Face aux fossoyeurs de la démocratie, réaffirmons que la souveraineté des peuples est par essence inaliénable

dimanche 30 décembre 2018.
 

Il est convenu de considérer que l’onction des urnes confère la légitimité démocratique nécessaire à la représentation de la souveraineté populaire. Si cela n’a pas toujours été le cas, quoi d’autre pourrait bien être utilisé dans la période ? Poser la question c’est donc y répondre. Mais il serait tout aussi illusoire de fermer les yeux sur le fait que la validation par les urnes n’est plus un sanctuaire pour l’exercice du pouvoir comme l’actualité en atteste.

En Italie, l’Union Européenne (UE) et les marchés, main dans la main, se sont empressés de refuser par l’intermédiaire du président italien le premier gouvernement proposé conjointement par le M5S et la Lega. Si un accord a donc été trouvé in fine, il aura fallu que les partis sortis des urnes composent avec la tutelle et les menaces de l’UE, le commissaire européen allemand Günther Oettinger se permettant même de menacer : « Je suis inquiet et je m’attends à ce que dans les semaines à venir les développements pour l’économie de l’Italie pourraient être si drastiques que cela pourrait être un signal possible aux électeurs de ne pas choisir des populistes de gauche et de droite. ». Les urnes nationales peuvent ainsi être délibérément soumises au chantage de l’UE.

En Espagne, le gouvernement Rajoy, né après six mois de palabres et deux élections générales consécutives en décembre 2015 et juin 2016, vient de voler en éclat après la motion de censure déposée après que le PP a été reconnu coupable de corruption. La crise démocratique doublement sortie des urnes a conduit à la mise en place d’un gouvernement à ce point brinquebalant qu’il n’a pu ni gérer la crise catalane, ni résister à cette condamnation. Pour la première fois depuis la Transition démocratique de 1978, un gouvernement accède donc aux responsabilités en Espagne sans émaner directement du suffrage universel. Le gouvernement Sanchez peut bien recycler et assumer les propositions budgétaires du PP, les urnes ne constituent plus un passage nécessaire pour la conquête du pouvoir.

Aux Etats-Unis, les états, et donc électeurs, ayant voté pour M. Trump sont victimes de représailles commerciales dites "ciblées" par l’UE après que le président américain a acté le protectionnisme sur l’aluminium et sur l’acier. Certaines marques sont ainsi choisies à dessein par l’UE pour être taxées selon leur implantation géographique et le résultat du vote lors de la dernière présidentielle. L’UE s’invite donc dans le jeu électoral nord américain après avoir fait la leçon sur "l’ingérence" russe durant celle-ci. Le passage aux urnes s’avère désormais être sujet à représailles.

Le vote bafoué des Français.es et des néerlandais en 2005 est encore dans toutes les mémoires. Mais la multiplication et la diversité des arrangements avec le passage aux urnes dessinent une tendance lourde : les urnes ne sont plus une garantie tant pour la conquête que pour l’exercice du pouvoir. Face aux fossoyeurs de la démocratie, il est plus que jamais nécessaire de ne pas céder et de réaffirmer que la souveraineté des peuples est par essence inaliénable. Le faire par le vote le 26 mai prochain lors des élections européennes serait un beau pied de nez fait à ceux-là.

François Cocq


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