« Une école du peuple » : LFI se dote d’une école de formation militante

mardi 27 décembre 2022.
 

Bataille culturelle. Les insoumis ont lu Gramsci. La France insoumise (LFI) a annoncé ce samedi 10 décembre 2022 la création d’une école de formation. Un besoin exprimé depuis de nombreux mois par les militants. Cette « école des cadres » va être rattachée à l’institut La Boétie, le nouveau Think Tank insoumis.

Elle va former une première promotion de 70 heureux élus dès janvier 2023, à raison d’un weekend de cours obligatoires par mois. Razmig Keucheyan, Cédric Durand, Isabelle Garo, Mickaël Lowy… Certains noms de professeurs sont déjà connus. Et c’est du haut niveau.

Le matérialisme, l’humanisme global, la théorie de l’ère du peuple, la révolution citoyenne, l’anthropocène, le féminisme, l’antiracisme, l’histoire de la République, les histoires révolutionnaires, les lumières radicales, les analyses marxistes philosophiques, économiques, sociologiques, écologiques, les relations internationales, mais aussi les pratiques militantes, le programme de formation s’annonce passionnant. Entretien avec Antoine Salles Papou, responsable de l’École de formation, un enjeu décisif pour la suite de la lutte.

L’insoumission.fr est heureux de vous annoncer le lancement d’un partenariat avec l’école de l’Institut La Boétie : des entretiens vidéos de 30 à 45 minutes avec ses enseignants, afin de rendre leurs cours accessibles au plus grand nombre. La bataille culturelle continue. Entretien.

« Une école du peuple »

Antoine, l’école de formation, qu’est-ce que c’est ?

Antoine Salles Papou (ASP) : C’est une école militante qui est logée dans l’Institut La Boétie, une fondation créée par LFI qui a pour but de nourrir notre camp en armes intellectuelles, faire le lien avec le monde universitaire et donc faire de la formation pour les militants.

Quels sont ses objectifs ?

ASP : Elle répond à un besoin exprimé depuis de nombreux mois par les militants insoumis. Elle était au cœur des réflexions sur la réorganisation du mouvement pour gagner une majorité populaire et réellement transformer la société. C’est une école qui vise à apporter des éléments théoriques et pratiques aux insoumis pour convaincre, pour analyser la société, les mouvements politiques à partir de nos traditions théoriques.

Quelles sont les traditions théoriques insoumises justement ?

ASP : Le matérialisme, l’humanisme global et la théorie de l’ère du peuple. On pense que à tous les niveaux du militantisme il y a besoin d’avoir un cadre d’analyse théorique pour militer.

Est-ce que tu peux nous présenter la théorie de l’ère du peuple, ouvrage de Jean-Luc Mélenchon, concept central dans la pensée insoumise ?

ASP : La théorie du peuple c’est un cadre d’analyse de la société contemporaine qui centralise pour expliquer les plus récentes évolutions de l’histoire de l’humanité son explosion démographique. Elle part de ce constat pour poser comme fait central l’accélération de l’Histoire. Qui analyse les conflits qui opposent le peuple et l’oligarchie dans un monde marqué par l’anthropocène et le capitalisme financiarisé.

Ce monde là, celui de l’explosion démographique, de l’anthropocène et du capitalisme financiarisé, est un monde urbain dans lequel les conflits sociaux et politiques s’organisent autour des grands réseaux collectifs indispensables pour satisfaire les besoins de tout être humain.

C’est quand il y a rupture avec l’un de ces réseaux, qu’advient l’évènement fortuit déclencheur des révolutions citoyennes qu’on voit à travers la planète ?

ASP : Oui la théorie de l’ère du peuple permet d’analyser les différents types de révolutions qu’on voit dans les deux dernières décennies, qu’on appelle révolutions citoyennes, qui sont des révolutions urbaines. Elles ont des enjeux qui ne sont pas seulement de répartition de la richesse à l’intérieur de l’entreprise, qui visent l’Assemblée constituante, la reprise du contrôle politique sur l’ensemble du monde urbain.

Des révolutions qu’on a pu voir au Maghreb, en Amérique Latine, dont on a pu voir le début en France avec les Gilets Jaunes. La théorie de l’ère du peuple permet d’analyser ce type de révolutions.

La presse a présenté cette école de formation militante comme « une école des cadres », quels publics cette école a-t-elle pour objectif de former ?

