Succès électoral du parti "La Gauche" en Allemagne

lundi 21 mai 2007.
 

Allemagne . Die Linke. crée la surprise, en réalisant dimanche 8,4 % des suffrages dans la cité État de Brême, ce qui constitue une première à l’ouest du pays.

« La percée du parti Die Linke. (la gauche) constitue de très loin le principal enseignement des élections de Brême. » L’analyse du politologue Hubert Kleinert dans l’édition on line du magazine Der Spiegel donne la mesure de la surprise et du potentiel chamboulement politique induits par la percée de Die Linke. dans le scrutin de dimanche dans la ville État des bords de la mer du Nord. Passant de 1,7 % à 8,4 % des suffrages, le parti de Gregor Gysi et Oskar Lafontaine franchit haut la main la barre des 5 %, ce qui lui permet d’entrer, pour la première fois, dans une assemblée régionale à l’ouest du pays où le Linkspartei n’était jusqu’alors pas représenté.

Le parti social-démocrate (SPD), qui dirige le Land depuis douze ans à la tête d’une grande coalition avec les chrétiens-démocrates (CDU), renoue, quant à lui, avec la série de votes sanctions qui avaient marqué toute l’ère de Gerhard Schroeder. Avec 36,8 % des suffrages, il reste certes le premier parti dans la cité État mais il perd quelque 5,5 points. La CDU est également sanctionnée (25,6 % contre 29,9 % en 2003). À côté du parti de gauche, les Verts et le parti libéral (FDP) sont les deux autres formations bénéficiant de la désaffection à l’égard des grands partis, au pouvoir ensemble à Berlin, sous la houlette d’Angela Merkel. Les Verts obtiennent 16,4 % des suffrages (contre 12,8 % en 2003) et le FDP peut franchir la barre des 5 % (6 % contre 4,2 % en 2003).

Le vote constitue un camouflet pour la grande coalition. La poursuite des réformes antisociales, et notamment celle toujours très controversée du marché du travail Hartz IV, alimente le mécontentement populaire, lequel s’est traduit aussi, au passage, par un discrédit accru de la chose politique et par un taux de participation de seulement 58 %, soit le plus faible de toute l’histoire électorale de Brême.

Le SPD, qui ne sait comment se sortir de la crise de confiance de son électorat traditionnel, a tenté de laisser entendre, avant le scrutin, une musique un peu plus sociale et indiqué qu’il pourrait changer de partenaire pour diriger le Land. Une coalition SPD-Verts, en lieu et place de l’équipe sortante, arithmétiquement possible, permettrait aux sociaux-démocrates de suggérer qu’ils restent en possession d’une carte alternative pour les prochaines échéances nationales. Mais leur très net recul ne les place pas en position de force à l’égard de leur partenaire de Berlin. Même si les dirigeants locaux du SPD ont annoncé leur intention d’entamer des pourparlers autant avec la CDU qu’avec les Verts pour diriger Brême. Pas question cependant d’envisager une coalition à gauche (SPD-Verts-Die Linke.). Le scénario a été d’emblée rejeté par Jens Böhrnsen, le maire SPD sortant de la cité État.

La percée électorale tombe d’évidence au meilleur moment pour la dynamique de Die Linke. à la veille de son congrès fondateur, prévu à la mi-juin à Berlin. Ce succès devrait contribuer à animer les débats sur le calage identitaire et programmatique du nouveau parti. D’aucuns jugent qu’il doit se placer sur une ligne socialiste keynésienne traditionnelle, « à la manière du SPD d’avant 1998 » (date de l’avènement de Gerhard Schroeder), comme l’a affirmé sans ambages Oskar Lafontaine, il y a quelques semaines dans un grand quotidien berlinois (1). D’autres, contestant cette approche, estiment que la formation doit son succès de Brême « à son positionnement radical dans la campagne » (2), en phase avec les besoins modernes de transformation sociale et de dépassement du capitalisme. La question semble encore ouverte. Quoi qu’il en soit, l’émergence d’un nouveau venu sur l’échiquier politique, y compris à l’Ouest, paraît maintenant à portée de main.

de Bruno Odent

(1) In Der Tagespiegel du 19 mars 2007.

(2) Communiqué du réseau

de la gauche anticapitaliste au sein du parti dans lequel on trouve notamment la députée Cornelia Hirsch, l’eurodéputée Sahra Wagenknecht (Linkspartei.PDS) et la dirigeante de la WASG, Sabine Lösing.


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