Election de Boris Johnson : quelles conséquences ?

mercredi 31 juillet 2019.
 

Initialement prévu le 29 mars 2019, le Brexit est désormais reporté au 31 octobre, mais une nouvelle prolongation n’est pas impossible. Après s’être débattue pendant des mois pour éviter que le Royaume-Uni ne quitte l’UE sans accord, Theresa May a fini par démissionner, juste avant la victoire écrasante du Parti du Brexit aux élections européennes.

« Il est absolument vital que nous sortions de l’UE le 31 octobre, sinon l’hémorragie de la confiance se poursuivra. » Boris Johnson a martelé à plusieurs reprises son engagement à mener à bien le Brexit dans le délai imparti. Une fermeté destinée à affaiblir la position de son concurrent Jeremy Hunt, beaucoup moins inflexible que lui sur la date. Johnson a raillé sa conception d’une échéance flexible et l’a provoqué sur le flou de son calendrier : « Pourquoi pas Noël ? Ça irait Noël ? » À l’inverse, il a évité le piège tendu par Jeremy Hunt qui lui demandait s’il démissionnerait en cas d’échec à remplir sa promesse : « Je ne veux pas donner à l’UE une motivation pour nous refuser un accord ».

À la veille de la désignation du futur leader du Parti conservateur par ses 160.000 adhérents, qui deviendra aussitôt premier ministre à la place de Theresa May, les deux candidats se sont affrontés pour leur premier débat télévisé, sur la chaîne privée ITV. Selon un sondage YouGov de la semaine dernière, Boris Johnson est privilégié par 74 % des militants tory, contre 26 % à Jeremy Hunt. Ce dernier a eu beau jeu de rappeler qu’il était le favori du grand public, ce n’est pas le grand public qui choisit.

Si Boris Johnson devient le leader des Tories et le Premier ministre britannique, les chances d’un Brexit sans accord s’en trouveront accrues. Et, en cas de sortie sans accord, le Royaume-Uni n’aura plus d’accès privilégié au marché unique (assurant la libre circulation des personnes, biens, services et capitaux). Et il ne sera plus membre de l’union douanière, perdant ainsi l’avantage d’une absence de droits de douanes dans ses échanges avec les 27, ainsi que le bénéfice des accords commerciaux négociés par l’UE avec d’autres pays. Dès le lendemain du 29 mars 2019, son commerce se trouvera régi par les règles de l’OMC. À la clef, une hausse des droits de douane et, plus grave encore, l’instauration de nombreuses barrières non-tarifaires. Ces barrières (rétablissement de contrôles douaniers stricts, fin du passeport financier, perte de reconnaissance de qualifications professionnelles, mise en place de certifications nouvelles…) auraient, selon la société de Bourse, un effet deux à quatre fois plus important que le seul choc tarifaire (hausse de 3 à 5% des droits de douane).

En cas de no-deal, de larges pans de l’économie britannique pourraient ainsi connaître une congestion, avec des risques de pénurie et des chaînes de production totalement perturbées. « Au total se combineraient une chute de l’activité, une envolée du chômage, une poussée d’inflation, sur fond de perturbations financières ». Le choc d’un no-deal ferait basculer le Royaume-Uni dans une très sévère récession. Les différents modèles des grands organismes (FMI, Banque d’Angleterre, etc.) chiffrent à environ 5 points la perte de PIB à moyen-long terme. Le choc serait ainsi presque aussi grave que la crise financière de 2008, qui avait provoqué un recul de 6,2% du PIB britannique.

Au niveau des entreprises, un Brexit dur reviendrait à amputer d’environ 30% la croissance des bénéfices par action outre-Manche, et de 5 à 7% en zone euro – Oddo BHF posant l’hypothèse (simplificatrice) que l’intégralité du choc se produit sur la première année. La chute des indices boursiers serait ainsi de l’ordre de 6% en zone euro. Celle du Footsie est évaluée entre 5 et 10%, après prise en compte de la baisse de la livre sterling, qui favoriserait les grandes valeurs exportatrices britanniques. Plus précisément, en tenant compte du degré d’imbrication à l’économie britannique, les plus affectés seraient les indices britanniques, irlandais, le Stoxx 50 Europe, le Stoxx 600, puis les indices nord-européens (AEX hollandais, KFX danois et OMX suédois).

Il faudrait aussi s’attendre à une correction massive de la livre sterling (de l’ordre de 20 à 25%). Dans son scénario le plus noir, la Banque d’Angleterre prévoit un effondrement de la livre sterling de 25%. Face au risque de crise financière, la BoE a demandé aux banques d’augmenter leurs fonds facilement mobilisables, dont le montant dépasse désormais les 1.000 milliards de livres au total.


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