Grève à la RATP très suivie ce 13 septembre

mardi 17 septembre 2019.
 

La mobilisation à la RATP fait une pause après une première réussie, selon les syndicats, ce vendredi 13. Tous veulent continuer la lutte dans les prochaines semaines mais divergent sur la marche à suivre.

« Et maintenant, grève illimitée en décembre ! » Sous les hourras d’une foule de plusieurs dizaines de syndicalistes massés dans le hall de la Maison de la RATP, gare de Lyon à Paris (12e), des conducteurs de métros de SUD et de l’Unsa lancent un pavé dans la mare. Pour eux, cette journée de mobilisation est couronnée de succès, et ils voient déjà plus loin pour faire plier le gouvernement sur son projet de réforme des retraites.

Avec des taux de grévistes de près de 100 % dans certaines directions, comme chez les conducteurs du RER B, et même de plus de 60 % chez les cadres, l’ampleur de la mobilisation, jamais vue depuis douze ans, a donné de l’espoir aux syndicats. Devant le siège de l’entreprise, des militants syndicaux de toutes les organisations, dans une ambiance bon enfant sous les yeux de dizaines de CRS, répètent à l’envi les raisons de leur colère : toucher à la retraite, « c’est inacceptable ». « Quand je suis rentré à la RATP il y a 30 ans, on nous promettait une retraite, et, juste avant de l’avoir, on veut nous l’enlever », fulmine Pascal, 53 ans, employé aux ressources humaines et syndiqué CGT.

« C’est du vol qualifié, s’emporte Patrice, 50 ans dont 28 à la RATP. Cette retraite, c’est notre épargne. » Les agents sous statut RATP, peuvent, selon leur métier, partir entre 50 et 60 ans à la retraite. Un conducteur de bus part en général à 56 ans, un conducteur de métro ou de RER un peu plus tôt, vers 52 ans, avec une retraite calculée sur les six derniers mois de salaire. Le nouveau système par points envisagé par le gouvernement pourrait faire baisser les pensions « de 20 à 30 % », redoutent les syndicats.

D’où la mobilisation très forte enregistrée ce vendredi. Même chez les cadres, « chez qui il y avait une pression pour ne pas cesser le travail », affirme Frédéric Ruiz, de la CFE-CGC.

Les trois syndicats principaux de la RATP ont ensuite été reçus par la direction, qui n’a fait « aucune proposition », déplorent l’Unsa, la CGT et la CFE-CGC. Ils insistent pour qu’elle remonte auprès du gouvernement leurs revendications : « Véritables négociations, maintien des compensations et garanties concrètes rapidement. » Le secrétaire d’Etat aux Transports, Jean-Baptiste Djebbari, est venu à leur rencontre promettre de « travailler les modalités de la convergence vers un système de retraites universel, juste et solidaire ».

Mais les syndicats n’y croient pas. « Ce n’est pas plus juste, ce n’est pas pérenne, le régime général sera réduit à peau de chagrin », estime Frédéric Ruiz. Reste à savoir comment ils vont continuer à mettre la pression.

Journée d’action de la CGT le 24 septembre

Par Jean-Gabriel Bontinck

Les syndicats des agents de la RATP appellent à une journée de grève le vendredi 13 septembre 2019

Ils dénoncent le projet du gouvernement de réformer les régimes de retraite.

Grève RATP : trafic "extrêmement perturbé" vendredi, dix lignes de métro fermées

https://www.europe1.fr/societe/grev...

Grève à la RATP : « Si on n’est pas entendus là, on partira en grève illimitée »

Rencontre avec Yassine, chauffeur de bus à la Ratp dans le 92, depuis 10 ans qui nous explique pourquoi il sera en grève ce Vendredi avec ses collègues. Une interview qui montre le niveau de conscience des agents RATP à travers le discours de ce jeune trentenaire non syndiqué.

Ce Vendredi 13 Septembre, les agents de la RATP seront mobilisés massivement contre les attaques du gouvernement Macron, notamment sur le sujet de la future réforme des retraites. La RATP a déjà annoncé la fermeture de nombreuses lignes de Metro et de Bus, ainsi qu’une circulation quasi nulle sur le RER coté RATP.

