Retraites : 25 ans de régression

mardi 8 janvier 2019.
 

La chute du montant des pensions de retraite ressemble à un film au ralenti. Un peu comme dans cette histoire de l’homme qui tombe d’un immeuble de quinze étages : « Jusqu’à maintenant, tout va bien » ! Car ce n’est que progressivement que ces réformes produisent tous leurs effets. La contre-réforme de Macron couronnerait toutes celles qui l’ont précédée en les aggravant considérablement.

Pourtant, même si l’on ne peut considérer que ces contre-réformes ne permettent pas à la grande majorité des retraités de bénéficier de retraites correctes, il n’est plus possible, comme le faisait le Medef en 2013, de parler de « déficits abyssaux » dans les prochaines décennies. Le rapport du Conseil d’orientation des retraites de juin 2018 considère que notre système de retraites sera équilibré en 2050. Il a donc fallu que Macron trouve un autre prétexte pour continuer à le faire régresser : la construction d’un système unique et équitable dans lequel « chaque euro cotisé accroîtra de la même manière la pension future ».

Le passé d’une régression

En 1993, la loi Balladur frappe les salariés du secteur privé en plein été. Elle impose l’augmentation progressive, de 37,5 à 40, du nombre d’annuités nécessaires pour bénéficier d’une retraite à taux plein. Le salaire de référence qui permet de calculer la retraite de base prend progressivement en compte les 25 – et non plus les 10 – meilleures années..

En 2003, la loi Fillon étend à la Fonction publique la règle des 40 annuités de cotisation pour pouvoir bénéficier d’une retraite à taux plein. Les générations nées en 1960 et au-delà devront (à partir de 2020) valider 41,5 annuités. En 2008, la règle des 40 annuités est étendue aux régimes spéciaux des grandes entreprises publiques.

En 2010, la loi Sarkozy-Woerth du 9 novembre fait passer l’âge légal de la retraite de 60 à 62 ans. Pour les personnes salariées n’ayant pas cotisé le nombre de trimestres nécessaires, l’âge qui permet de bénéficier du taux plein est relevé, lui aussi, de deux ans (de 65 à 67 ans).

En 2013, le gouvernement de François Hollande prend le relais de Chirac en 2003 et impose une nouvelle augmentation de la durée de cotisation : 43 annuités en 2038.

L’échelle de perroquet

Les mesures prises, de 1993 à 2008, se sont toutes appuyées sur une soi-disant volonté d’« équité » entre privé et Fonction publique, entre Fonction publique et régimes spéciaux.

Comme un perroquet descendant son échelle rudimentaire, prenant fermement appui sur un échelon pour atteindre le suivant, chaque régression dans un secteur ou un régime de retraites a servi de point d’appui à une régression dans un autre secteur ou un autre régime.

L’allongement de la durée de cotisation infligé au régime de base du secteur privé en 1993 fut aussitôt répercuté dans les régimes de retraite complémentaire.

En novembre 1995, Alain Juppé avait oublié que l’on ne pouvait franchir qu’un échelon à la fois. Il a tenté d’imposer sa contre-réforme à la fois aux salariés de la Fonction publique et à ceux des grandes entreprises publiques (SNCF, EDF-GDF, RATP…). L’énorme mobilisation sociale qui s’en est suivie l’a obligé à reculer.

Depuis, les « réformateurs » ont respecté la règle et s’en sont tenu à la technique du perroquet. Ils se sont appuyés sur la réforme de 1993 dans le secteur privé pour imposer celle de 2003 dans la Fonction publique. Ils ont pris appui sur la réforme de 2003 pour obliger les salariés des grandes entreprises publiques à accepter la contre-réforme de leurs régimes spéciaux en 2008 et leur imposer la règle des 40 annuités.

L’effet cliquet

Jamais une mesure régressive mise en place n’a été par la suite abrogée. Tout se passe comme si un cliquet avait été aussitôt installé, empêchant tout retour en arrière.

L’âge de départ en retraite est passé de 60 à 62 ans. L’âge-butoir, permettant de bénéficier d’une retraite à taux plein en ne bénéficiant pas d’un nombre de trimestres suffisants est passé de 65 à 67 ans. La durée de cotisation est passée de 37,5 à 40 annuités, puis de 41,5 à 43 à l’horizon 2035.

Faire céder Macon

Macron essaie, une nouvelle fois, de faire régresser nos retraites et de mettre en place un système qui les verrouillerait complètement.

Il est pourtant possible de récidiver la mobilisation de 1995 et de le faire céder. Il apparaît maintenant clairement comme le « président des riches ». Il est fragile (21 % d’opinions favorables lors du dernier sondage d’octobre 2018). Il n’a aucune base sociale réelle et ne peut s’appuyer que sur un « mouvement » dont l’extrême évanescence n’a d’égal que l’incompétence de son groupe parlementaire.


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