Dans l’école de formations, il y a plusieurs formules de formation.

ASP : L’école des cadres, avec une première promotion de 70 personnes, qui sera amenée à grandir (une deuxième promotion débutera son cycle de formation en septembre 2023, ndlr). Avec un weekend de formation chaque mois pendant un an, avec présence obligatoire à tous les cours. C’est un cursus assez lourd. Il débute dès la fin du mois de janvier 2023.

On va également lancer un catalogue de formations pour les groupes d’actions. Il sera en ligne sur le site de l’institut La Boétie. Il y aura courant janvier 2023 toute une série de propositions de formations. Et les groupes d’actions pourront faire des commandes de formation à partir de ce catalogue. Exemple : un insoumis veut une formation sur l’histoire de la République en France ? L’institut disposera d’un vivier de formateurs qu’il enverra sur place dans les groupes d’actions pour former beaucoup plus largement que juste la promotion de 70 personnes qui aura été sélectionnée pour participer à l’école des cadres. Une sorte de formation à la carte.

Comment allez-vous sélectionner ces 70 fameux élus ? Quels sont leurs profils sociologiques ?

ASP : On va essayer de créer une promotion qui représente la diversité du mouvement insoumis, c’est à dire qui représente ses différents secteurs : des membres des jeunes insoumis, des membres du service d’ordre, des membres parmi les camarades qui ont été bénévoles sur les évènements nationaux notamment les campagnes présidentielles et législatives, les animateurs de groupe d’action… Une volonté que les différents secteurs du mouvement soient représentés.

On va veiller à un équilibre géographique, que toutes les régions soient représentées. Qu’on ait un équilibre entre les camarades qui viennent de quartiers populaires, de centre ville, des camarades qui viennent de milieux plus ruraux ou périurbains, etc. Le but à travers cette école c’est aussi d’améliorer notre implantation. Le but c’est que les amis qui ont suivis ces cours soient de véritables ancrages pour le mouvement y compris dans des endroits où on est moins fort actuellement.

On va veiller à ce qu’il y ait un équilibre social : par niveau de revenus, par niveau d’études, par métiers. Que l’école des cadres insoumis ne soit pas que pour les cadres supérieurs du privés. Qu’on s’inscrive dans les valeurs de l’éducation populaire, c’est une école du peuple. On veillera à ce que la représentation sociale qui fait la marque du mouvement insoumis soit respectée.

Est-ce que tu peux nous donner le programme de formation, les thèmes des cours et des noms de professeurs ?

ASP : Tout le cursus est déjà établi. Il s’organise autour de 4 parcours. Chaque weekend les élèves auront un cours de chaque parcours.

Le parcours matérialisme, qui revient sur les analyses marxistes de la société en matière philosophique, économique, sociologique, de relations internationales, les liens avec l’écologie, les liens avec les analyses de Keynes.

Le parcours sur l’humanisme global : le féminisme, l’antiracisme, l’histoire de la République, les histoires révolutionnaires, la philosophie des lumières radicales, le lien à la nature, le lien de l’humain à l’animal, etc.

Le parcours sur la théorie de l’ère du peuple. On revient sur la révolution citoyenne, les enjeux urbains, sur l’anthropocène, sur la financiarisation, sur les évolutions géopolitiques les plus contemporaines.

Et enfin un parcours pratiques militantes où tout y passe : le porte à porte, le fonctionnement de La France insoumise, l’animation de réseaux sociaux, le tractage, l’animation de réunions publiques, etc.

Et les profs ?

ASP : Tous les professeurs sont tous docteurs ou agrégés, profs de lycée ou d’université. Parmi eux il y a des noms comme Razmig Keucheyan, Cédric Durant, Michael Lowy, Benoît Schneckenburger, Cécile Gintrac, Claire Lejeune, Isabelle Garo. On va proposer des choses de haut niveau dans les contenus de l’école.

Et dans l’objectif de vulgariser au plus grand nombre ?

ASP : On a une annonce à faire ! Un partenariat avec l’insoumission.fr ! En utilisant tout ce vivier d’intellectuels qui ont accepté de travailler avec nous, on va les mobiliser pour faire des entretiens vidéos avec l’insoumission pour que le savoir soit diffusé le plus largement possible ! Des entretiens de 30 à 45 minutes à retrouver sur l’insoumission !

Entretien réalisé par Pierre Joigneaux.


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