Révolution Permanente : « Bonjour Yassine, peux-tu te présenter rapidement ? »

Yassine : Alors je me prénomme Yassine, j’ai 31 ans, je suis rentré à la RATP il y a bientôt dix ans, en tant que machiniste-receveur, c’est le terme exact de ce qu’on appelle plus communément « chauffeur de bus ». Je roule principalement en banlieue, mais également sur Paris. Je suis simple agent, je n’ai jamais été syndiqué.

RP : Peux-tu nous expliquer pourquoi vous vous mobilisez ce vendredi 13 septembre à la RATP ?

Yassine : Il y’a une grande mobilisation de la part des agents RATP, pour dénoncer les attaques du gouvernement, notamment sur les retraites. L’impact sur les retraites des agents sera tellement fort, si nous ne faisons rien, qu’une absence de mobilisation aurait été incompréhensible.

RP : Pourquoi c’est important pour toi d’être en grève ce vendredi ?

Yassine : Cette réforme me touche beaucoup, car je me souviens qu’à mon entretien d’embauche, le recruteur avait mis la question des retraites en avant, pour compenser les difficultés du métier, la pénibilité des horaires ou encore les salaires plutôt bas malgré le travail en décalé.

J’avais 21ans à cette époque je ne me posais pas la question du calcul de la retraite. Mais j’ai compris au fil du temps que les sacrifices de mes week-ends en famille, les horaires décalés, les repos fixes, les fériés, n’étaient pas sans contrepartie et que la retraite du régime de la RATP, viendrait comme une « récompense » de ces sacrifices pendant 40 ans.

Mais les années passent et on s’aperçoit que les sacrifices annoncés à l’embauche ont largement augmenté années après années. De plus en plus de lignées sont obligés maintenant de circuler la nuit, de circuler les dimanches. Je me retrouve à sacrifier par exemple plus de week-ends et d’heures de nuit qu’au début. Pour vous donner un exemple très concret, lorsque j’ai démarré ma ligne ne circulait pas la nuit et les dimanches, aujourd’hui c’est devenu la norme.

Donc oui c’est plus que primordial pour moi de me mobiliser ce Vendredi, car trop c’est trop, on dégrade nos conditions de travail, notre santé et au final on nous explique avec cette réforme des retraites, que ces sacrifices ne valent rien à leurs yeux.

RP : La RATP annonce déjà une mobilisation importante. Quelle est l’ambiance dans ton secteur ?

Yassine : Dans mon secteur on va se mobiliser massivement, je suis agréablement surpris. Depuis que je suis à la RATP, je n’avais jamais vu un semblant de mobilisation, en toute honnêteté. Encore aujourd’hui je voyais au boulot des collègues sur leurs téléphones à appeler le centre pour se déclarer gréviste. Certains qui n’avaient jamais fait grève avant, sollicite les plus anciens pour savoir comment il fallait procéder. On sent réellement une atmosphère différente ici, il y’a quelque chose qui a changé dans la prise de conscience des agents.

RP : Comment a tu vu la dernière grève des cheminots en 2018 ? Est-ce que cela a eu un impact dans les têtes chez vous pour cette grève ?

Yassine : Personnellement je suis fils de cheminot, mon père est à la retraite aujourd’hui, mais comme beaucoup d’enfants de cheminot, j’ai travaillé quelques étés à la SNCF avant d’entrer à la RATP à la fin de mes études. J’étais bien placé pour savoir que les agents SNCF ne sont pas des « privilégiés », comme le disaient certains journalistes et autres politiciens. Mon père était à la maintenance, je le voyais partir d’astreinte en pleine nuit pour des incidents, parfois on ne le voyait pas en allant à l’école ou en rentrant. On ne se rend pas compte des sacrifices que font les cheminots, comme les agents de la RATP sur leur vie personnelle ou encore leur santé. J’avais soutenu les cheminots à mon niveau en faisant un don à la caisse de grève sur internet, j’essayé dans discuter un peu avec les collègues, sans être syndiqué, mais en expliquant déjà à l’époque, qu’après la SNCF, ils s’attaqueront à nous.

J’ai regretté sincèrement que rien n’ait été mis en place, pour converger avec les cheminots, avec une vraie stratégie, pas celle que les cheminots appelé grève perlée, j’ai jamais compris comment ils ont pu accepter de faire grève de cette manière, mais on ne refait pas l’histoire.

