Explication de vote de Guilhem Serieys, conseiller régional France Insoumise sur l’opération « Réalisation d’une unité de méthanisation agricole collective dans la commune de Montaut (09) »
Guilhem Serieys a voté contre cette subvention, ainsi que Patrick Cazes, élu PCF. Tous les autres élus, PS, PRG, EELV, droite, FN ont voté pour.
A noter que deux élues EELV, dont la vice-présidente de Région chargée de la Transition écologique ont quitté la commission au moment de l’examen de ce rapport sans se prononcer.
Je suis surpris que la proposition de subvention de près de 3 millions d’euros de fonds européens pour l’unité de méthanisation industrielle de Montaut en Ariège ne fasse pas l’objet d’une information spécifique des élus de notre commission. J’en déduis que sans mon intervention cette subvention serait votée sans débat. C’est d’autant plus problématique qu’après le vote de cette Commission Consultative Thématique, ce rapport n’est pas soumis à la délibération de notre Assemblée plénière ou Commission permanente mais directement à la décision de la Présidente de Région, selon un procédé démocratique très discutable appliqué aux fonds européens dont la Région est autorité de gestion.
Surtout, vous savez que la méthanisation industrielle est un sujet sensible de discussion dans notre Conseil régional. Après nos polémiques à propos du financement régional du méthaniseur de Gramat, un groupe d’élus régionaux avait travaillé il y a un peu plus d’un an et produit un rapport d’initiative sur le sujet de la méthanisation avec de nouveaux critères pour évaluer l’opportunité politique d’accompagner financièrement de nouveaux projets.
J’ai donc deux questions préalables. Premièrement, a-t-on sollicité l’avis des élus rédacteurs du rapport d’initiative sur la méthanisation à propos de cette opération dans l’Ariège ? Je comprends à leur réaction que ce n’est pas le cas. Deuxièmement, a-t-on tenu compte des préconisations de ce rapport pour évaluer l’opportunité d’aider à hauteur de 3 millions d’euros ce projet de Montaut ? La réponse qui m’est faite en Commission est que les nouveaux critères d’intervention sur la méthanisation engagent le Conseil régional en ce qui concerne le vote de crédits régionaux mais pas en ce qui concerne l’engagement des fonds européens, ici le FEDER, dont la Région est gestionnaire. Cet argument me laisse pantois. Car au-delà des rouages techniques, la décision finale d’engager une subvention, qu’elle soit de crédits « Conseil régional » ou « européens gérés par le Conseil régional » appartient bien à l’évaluation politique et s’apprécie dossier par dossier par le débat et le vote des élus. Et l’opportunité politique d’aider tel ou tel projet s’étudie à l’aune de son intérêt écologique, économique, social, bref de son rapport à l’intérêt général qui fait l’objet de discussions et d’arbitrages politiques. Je pense sans trahir le vote des élus de notre Assemblée régionale sur le « rapport d’initiative méthanisation » que leurs appréciations sur le sujet valaient autant pour l’engagement des crédits régionaux que pour les fonds européens que nous gérons. Une telle distinction n’a d’ailleurs jamais été faite dans le « rapport d’initiative méthanisation ».
J’aborde le fond du dossier avec parcimonie car les deux pages de présentation écrite qui nous sont soumises le sont aussi. Pourtant, la somme en jeux, 3 millions d’euros pour un projet de 7,5 millions est colossale et disproportionnée en rapport à d’autres choix. Je rappelle par exemple que le montant du plan bio 2019 pour toute la Région est de 3 millions d’euros. Il ne nous appartient pas ici de nous prononcer sur la légalité ou les autorisations pour ce projet de méthaniseur, ce rôle étant dévolu au préfet du département. Il s’agit pour le Conseil régional de soutenir financièrement ou non le projet en fonction de notre vision de la nécessaire transition écologique de notre agriculture.
Le gisement de déchets agricoles nécessaires au plan de charge du méthaniseur est de 22 000 tonnes, notamment en pieds mâles des ensilages de maïs, et de 6000 tonnes de lisier. Faire porter la rentabilité économique du projet sur une telle quantité de pieds de maïs est déraisonnable eu égard à l’urgence de réduire nos productions prédatrices de ressource en eau. On peut me rétorquer qu’il s’agit ici de cultures de maïs semences. Mais nous savons que les superficie de maïs semences diminuent. Nous n’avons pas de garanties que les pieds utilisés ne soient pas un jour issus des cultures de maïs alimentation. Notre « rapport d’initiative méthanisation » prévoit pourtant fort justement « la réorientation sur 10 ans du système cultural principal vers des cultures moins gourmandes en eau, en intrants azotés, en herbicides et en pesticides : ex. la culture de maïs, même la production de semences s’engagerait à un objectif de conversion de 50% de superficie vers le poids chiche, le tournesol, le sorgho, etc ». Autant dire que soutenir de projet de méthaniseur revient à aller à l’inverse des choix que nous avons pourtant arrêtés collectivement en votant le « rapport d’initiative méthanisation ». C’est un très mauvais signal à l’heure où l’urgence climatique appelle à revoir nos modèles agricoles.
L’évaluation du projet doit également s’apprécier en regard de son bilan écologique global. Le gisement de déchets mobilisables ne doit pas impliquer des distances de transports trop éloignées de l’installation. Je crains que la réalité ici soit bien autre. D’une façon générale, les projets de méthanisation doivent être dimensionnés de façon à permettre un traitement de proximité et non la recherche permanente d’une maximisation des volumes.
Je vote contre et forme le souhait d’un examen attentif de ce rapport par Madame la Présidente avant sa prise de décision.
Guilhem Serieys
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