Mélenchon-Macron où va la justice ?

jeudi 11 juillet 2019.
 

Depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron au pouvoir la Justice est devenue, comme dans d’autres périodes sombres de notre histoire, clairement au service exclusif du prince et de ses ambitions. Dans le cas de Jean-Luc Mélenchon les policiers menacent de forcer le passage, dans celui de Benalla ils rentrent au bercail sans mot dire.

D’évidence il était hors de propos que Benalla soit inquiété alors on croit la fable selon laquelle il n’avait pas les clés de son appartement et on veut que le quidam croie la version d’A. Benalla paré par l’Élysée de tous les caractères d’un parangon de vertu aussi, donc on va s’attaquer à un journal soupçonné de s’opposer au Pouvoir dans cette affaire. Alors le procureur ordonne une perquisition de Médiapart sans que le directeur en soit prévenu, pire le procureur savait que ce directeur était retenu à une audience devant un tribunal pour une autre affaire. Un livre ne suffirait pas à dire toutes les distorsions dans le traitement judiciaire des affaires proches de la politique, et l’extrême lenteur dans le traitement de celles qui touchent le pouvoir macronien : Richard Ferrand, Alexis Kohler, Muriel Pénicaud, Ismaël Émélien, et la décision de classer sans suite l’affaire des hauts fonctionnaires en poste à l’Élysée dans le cadre de l’affaire Benalla : tous sont blanchis en même temps que la vierge élyséenne voit sa virginité confirmée (cela ressemble beaucoup à une chirurgie réparatrice de l’hymen). Le renvoi, après une enquête tellement rapide et basée seulement sur les témoignages des policiers, de Jean-Luc Mélenchon devant un tribunal, alors que toutes les affaires où sont impliqués les proches du pouvoir traînent jusqu’à se faire oublier, montre bien la mainmise de l’Élysée sur la Justice et sa volonté d’assassiner politiquement La France Insoumise. D’ailleurs relevons que l’annonce du renvoi de Jean-Luc Mélenchon n’a été faite que par un journal : l’Express qui titrait « Mélenchon bientôt jugé en correctionnelle » (Laurent Léger, publié le 27/06/2019, site de l’Express).

L’Express, journal ni gauche ni droite, a comme directeur de la rédaction Christophe Barbier dont on peut mesurer à chacune de ses interventions sur BFM sa proximité intellectuelle avec le macronisme. Pour Christophe Barbier le journalisme doit être engagé mais non partisan, soit mais il demeure que suivant l’intensité de l’engagement idéologique ou intellectuel (au choix) on finit par donner l’image de son adhésion. Cette position peut être assez contradictoire avec l’idée qu’il développe selon laquelle la mission d’un journal, plus particulièrement d’un chroniqueur, est d’offrir un « maximum d’éléments » aux lecteurs « pour qu’ils puissent éclairer et former leur jugement », et qu’il ne doit « donner aucune consigne de vote » ; une telle démarche implique l’usage de propos contradictoires et exclut l’engagement : ça s’appelle l’information (objective). En 2013, lors du débat sur le travail dominical, il se déclarait en faveur de la déréglementation du travail le dimanche et dénonce le « respect stupide du droit ». Il recommande aussi la suppression de la cinquième semaine de congés payés pour les salariés. Ce sont là des positions partisanes car elles relèvent d’un parti pris idéologique ou intellectuel qui ne laisse pas place au doute et à la contradiction, d’autant que Monsieur Barbier dans ses interventions n’exprime jamais le pour et le contre, son discours est univoque. Il confirmait sa position en déclarant au Journal du Dimanche[2] en 2017 : « Se confronter au terrain pollue l’esprit de l’éditorialiste. Son rôle est de donner son opinion, d’affirmer ses certitudes, par essence improuvables. Afficher avec force ses convictions permet aux lecteurs de s’y frotter pour former les leurs. » et « L’éditorialiste est comme un tuteur sur lequel le peuple, comme du lierre rampant, peut s’élever. », les gens pleins de certitudes, détenteurs de la vérité, sont extrêmement dangereux, l’histoire de l’humanité regorge d’exemples. C’est donc le journal qu’il dirige qui annonce, semble-t-il avant que l’intéressé en ait été officiellement informé, le renvoi de JL Mélenchon devant un tribunal. Voilà donc qu’un journal devient huissier de justice et porte les convocations à comparaître ; la Justice se réduit de plus en plus sous l’ère Macron à l’espace médiatique comme je l’explique dans mon livre « Gilets Jaunes[3] ».

Revenons sur le fond de l’affaire où une fois encore le pouvoir met en scène les policiers en nous invitant à pleurer sur leur sort. La véhémence de JL Mélenchon aurait meurtri et blessé les policiers d’une façon telle que leur santé mentale en serait gravement ébranlée. L’avocat de l’un de policiers a déclaré : « Cette affaire a eu des répercussions graves sur le plan psychologique pour les enquêteurs, qui sont avant tout des êtres humains. » Il est bien évident que les Gilets Jaunes, ou les blessés collatéraux, qui ont perdu un œil, une main ou un pied à la suite de violences policières, ou les gamins de Mantes-la-Jolie agenouillés deux heures durant les mains sur la tête sous la houlette de policiers, ne sont-ils pas des êtres humains. La différence entre eux est que les premiers ont choisi d’exercer un métier difficile alors que les autres ne font que manifester leur désarroi, leur colère, leur envie d’un monde meilleur ; d’un côté il y a la force, et ici aujourd’hui la violence, fussent-elles celles de l’État et donc légitimes (?), de l’autre il n’y a que plainte et faiblesse. Cet avocat d’ajouter que « Ce procès va permettre de mettre en lumière les difficultés que subissent les membres des forces de l’ordre et les souffrances que cela peut engendrer chez eux », pôvre avocat qui n’a jamais vu une pièce de Guignol. Ne lisez pas que je minimiserais les difficultés physiques et psychologiques auxquelles sont confrontés les policiers et les gendarmes, mais aussi les militaires, les sapeurs-pompiers et les personnels des hôpitaux, et plein d’autres ; le propos n’est pas là car ce procès ne résoudra aucune de ces difficultés et que ce qu’il veut montrer ce n’est que l’autorité du pouvoir en se servant de la défense de son bras armé qu’est la police comme on se sert d’une image en communication, rien d’autre ; il ne s’agit ici, pour le pouvoir, de se donner une image « d’autorité » et de rassurer les peureux et les tenants de l’ordre.

À travers cette affaire on mesure l’emprise que veut avoir E. Macron sur les gens et la société pour façonner le pays suivant ses seuls désirs au service du capital. Alors il manipule l’opinion par des jeux de communication pas toujours honnêtes (la conduite du Grand Débat en a été une illustration) : de la propagande, et par l’instrumentalisation de la Justice. En France, désormais la Justice n’est plus au service des femmes et des hommes, elle est au seul service du prince et ne fait que répondre à ses ordres pour satisfaire ses désirs de puissance et de paraître.

[1] https://www.nouvelobs.com/justice/2...

[2] https://www.lejdd.fr/Societe/christ...

[3] Latouille JJ, Gilet Jaunes, Iggybook, avril 2019

Le texte ci-dessus n’est qu’un extrait de l’article porté en source (haut de page, couleur rouge).


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