Tous aux abris : Valls revient !

jeudi 25 mars 2021.
 

On s’était pourtant habitué à son absence. Et à ses passages à Paris selon les circonstances. Tel Jack Lang ne réapparaissant que lorsqu’une célébrité meurt, Manuel Valls n’écumait les plateaux qu’après une polémique – si possible en lien avec l’islam. Mais voilà, il revient.

On s’était pourtant habitué à son absence. Et à ses passages à Paris selon les circonstances. Tel Jack Lang ne réapparaissant que lorsqu’une célébrité meurt, Manuel Valls n’écumait les plateaux qu’après une polémique – si possible en lien avec l’islam. Mais voilà, il revient.

« J’ai ressenti physiquement une forme de mort, de déchéance physique, donc j’ai essayé de me rebeller face à cela. Je ne voulais pas crever », lance l’ex-Premier ministre ce lundi 22 mars au micro de France Inter. Ce n’est pas la première fois qu’il utilise ce genre de vocabulaire pour parler de l’après-Matignon. Valls est accro à la politique – et pas au sens littéral, ce qu’il aime, lui, c’est l’action, la baston.

Valls s’est vu mourir politiquement en 2017. Il faut dire qu’il y a de quoi : perdre face à Benoît Hamon, c’est la lose. Et Valls n’est pas un loser ! Comment aurait-il pu alors soutenir un autre loser. C’est bien une attitude de loser que de soutenir un loser…

Bref, tout le monde connaît la suite. Manuel Valls, comme François de Rugy, choisit Macron et brise sa promesse de fidélité faite auprès des électeurs socialistes. Il se pare alors du costume de l’homme d’État qui, persuadé de la défaite à venir du candidat socialiste, de la fatalité d’un duel Fillon-Le Pen, a fait le choix de la raison. Foutaise ! Comment Hamon aurait-il pu gagner en naviguant à bord d’un vaisseau crevé tout en recevant les coups de poignard dans le dos de ses « camarades » ?

« Je n’ai pas pris conscience du fait, qu’ayant rompu la promesse de ne pas soutenir un autre candidat que celui qui emportait la primaire, cela allait faire de moi le traître », ose-t-il ce lundi. Churchill disait : « Il y a ceux qui changent de parti pour rester fidèles à leurs idées et ceux qui changent d’idées pour rester fidèles à leur parti. » Valls est la troisième voie. Il n’est fidèle à rien. Pas à un parti, pas à une idée, pas même à sa parole. A-t-il seulement eu un jour une conviction politique autre que sa propre ambition ?

Car ne faisons pas comme si, depuis 2017, Valls avait trahi Hamon et basta ! Que lisait-on sur son affiche de campagne législative – où il fut candidat « majorité présidentielle », macroniste donc – ? « Toujours avec vous ». Tu parles d’un slogan ! À peine un an plus tard, il quittait ses électeurs sans préavis. Direction Barcelone, où personne ne le connaît et donc ne le juge a priori… Et il promet : « Quoi qu’il arrive, je resterai ici ». Un républicain laïc comme lui, qui de mieux pour défendre la monarchie catholique ? Il s’y plongera corps et âme.

Sauf que l’expérience catalane n’aura pas été à la hauteur de ses ambitions. Valls, maire de Barcelone ? Une mauvaise blague. En juin 2019, il trouvera un petit rôle, à sa hauteur : faiseur de reine. Faisons court : la gauche indépendantiste était arrivée en tête, juste devant la maire sortante Ada Colau. Cette dernière pouvait être réélue, mais elle avait besoin de quelques voix. Valls a fait du Valls : une pyramide des haines et on mise sur celui qu’on hait le moins, la gauche radicale en l’occurrence. Et il est content de lui : « C’est devenu une expression : faire un Valls ». Voilà tout l’héritage de Manuel Valls à Barcelone. Ah non ! On en oublierait presque ses manifestations avec l’extrême droite – la pure et dure, celle qui fait des saluts fascistes dans les rues. C’est qu’il n’est pas à une contradiction près le bougre.

Le problème, finalement, c’est qu’il n’a pas trouvé de roi disposé à lui tendre une main. Valls débarque en Espagne au moment où la crise catalane est à son comble et où Ciudadanos – le LREM espagnol – radicalise son discours à droite toute. Comme un poisson dans l’eau. Mais la mayonnaise n’a pas pris. Même ses nouveaux amis ont fini par le lâcher. Et tout ceci n’a fait que donner des ailes à l’extrême droite. Et il s’en ai fallu de peu pour que la collation des gauches ne fonctionne pas. Quelle place pour un Valls ici ? Aucune. Retour au bercail !

