement pour inciter à la modestie des acteurs et observateurs de la politique

Il va de soi que Jean-Luc Mélenchon profite aujourd’hui, et peut être demain, de l’extrême faiblesse politique et personnelle de François Fillon. Le candidat LR a potentiellement perdu en un trimestre 40%(!) de son électorat. De la première place au lendemain de la primaire de la droite à la troisième désormais - voire à la quatrième. Personne n’était en mesure de prévoir pareil écroulement - Jean-Luc Mélenchon pas davantage que quiconque d’autre, ni parmi les acteurs politiques, ni parmi les observateurs de la politique. Voilà d’ailleurs qui incite à la modestie, tant dans les analyses que dans les pronostics, toujours hasardeux, de plus en plus hasardeux.

Jean-Luc Mélenchon a tablé à l’inverse sur un possible, sinon un probable, effondrement de Benoît Hamon, une descente ininterrompue, en deçà de ces 10% si symboliques. Il n’est pas de connaisseur plus affûté de la maison PS que l’ex-ministre adulateur de Mitterrand. Il sait tout de ses divisions politiques et idéologiques, des haines personnelles qui étreignent tant de socialistes, de l’incapacité pour Benoît Hamon de mener à bien une hypothétique "synthèse", ce mot magique censé résoudre tous les tourments afférents aux socialistes et qui, cette fois, ne sert plus à rien... Vers une nouvelle phase de la recomposition des gauches ?

Tout cela, Mélenchon le sait.

Tout cela, Mélenchon en rit.

Tout cela, Mélenchon en profite, jour après jour, sondage après sondage.

Le Parti socialiste survivrait avec bien des difficultés à une hypothétique victoire d’Emmanuel Macron. Le même PS serait enterré à jamais s’il se retrouve deux fois défait, au centre et sur sa gauche. C’est ce qui explique que, désormais, les intérêts de Macron et de Mélenchon sont pour partie convergents : plus Hamon finira bas, mieux ils se porteront l’un et l’autre. A l’occasion du premier débat télé, les spectateurs attentifs ont pu constater cette "alliance objective" entre les deux hommes, selon une expression chère à la gauche : ils se sont ménagés.

Troisième... Quatrième... Cinquième... Mélenchon sait à quel point le rang auquel il sortira prendra une importance à la fois politique et symbolique. S’il devance Hamon, s’il provoque le cataclysme de doubler Fillon, alors la gauche de contestation englobant l’aile gauche du PS aura trouvé son leader, incontestable et incontesté. Ce sera une nouvelle phase dans la recomposition des gauches.

Macron d’abord, Mélenchon ensuite. Hollande et les siens n’avaient rien prévu de tout cela. Quand à Hamon, il s’en tient à la "traîtrise"… Un peu court pour explication politique...

Maurice Szafran


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