La direction de la CFDT rejoint le bloc bourgeois !

samedi 25 janvier 2020.
 

Ce qui devait arriver arriva ! Sans surprise pour beaucoup ! Ce ne fut pas le 10 janvier mais le samedi 11 après "l’abandon de l’âge pivot" , abandon à comprendre comme une fake news

Ou le syndicalisme de fin 2019 début 2020 était vu nettement comme de masse et de classe, et nullement "du stylo" et "modéré". Globalement il y a désormais risque d’un retour à "Hégémonie du capital et droitisation idéologique" (avec plus de répression ) alors que se construisait une "contre-hégémonie par un processus de démocratisation par en-bas", ie par les luttes des classes populaires et sous mobilisation des syndicats.

http://amitie-entre-les-peuples.org...

I - CFDT et bloc bourgeois

La direction de la CFDT rejoint le bloc bourgeois ! A dire vrai, sa direction ne l’a jamais quitté . Mais sa tâche foncièrement hypocrite est de donner le change.

* Deux mots sur syndicats et bloc social : La position des syndicats est décisive dans la formation d’un bloc social. Plus le syndicat est perçu spontanément et massivement par les salariés mais aussi par les experts (historiens du mouvement ouvrier) comme "modéré" ou "recentré" (Pierre Cours-Salies) et plus il participe au bloc élitaire, au bloc d’en-haut, au bloc bourgeois autour du 1%, classe dominante bicéphale. On dit qu’il s’agit d’un syndicalisme d’accompagnement social du néolibéralisme. C’est dans la pratique des 35 dernières années que l’on lit cette définition pas nécessairement dans les documents d’orientation.

* Partage des tâches, un jeu de rôle. Le gouvernement de droite ou de "fausse gauche" (PS) met en place les mesures économiques néolibérales sources de mécontentements au sein du peuple-classe et le syndicalisme d’accompagnement social se charge d’insérer des amendements au projet de la classe dominante pour que le bloc fasse bloc mieux soudé . L’idéologie de soumission aux intérêts de la haute finance est in fine décisive mais l’apparence de la lutte à son importance. Le jeu de rôle est un jeu de société qui a son importance pour cimenter idéologiquement un bloc des riches et moins riches. Relire aussi le Grand Hornu de George Labica sur le rôle de l’idéologie comme ciment.

II - La CFDT de la mi-janvier 2020 est dans son rôle.

La CFDT, à Paris ou en province, n’était guère restée dans un syndicalisme d’opposition à Macron et ce pour le simple fait qu’elle était favorable à une retraite universelle à points, mais un dispositif différent de celui de Macron-Philippe. Le problème c’est que ce n’est pas la CFDT qui va imposer sa version, soit disant « bonne » . Elle ne pourra qu’avaliser la version de Macron-Philippe moyennant ce qu’elle nomme à chaque fois une « conquête » et qui correspond en fait à ce que le gouvernement veut bien céder à la rue, aux grévistes et aux autres syndicats qui eux ne cèdent pas si aisément ou jamais.

La CFDT - sa base comme sa direction - doit persuader le monde du travail salarié, hommes et femmes, de toute origine, nationaux ou résidents, qu’elle agit pour la défense des intérêts matériels et moraux de ce monde, soit plus de 80% du pays. Ils et elles font globalement ce qu’ils peuvent en ce sens, mais dans le cadre d’une orientation générale qui place la négociation au coeur du dispositif. On peut écrire des pages et des pages d’orientation, c’est la négociation qui est la marque, la pierre de touche.

Mais , la CFDT n’est pas le seul syndicat à négocier . C’est évident. Pour autant la négociation n’est pas l’entièreté du paysage syndical. Les autres syndicats de FO à la CGT en passant par Solidaires ou FSU s’emploient eux aussi, effectivement, à négocier. Mais la négociation n’est pas pour eux l’essentiel de l’orientation et de la pratique syndical. Ils mobilisent pour refuser les projets du MEDEF et du gouvernement, main droite de l’Etat.

Pour le reste il faut distinguer la direction et la base mais aussi les différents secteurs.

La CFDT - sa direction surtout - montre depuis longtemps, bien qu’elle ait pu avoir jadis, il y a longtemps maintenant, « un passé porteur d’avenir » (Pierre Cours-Salies) un profil de « syndicaliste du stylo », profil qui se dédouble d’une part de « syndicat prêt à signer » et d’autre part de « syndicat refusant les grèves et les manifestations » .

Pour sa base, les choses sont plus compliquées et fonction des exigences des travailleurs et travailleuses ainsi que des rapports de force du moment tant du côté direction d’entreprise que du côté des autres syndicats. Elles pratiquent, soit un syndicalisme de lutte différent de la direction, soit un « syndicalisme du stylo » bien dans la ligne confédérale, soit un va-et-vient entre ces deux positions.

La CFDT va donner des alibis aux "chiens de garde" du système capitaliste qui vont aboyer désormais contre les autres syndicats . En allant plus loin il y a risque de répression pour les uns (celles et ceux qui continuent la lutte) et avantages indus pour les autres.

