Demorand, Salamé, Roquette, Marine Le Pen... Ces grands bourgeois français qui regrettent la monarchie

mardi 27 septembre 2022.
 

Retour de l’alliance entre bourgeoisie et monarchie. Le glissement idéologique réactionnaire des super-riches français s’accélère. Alors que la mort d’Elisabeth II déclenche dans de nombreux États de son royaume l’espoir de la fin de la monarchie et le passage à une République, les grands bourgeois français, pourvus d’une faculté inouïe à percevoir le sens de l’histoire rêvent d’emprunter le chemin inverse.

Le 20 septembre 2022, sur France Inter, Marine Le Pen, cheffe du parti d’extrême droite et Guillaume Roquette, directeur du Figaro Magazine, clament leur amour pour la monarchie, sans oser réclamer ouvertement (pour le moment) son retour. Une voie déjà défrichée par Emmanuel Macron en 2015 et Eric Zemmour en 2021. Le bloc bourgeois réactionnaire poursuit ses assauts contre la République. Notre article.

La bourgeoisie française est invitée tous les matins à s’épancher longuement sur ses turpitudes du jour. Radio, télé ou journaux papiers, propriété privée ou service public, dans les médias, les riches sont comme les 4×4 dont ils raffolent, tout-terrain. Et comme ces bourgeois ont une grande conscience de leur classe et de ses intérêts, et que leur socialisation, coupée de la rencontre avec la différence et avec les échecs qui forgent le caractère, les a massivement privés de toute originalité, très souvent, ils racontent la même chose.

La première matinale radio de France nous en offre encore un bel exemple. Ce matin du 20 septembre 2022, au lendemain de l’enterrement d’Elisabeth II, c’est la nostalgie du bon vieux temps de la monarchie qui embue les yeux émus au grand bal des nantis qu’est le 7-9h30 de Nicolas Demorand (revenu estimé à au moins 120 000 € / an) et Léa Salamé (revenu estimé à 250 000 € / par an).

C’est le directeur du Figaro Magazine, le journal du prêt-à-penser pour bourgeois fainéant qui entame la danse : « Et je pense qu’il y a dans notre inconscient collectif une forme de nostalgie pour un régime, celui d’avant la Révolution, où l’unité nationale s’incarnait dans des vrais personnes, et pas seulement dans des « valeurs républicaines » qui sont abstraites pour beaucoup de monde. » Mais oui, bien sûr, que n’y avions-nous pas pensé, sots que nous sommes. Liberté, égalité, fraternité, c’est bien trop complexe pour le bon peuple.

Si ces valeurs peuvent sembler abstraites pour les citoyens, ce ne serait-ce pas, au contraire, parce qu’il reste encore trop de relents monarchiques ? Du Président sans contre-pouvoir jusqu’aux ultrariches qui se soustraient à la justice pénale et fiscale, tout comme au temps de La Fontaine, même après 200 ans d’abolition des privilèges ?

Guillaume Roquette achève son propos par une adresse directe au chef de l’État républicain : « peut-être qu’Emmanuel Macron pourrait un jour leur rendre hommage. En plus c’est facile, presque tous nos monarques sont enterrés au même endroit. Et pas besoin de carrosse ni de Rolls Royce pour y aller : la basilique Saint-Denis n’est qu’à onze stations de métro de l’Elysée. » On a hâte de voir Macron rendre hommage aux monarques de droit divin, cela complètera avantageusement sa panoplie anti-républicaine après ses hommages à Pétain et sa présence aux enterrements catholiques.

Après la journaliste, vient la représentante politique. Moins de 3 minutes d’antenne, et Marine Le Pen déblatère tout sourire sur un hypothétique reproche que se ferait le peuple français d’avoir guillotiné le Roi. Elle esquive quand on lui demande si elle est monarchiste avec un argument élégant : « ils sont quand même très peu (nombreux) ». En voilà un bon argument de fond pour rejeter un régime qui nie dans son fondement le plus profond l’égalité des êtres humains.

On sait maintenant ce qui retient Marine Le Pen de se proclamer en faveur de la monarchie : Non pas une opposition de valeur mais simplement la résistance d’un peuple français qui, à une écrasante majorité, n’en veut plus de cette royauté.

Marine Le Pen achève sa tirade monarchiste par un lien avec les habituelles rengaines de l’extrême-droite : la peur du changement, l’admiration pour n’importe quelle tradition, peut-être son contenu, tant qu’elle est suffisamment vétuste pour rappeler le temps béni qui précédait l’avènement de l’égalité des droits, de la redistribution des richesses, de l’élection au suffrage universel.

Tout au long du XIXème siècle, les grands bourgeois n’ont eu de cesse d’abattre la République sociale que la Grande Révolution avait chevillé au cœur du peuple français. Leur but n’était pas d’en finir avec la monarchie mais juste de remplacer les nobles, qui bénéficiaient des privilèges avant 1789. Ils ont donc imposé une monarchie constitutionnelle qui protégeait avant tout la propriété privée face aux revendications populaires du partage des richesses.

Les grands bourgeois n’ont jamais voulu partager le pouvoir avec le reste du peuple. Ce n’est que sous la pression des mouvements socialistes et républicains qu’ils ont accepté la République en 1871. Depuis, ils n’ont de cesse d’utiliser cette République à leur avantage. Seule la lutte acharnée des personnes exploitées, les femmes, les pauvres, les minorités a permis d’obtenir de cet État républicain des progrès sociaux et démocratiques.

Fondamentalement, les bourgeois libéraux, dont Marine Le Pen et Emmanuel Macron sont les derniers avatars en date, mais dont on retrouve les représentants à toutes les époques depuis le XVIIIème siècle, souvent aux premières loges du pouvoir, ne croit pas en l’égalité des êtres humains. Ils pensent que certaines personnes reçoivent à leur naissance de dons supérieurs à la moyenne qui justifient leur position sociale supérieure et donc leur droit à dominer les autres. De là, découle irrémédiablement leur penchant pour la monarchie


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