Pénurie de beurre, avatar de l’ économie laitière mondialisée

mardi 7 novembre 2017.
 

Depuis quelques jours, les images de rayons de supermarché en rupture de stock pour le beurre occupent la scène médiatique, illustrant à grand renfort de dramatisation, une « pénurie de beurre » inédite.

Au cours du premier semestre 2017, les cours mondiaux du beurre ont flambé, résultat d’une baisse de la production laitière chez les principaux exportateurs (Nouvelle-Zélande, Europe) alors que la demande mondiale en beurre s’est raffermie. Au niveau mondial, de légers décalages offre - demande peuvent se traduire par une sur-réaction du niveau des prix du beurre et de la poudre de lait. Cette fois-ci, le prix de la « matière grasse » (beurre) flambe mais le prix de la « protéine » (poudre de lait) reste bas. Pour comprendre l’hypervolatilité de ces marchés, certains analystes évoquent l’impact des marchés à terme et de la plate-forme d’enchères néo-zélandaise (Global Dairy trade)

En Europe, la baisse de la production laitière s’explique par le fait que les agriculteurs ont réduit leur production après avoir subi de plein fouet la chute des cours, contrecoup de la sortie des quotas laitiers en 2015 encourageant à la surproduction. Cette tendance a été renforcée par des conditions climatiques défavorables à la production fourragère depuis fin 2016.

En France, la « pénurie de beurre » serait liée aux différends entre industriels et distributeurs pour s’accorder sur le prix d’achat du beurre et aux types de contrat qui régissent ces relations commerciales. Comme certains distributeurs refusent les hausses de prix demandés par les industriels au regard de l’envolée des cours mondiaux du beurre, ces derniers se tournent vers les marchés d’exportation, plus rémunérateurs. Résultat : les étals des supermarchés commencent à se vider.

La situation pourrait se retourner rapidement : les cours mondiaux du beurre baissent depuis septembre, la production laitière est à nouveau en hausse en Europe et en Nouvelle-Zélande. En Europe, les conséquences de la crise laitière de surproduction ne sont pas résorbées. Les 350 000 tonnes de poudre de lait qui ont été retirées du marché et stockées ne trouvent pas de débouchés.

Preuve en est qu’il est nécessaire de réguler le marché du lait et de construire des mécanismes de partage de la valeur ajoutée entre production et transformation pour limiter l’exposition des acteurs des filières à la volatilité des cours mondiaux, qui restent une fiction au fort pouvoir déstabilisateur.

Anne Sampognaro


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