Sandrine Rousseau sur les législatives : « Il faut aller vers une coalition »

jeudi 28 avril 2022.
 

INTERVIEW - L’écologiste Sandrine Rousseau revient sur l’échec de Yannick Jadot à la présidentielle et se projette vers les législatives de juin. Candidate dans la 9e circonscription de Paris, elle plaide pour « une coalition » de gauche menée par Jean-Luc Mélenchon, autour d’un « programme de gouvernement ».

Les écologistes ont fini à moins de 5 %. Comment expliquer ce mauvais score ?

Cet échec n’est pas la responsabilité d’une personne, il est collectif. Nous nous sommes laissé bercer par une forme de conformisme. On attend des écologistes qu’ils soient antisystème, ou du moins qu’ils s’y confrontent pour le changer ! Ce n’est pas l’orientation qui a été celle de la campagne. Il fallait rassurer sur notre capacité à être au pouvoir. Yannick Jadot était le bon candidat pour cela. Mais il fallait aussi rassurer sur notre capacité à résister. C’est là qu’il a manqué des gages.

Yannick Jadot a-t-il trop joué au bon élève ?

Il a remporté la primaire là-dessus, particulièrement face à moi ! Quand il a gagné la primaire, il y a eu un ouf de soulagement dans le parti et ailleurs. Il faut l’entendre. L’enseignement principal de ce premier tour est aussi que l’électorat de gauche et écologiste voulait le rassemblement. C’est cette marche-là qui a été ratée. Je ne comprends toujours pas pourquoi nous avons dépensé tant d’énergie à critiquer Christiane Taubira et Jean-Luc Mélenchon .

Vous le regrettez ?

Évidemment. Dans la tête des électeurs de gauche, aucun candidat n’est parfait. Mais ils voulaient un programme ambitieux et un collectif qui montrait la force de nos idées rassemblées. Alors que Jean-Luc Mélenchon s’envolait dans les sondages et faisait naître un espoir à gauche, je n’ai pas compris qu’on passe notre temps à lui taper dessus. Ce n’est pas ça, la gauche, ce n’est pas ça, faire de la politique autrement. Le résultat est un gâchis collectif : Jean-Luc Mélenchon n’arrive pas au second tour et, nous, nous n’atteignons pas les 5 %. C’est du perdant-perdant !

Faites-vous partie de ces écologistes qui ont hésité jusqu’au bout, tiraillés par le vote utile ?

Dans cette campagne, ma position n’était pas simple. Rester quoi qu’il se passe – car je m’y étais engagée – n’a pas été facile, mais il le fallait. Mon engagement est allé jusqu’au bout.

Jean-Luc Mélenchon Premier ministre, vous y croyez ? Vous le souhaitez ?

Il y a une telle colère dans le pays et une telle attente qu’il est très possible que les législatives soient le moment d’un retournement et le début d’une autre histoire.

Les discussions ont débuté à gauche en vue des législatives. La proposition des Insoumis – un accord programmatique, un label, un leader – est-elle acceptable ?

Ne ratons pas ce qu’on a loupé à la présidentielle. Construisons un collectif avec une diversité qui fera sa force. À cet égard, Jean-Luc Mélenchon a une responsabilité historique. Il faut aller vers une coalition avec un programme de gouvernement. La société civile, les militants, les activistes doivent être présents en masse pendant la campagne et qu’ils puissent entrer avec nous à l’Assemblée. Remplissons l’Assemblée, puis marchons vers Matignon.

Cette coalition doit-elle comprendre le Parti socialiste ?

Nous ne pouvons pas fermer la porte au PS, mais ils doivent clarifier leur positionnement.

Yannick Jadot devrait-il lui aussi dire qu’il faut cet accord avec les Insoumis ?

Il faut qu’il fasse un petit chemin pour se repositionner sur quelque chose de plus ouvert à la gauche.

Son score à la présidentielle n’acte-t-il pas la fin d’EELV dans sa forme actuelle ?

EELV est concurrencée sur l’écologie. C’est un fait et c’est tant mieux. Jean-Luc Mélenchon porte aussi un programme écologiste. Une candidature écologiste ne peut donc faire l’impasse sur les questions sociales, sociétales et démocratiques. Mais La France insoumise aborde peu la sobriété, le rôle des territoires locaux, le municipalisme libertaire. L’écologie politique reste une pensée novatrice.

S’il n’y a pas d’accord, pourriez-vous rejoindre l’Union populaire à titre personnel pour les législatives ?

Je ne fais pas le pari que mon parti se recroqueville, et je ne fais pas non plus le pari que La France insoumise fasse l’erreur de l’hégémonie comme par le passé. Il y a un enjeu historique. Toute erreur peut être fatale à une dynamique de gauche.

Vous appelez à un soulèvement social et écologiste, c’est-à-dire ?

Les législatives pourraient l’être. Mais il faut que la société civile nous aide, que les gens se lèvent, qu’on soit portés par la vague de fond d’une envie de changement. Il existe une aspiration à un changement profond, une demande d’écologie très forte, de bifurcation de notre modèle actuel, mais cela ne transparaît pas dans les débats politiques et médiatiques. Les étudiants qui occupent sont un grand espoir. Il faut les légitimer politiquement dans leurs combats.

Le congrès d’EELV est-il toujours un de vos objectifs ?

Je ne comprends pas qu’on me pose toujours cette question. C’est banal quand on appartient à un parti. Je veux construire jusqu’au bout, sur le moyen et le long terme. J’espère que ça marchera.


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