Derrière le « neuf », la vieille guerre sociale !

dimanche 6 août 2017.
 

Derrière la recomposition politique se cache bien le projet de décomposition de ce que l’on appelle le « modèle social » au diapason des recommandations européennes, main dans la main avec la chancelière allemande.

Une fois passés les concours de sourires à la une des magazines en papier glacé, les expositions de « nouveaux visages », les camouflages de parcours de nombreux députés et les injonctions à « lui donner sa chance », les lendemains qui s’annoncent pourraient s’avérer bien moins agréables pour l’immense majorité des salariés, des retraités et des privés d’emploi.

Ne doutons pas que des efforts considérables vont être déployés pour faire accepter les multiples dimensions des régressions sociales et démocratiques. Déjà, dans les bureaux des ministères se concocte un nouveau budget d’austérité qui réduira encore les moyens et les capacités de nos services publics. La nouvelle majorité parlementaire, à laquelle s’adjoint une diversité d’endosseur de vestes retournées, ne s’opposera pas à la loi d’habilitation visant à dissoudre le code du travail dans l’acide d’ordonnances répondant aux désirs d’un MEDEF se déclarant « sur un nuage ».

Les négociations sur les salaires, la durée du travail ou les conditions de travail, ne seront plus codifiées dans la loi commune mais renvoyées à l’entreprise, là où les salariés feront l’objet de multiples chantages. L’employeur pourra prendre l’initiative d’un référendum sur les conditions et le temps de travail dans l’entreprise. Les indemnités prudhommales seront plafonnées pour permettre les licenciements abusifs à moindre coût. La démocratie sociale sera tailladée avec la fusion des instances représentatives du personnel, réduites pour empêcher l’organisation des travailleurs, diminuer leurs moyens d’intervention dans l’entreprise comme les possibilités de recours contre des abus et risques qui pèsent sur eux. Les licenciements économiques seront facilités par filiales des groupes internationaux, laissant le champ libre aux artifices juridiques dont usent et abusent les multinationales pour accroitre leurs profits au détriment de l’emploi, comme en font l’amer expérience les salariés de Tati. Le Contrat dit « à durée indéterminé » pourra être signé…« pour la durée d’un chantier » ! C’est un pas décisif vers la veille requête patronale du contrat unique et précaire.

Derrière la recomposition politique se cache bien le projet de décomposition de ce que l’on appelle le « modèle social » au diapason des recommandations européennes, main dans la main avec la chancelière allemande.

Après le code du travail seront concernées notamment l’assurance chômage, les retraites et la fiscalité. Cette offensive prévue sur quelques mois servira de test pour engager la mère des batailles : celle contre la cotisation sociale pour attaquer la Sécurité sociale et l’idée même d’une socialisation des richesses.

L’étatisation de l’Assurance chômage et la fiscalisation de son financement par le biais de la CSG et la suppression des cotisations salariales, n’est qu’un avant goût de cet autoritarisme libéral qui fleure bon le second Empire. Les prestations seront désormais soumises aux règles de l’orthodoxie budgétaire. Le paritarisme, s’il faisait mauvaise mine du fait du poids exorbitant laissé au patronat dans les négociations, est renversé au profit de décisions politico-administratives centralisées.

La liquidation annoncée de la taxe d’habitation participe de cette offensive. Les impôts locaux devraient évidemment être réformés. Mais la suppression annoncée va entamer, une fois de plus, l’autonomie des collectivités locales. La promesse présidentielle de compenser par l’Etat les pertes subies par les collectivités participe du même autoritarisme libéral. C’est la voie ouverte à la fin des communes et vers la métropolisation à pas cadencés. La démocratie et les résistances locales, à commencer par les services publics de proximités, sont clairement dans le viseur de cette contre-réforme empoisonnée. Cette destruction permet de passer sous le tapis la scandaleuse suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune pour les actifs financiers et les gros actionnaires !

Le projet de texte sur ce qu’ils appellent « la moralisation de la vie politique » participe des rideaux de fumée sur lesquelles on souffle pour ne pas parler de l’essentiel : la démocratisation de la société et de la gestion des entreprises. Ajoutons que le projet de loi anti-terroriste vise à intégrer pour les pérenniser dans le droit commun ce qui était hier des exceptions de l’Etat d’urgence, au détriment des libertés publiques.

Rien n’est plus urgent que d’éclairer la nature de ces projets et leurs conséquences.

Patrick Le Hyaric Directeur de l’Humanité


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