RP : Dans les dernières grandes luttes la RATP n’a pas été très présente, pourquoi aujourd’hui cela change ?

Yassine : Vous avez raison, en effet depuis que j’y suis je n’avais vu aucune mobilisation massive, a part des collègues par moment de manière isolée sur la loi El Khomri. C’est la première fois que tous les syndicats donnent ensemble une seule et même date. Je pense que ça joue énormément dans la mobilisation pour ce Vendredi 13 Septembre. Je pense aussi que cette attaque du gouvernement, est à mes yeux la plus forte depuis que je suis rentré. Je pense que tout cela combiné explique en grande partie pourquoi ce changement. J’ai aussi suivi le mouvement des gilets jaunes et je pense que ça joue aussi dans l’envie de se battre collectivement. Nous avions eu une prime aussi à la RATP grâce aux gilets jaunes. On a tous vu que c’est uniquement en se mobilisant qu’on arrive à les faire reculer, comme les gilets jaunes par exemple sur la taxe carbone.

RP : Nous parlions de la SNCF, mais quand on parle SNCF et RATP, on pense automatiquement à 1995. Est-ce que chez vous on parle de convergence et d’amplifier le mouvement ?

Yassine : Je n’ai pas connu cette époque mais il y a encore certains anciens qui nous en parlent. Mais l’idée qui ressort dans la bouche de la plupart, c’est qu’après le 13 Septembre, si rien ne bouge, on partira en grève illimité. J’espère que si c’est le cas, on sera massivement mobilisé, et qu’à la SNCF, mais aussi ailleurs dans le secteur privé, la santé, les professeurs ou la fonction publique, on sera tous ensemble. Ce n’est pas la retraite des agents RATP qui se joue, c’est la retraite de tout le monde sans distinction, il va falloir être tous ensemble alors pour faire bloc.

RP : Tu nous parlais des gilets jaunes, a tu suivi le mouvement ou encore les derniers du côté de la santé ou des professeurs pour le Bac ?

Yassine : J’ai envie de dire : « Qui n’a pas suivi le mouvement des gilets jaunes » ? Quand j’ai vu le mouvement arriver, j’ai toute suite soutenu les gilets jaunes. Leurs revendications sont justes, ils ont raison de se mobiliser.

Je soutiens aussi ces grèves, car je vois bien que leurs conditions de travail se dégradent. Dans ma ligne de bus, je traverse plusieurs communes et je ne compte pas le nombre de fois où je vois des banderoles à l’entrée des écoles, avec écrit dessus « Non à la fermeture de classe ! ». Nous sommes de plus en plus nombreux et ce n’est pas en supprimant des classes qu’on améliorera la scolarité des générations futures.

RP : Pour finir, tu parlais de stratégie défaillante à la SNCF, pour toi que faut-il faire contre Macron ?

Yassine : D’après moi l’apparition du service minimum, qui nous oblige par exemple à se déclarer 48h avant, comme à la SNCF, sont des vraies entraves au droit de grève. Il y a également le fait que les directions durcissent le fait de ne plus accepter d’échelonner les prélèvements de grève. Quand j’avais suivi la grève des cheminots, je me rappelle que la SNCF avait même retiré les repos, ça montre qu’ils cherchent tous les moyens pour casser les grèves dès le départ. Ces éléments profitent aux gouvernements, car ils rendent la lutte plus difficile.

Je pense que les organisations syndicales, n’ont pas pris conscience de ces changements. Les directions syndicales sont déconnectées de plus en plus de ce qu’il faut faire. Avant on pouvait se contenter d’afficher un tract d’appel à la grève, cela faisait effet boule de neige. Aujourd’hui avec le service minimum, la direction n’est plus surprise elle sait se réorganiser, si avant tu bloquais avec une faible mobilisation, aujourd’hui il te faut obligatoirement être massivement en grève pour leur faire mal. Mais au-delà de la RATP, je pense que face à Macron comme je l’ai dit avant, il faudra une vraie mobilisation interprofessionnelle massive, ça ne peut pas marcher si tout le monde est divisé, il faut être ensemble dans la lutte.


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