Jean-Luc Mélenchon se pose en opposant numéro un (Le Monde)

jeudi 11 mai 2017.
 

Le leader de La France insoumise a appelé les « sept millions de personnes » qui ont voté pour lui au premier tour à rester « regroupées » en vue des élections législatives.

Oubliée l’amertume de la défaite du premier tour de la présidentielle. C’est un Jean-Luc Mélenchon offensif qui s’est présenté, dimanche 7 mai, après l’annonce de l’élection d’Emmanuel Macron à l’Elysée. Le chef de file de La France insoumise, qui a réuni 19,58 % des voix le 23 avril, a attendu que le nouveau président de la République ait pris la parole pour lui-même s’exprimer. Son but : incarner l’opposant numéro un au nouveau chef de l’Etat lors des législatives qui se tiendront les 11 et 18 juin.

Dans une courte déclaration réalisée depuis son siège de campagne, près de la gare du Nord à Paris, le député européen a pris « acte sans barguigner » de la victoire du candidat d’En marche ! avant de décocher ses flèches. La première est réservée à François Hollande, qui représente à ses yeux « la présidence la plus lamentable de la Ve République ». Vient le tour de Marine Le Pen, qui termine « troisième de ce deuxième tour après M. Macron, les abstentions, les bulletins blancs et nuls » – une façon pour M. Mélenchon de légitimer son absence de consigne de vote lors de l’entre-deux-tours. Enfin, le leader de La France insoumise s’est attaqué au programme du « nouveau monarque présidentiel », le résumant à quelques mots : « La guerre contre les acquis sociaux du pays et l’irresponsabilité écologique. »

Après lui, ses lieutenants se sont employés à affaiblir la portée de la victoire de celui qui est arrivé largement en tête du second tour, avec 66,1 % des suffrages. « J’affirme ici sans manquer de respect à M. Macron qu’il est minoritaire dans le pays (…), et malheur à celui qui croit utiliser cette Ve République autoritaire pour imposer des choses que les Français ne veulent pas », a prévenu Alexis Corbière, porte-parole de M. Mélenchon, sur France 2. « L’abstention explose. Les bulletins blancs et nuls n’ont jamais été aussi nombreux. Ce pouvoir est fragile », a tweeté Charlotte Girard, responsable du programme de La France insoumise.

Concurrence fratricide

Jean-Luc Mélenchon entend désormais se rappeler au bon souvenir de celui qu’il avait qualifié, le 29 avril, de représentant de l’« extrême finance ». Cap sur les législatives pour l’ancien socialiste. « Après un vote de refus et de peur, le moment est venu d’un choix positif, le choix d’un avenir en commun », a-t-il déclaré. L’ex-candidat a appelé les « sept millions de personnes » qui ont voté pour lui au premier tour de la présidentielle à rester « regroupées ». « Fédérez-vous », a-t-il intimé à plusieurs reprises avant de lancer : « A notre appel, le 18 juin, deuxième tour des législatives, notre résistance peut gagner la bataille. Je vais m’y employer avec vous de toute mon énergie. »

Pour Bruno Cautrès, chercheur au Cevipof, le message est clair : « Montrer que le vrai patron à gauche, c’est lui. » « Une nouvelle majorité parlementaire est possible autour de nous », a martelé M. Mélenchon. Ce dernier n’a pas précisé s’il sera lui-même ou non candidat aux législatives, mais il devrait dévoiler ses intentions mercredi au plus tard. D’ici là, les laborieuses négociations avec le Parti communiste (PCF) devront avoir été bouclées. La date butoir a été fixée à mardi. Un accord entre les deux alliés de la présidentielle est cependant loin d’être fait et l’hypothèse de les voir se présenter séparément dans une concurrence fratricide n’est pas à écarter. « Fédérer le peuple contre l’oligarchie »

La France insoumise veut imposer une charte qui contient un cadre commun (visuel et programmatique), une association de financement unique et une discipline de vote, ce qu’a refusé le PCF. Il est désormais question de désistements réciproques limités. Mais l’ambiance n’est pas à la conciliation. Jeudi, le mouvement de M. Mélenchon a menacé de poursuivre en justice les candidats communistes qui utilisent son image sans disposer de son soutien.

Dimanche soir, une rencontre était évoquée pour lundi mais n’était pas encore calée. « Ou bien nous faisons preuve d’intelligence collective et on peut construire un groupe parlementaire, ou bien nous serons en situation de concurrence et tout ça ne fera pas de députés », met en garde Olivier Dartigolles, porte-parole du PCF.

Vendredi, David Cormand, secrétaire national d’Europe Ecologie-Les Verts, a, quant à lui, annoncé avoir essuyé une fin de non-recevoir à sa proposition d’alliance. « Si La France insoumise restait sur cette position, ce serait une faute politique grave, ce serait faire la politique du pire, déplore-t-il. Sans rassemblement, cela fera le jeu des députés de Macron et de droite. » Une stratégie qui s’inscrit cependant dans la droite ligne de la présidentielle, où M. Mélenchon voulait non pas « rassembler la gauche » mais « fédérer le peuple contre l’oligarchie » pour prendre en tenailles le PS avec M. Macron.

Raphaëlle Besse Desmoulières Journaliste au Monde

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