III - Le 1% a besoin pour former un bloc social d’une hypocrisie systèmique

Cela passe par un décalage voir une contradiction entre le discours et les pratiques. Je reprends ci-dessous des propos écrit il y a plus de 30ans, en 1986, par Patrick TORT dans « Etre marxiste aujourd’hui » :

"Il devrait être depuis longtemps admis au titre d’une vérité première que dans une démocratie libérale, une politique de droite - quelle qu’elle soit - ne peut se passer d’un discours de gauche, suivant un précepte tacite et très politique, justement, qui enseigne que la dynamique des démocraties à structure inégalitaire soucieuses de persévérer dans leur être est, précisément, la promesse d’égalité. Tel est le piège, infiniment retissé de la République bourgeoise, par exemple.

L’opposition entre discours de gauche et politique de droite a donc toute les chances de n’être qu’une formule à courte vue si l’on convient du fait que l’on doit plus sérieusement reconnaitre à sa place la réalité d’une combinaison fonctionnelle, d’un principe opératoire d’association.

Que signifie cette opposition dans le langage de ceux qui l’articulent ? Elle signifie, une fois débarassée de l’aspect « populaire » qui la rapporte à l’opposition simple entre les paroles et les actes (constat d’un désaccord entre eux, d’où accusation d’hypocrisie politique), que la tonalité égalitariste des discours et des déclarations d’intentions politiques entre en contradiction avec un mode de production, une économie et une société gérés d’une manière inégalitaire, et requérant simultanément un effort continué de séduction du patronat et de la classe capitaliste. En d’autres termes, il s’agit de faire percevoir une antinomie entre un discours politique « marqué à gauche », discours à forte polarité éthique, et d’autre part une pratique politique dictée en fait par des options économiques libérales entrainant d’inévitables convergences avec les attitudes objectivement droitières (soumission prioritaire aux « exigences » du marché). Or si l’on se montre conséquent avec le principe suivant lequel une démocratie libérale repose sur la combinaison très concertée de pratiques économiques et politiques inégalitaires, et d’un discours politique prometteur d’égalité, l’opposition s’efface sous la complémentarité et l’on ne peut plus prétendre fonder sur elle une critique spécifique et sérieuse du réformisme. L’accusation d’hypocrisie est elle-même hypocrite, car elle feint de ne pas voir que c’est à la démocratie libérale toute entière qu’elle s’adresse, et non spécifiquement à la « social-démocratie » réformiste. Il est clair que la ruse de toute politique libérale consiste à persuader ceux qui doivent l’être que l’économie travaille tendanciellement à l’égalitarisation de la société. Nul ne pourrait en, en démocratie défendre le libéralisme s’il n’affirmait qu’il porte en lui la source d’une redistribution sans cesse plus égalitaire. Dans une démocratie libérale, le grand mensonge politique est précisément la promesse d’une société plus juste comme conséquence de l’expansion.

L’analyse correcte eût été de dire qu’il y a en effet, chez les socialistes, « cohabitation » normale d’un discours politique « de gauche » et pratique politique de droite, comme il se doit dans la gestion politique d’une démocratie libérale, qu’elle soit gouvernée par la droite ou par la gauche réformiste. in - « Etre marxiste aujourd’hui » p126

Le passage était déjà cité ici : Démocratie libérale et hypocrisie : une combinaison nécessaire - Christian Delarue - Attac 35 Ille et Vilaine https://local.attac.org/35/dossiers...

IV - Vivre debout pour une société libérée le plus possible de l’emprise du capital !

Les autres syndicats - sauf UNSA probablement - vont nécessairement continuer la lutte pour une société qui tienne compte des intérêts de toutes les classes sociales sauf ceux du 1% qui tend lui à faire scission, à s’isoler de la société par sa richesse financière et patrimoniale élevée (parenthèse altermondialiste).

Faire société, ce n’est pas que se préoccuper uniquement et hypocritement des classes moyennes qui pourraient se présenter comme "gagnantes" ou des "inclus" - terminologie changeante mais qui visent toutes à soumettre les individus qui n’ont rien à gagner collectivement aux politiques "classistes" de destructruction de l’Etat social mais qui peuvent parfois, plus que d’autres, "s’accommoder" - à des fins carriéristes (lutte des places) - du "travaillisme" (soit le "faire travailler plus ceux et celles qui travaillent déjà"). Or ces politiques classistes, néolibérales, réactionnaires, régressives, participent, avec le discours tenu, de la formation du "bloc dominant" et dont les partis politique de droite et de la "fausse gauche" (PS) sont les relais avec le MEDEF.

Il est évident qu’il faut continuer. L’abandon de l’âge pivot est une fake news.

Le 14 janvier 2020 en grève avec manifestation. Et même, toute la semaine aux dernières nouvelles !

Christian Delarue

syndicaliste et altermondialiste rennais

NEOLIBERALISME : UN BLOC SOCIAL des gagnants et des forts | Le Club de Mediapart

https://blogs.mediapart.fr/christia...


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