« Le Tribunal des comptes espagnol a relevé un dépassement des dépenses autorisées de plus de 70% et près de 190.000 euros non déclarés, lors de la campagne pour les municipales à Barcelone, en 2019 », lit-on sur Libération. Tel le bon roi d’Espagne rattrapé par le fisc, le bouffon fuit le royaume. Valls 2022… lol

Il ne faut jamais oublier que le vallsisme, en tant que stratégie politique, est farouchement anti-démocratique. Manuel Valls ne gagne pas d’élection, on lui offre des postes. Et Évry alors ? Ce haut-lieu de la magouille politique ne saurait être cité en exemple d’un quelconque processus démocratique, soyons sérieux !

Posez-vous la question : de quel droit Manuel Valls a-t-il été ministre de l’Intérieur puis Premier ministre sous Hollande ? Quelle légitimité vous confère une primaire du PS, celle de 2011, où vous faites 5,63% des voix et arrivez dernier des socialistes ? Le peuple de gauche rejette Valls depuis toujours. Mais pas le PS. Le parti lui offre des circonscriptions, des postes ministériels. Pourquoi ?   En France, pour être invité dans les médias quand on n’a aucune prise sur l’actualité, il faut sortir un livre. Celui de Manuel Valls s’appelle : Pas une goutte de sang français. Et devinez de quoi il est question… De lutte contre l’islamisme. C’est son unique créneau depuis qu’il a abandonné la lutte pro-palestinienne il y a fort longtemps maintenant.

Valls revient pour nous vendre sa seule came : le vallsisme. Il faut dire qu’Emmanuel Macron n’est pas le meilleur pour ça, il a besoin de la droite pour le faire ! Ce n’est pas Valls qui aurait besoin de se coltiner Blanquer et Darmanin, de radicaliser de façon caricaturale Vidal et Schiappa, pour arriver à ses fins. N’en doutez pas, si Darmanin trouve Marine Le Pen trop « molle », Valls trouvera Darmanin trop mou !

Au fond, sa seule force à Valls, c’est d’être de droite, à gauche. Et il ne se trompe pas : « Je trouve intéressante la démarche d’Anne Hidalgo [...] De même, je trouve la démarche de Xavier Bertrand intéressante », avance-t-il. Tu m’étonnes, la maire de Paris, depuis qu’elle est en non-campagne pour 2022, joue sur les terres du vallsisme. Et le président LR des Hauts-de-France ne jure que par le barrage à l’extrême droite tout en lui piquant ses idées les plus fielleuses.

Là encore : pourquoi ?

Quel est l’intérêt pour un politique de gauche, si tant est qu’il le soit, de jouer cette carte-là ? Quel électorat pensent-ils séduire en misant sur les « gauches irréconciliables », sur le clivage permanent, sur le ressentiment de son propre camp ? Certes, depuis 2017, Macron a grandement droitisé son espace. Il faut dire qu’il n’a plus franchement besoin des voix de gauche, pas bête la guêpe ! Mais de là à s’imaginer qu’il y aurait un électorat social-macroniste en errance et que la meilleure manière de le récupérer, c’est le vallsisme, il faut marcher sur la tête pour y croire !

Visiblement, lui y croit. Personne ne veut de lui si ce n’est quelques illuminés de la République du printemps, mais ça n’a plus aucune importance. Valls s’offre à nous. Et voilà donc son projet : « Je n’aime pas la France de Zemmour et d’Assa Traoré ». Quelle honte de mettre sur le même plan un prêcheur de haine condamné à de multiples reprises et la sœur d’un homme dont les circonstances de la mort restent imprécises aux yeux de la justice française et qui ne demande qu’un peu de lumière sur cette affaire. Mais faut-il s’en étonner, venant d’un individu qui était Premier ministre lorsqu’Adama Traoré est mort et qui n’a daigné lever le petit doigt. Assa Traoré demande justice et ne l’obtient pas, Éric Zemmour la rejette et s’en moque. Manuel Valls se nourrit de tout cela.

Maintenant, il est plus Français que Français – « Moi j’aime les débats sur "faut-il commémorer Napoléon ou la Commune" ! Tout ça c’est la France. » –, plus républicain que la République elle-même – « S’il y a quelque chose qui mérite un combat, un engagement, c’est l’universalisme, la République et la laïcité, parce que c’est la démocratie. Dans les années qui me restent dans la vie politique, s’il y a un combat, c’est la démocratie. » Libre à chacun d’accorder du crédit à ces propos.

Loïc Le Clerc


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message