République : de la « mauvaise » Vᵉ à l’espoir d’une VIᵉ

jeudi 11 mai 2023.
 

Toutes les impasses de la Vᵉ République éclatent au grand jour dans l’actuelle crise politique dans laquelle la France est plongée depuis le début de l’année 2023, sur fond de réforme des retraites. Avec des élections indirectes ou des nominations (Sénat, Conseil Constitutionnel), des législatives sous influence, un pouvoir présidentiel quasi monarchique et un gouvernement qui peut passer une loi en force, la France de 2023 emprunte une pente autoritaire.

Si Emmanuel Macron laisse à voir son goût prononcé pour la pratiques solitaire et autoritaire du pouvoir, sa politique et sa manière de gouverner contre les convenances et contre l’opinion sont rendues possibles par la Constitution de 1958, qui multiplie les régimes d’exception au nom de la stabilité de la Nation. Mais quelle stabilité peut-on avoir lorsque l’on gouverne seul contre tous ?

Nous reviendrons sur tous les blocages inhérents aux institutions de la Vᵉ République et sur le manque de réelle séparation des pouvoirs en France. Une séparation des pouvoirs trop souvent invoquée hypocritement pour faire prévaloir la Présidence sur le rôle de l’Assemblée nationale et sur les intérêts du peuple. Il sera aussi question de la façon même dont les élections se déroulent dans notre pays, comment celui-ci s’est écarté depuis plus de 60 ans des autres démocraties européennes, et enfin de dégager l’horizon grâce à un nouveau régime. La Vᵉ République est moribonde. Vite, la VIᵉ République. Notre article.

La monarchie présidentielle, vestige de l’absolutisme

La monarchie absolue est une référence qui a toujours malheureusement compté dans notre pays depuis le règne de Louis XIV. Longtemps, la passion républicaine a écarté ce péril. Cependant, le passage à la Vᵉ République en 1958 a marqué un certain retour à cette référence absolutiste, en confiant au Président de très grands pouvoirs, de même qu’au Gouvernement, qui depuis cette époque a le plus souvent été dirigé par le même parti que celui du chef d’État.

Il existe beaucoup d’articles dans notre Constitution qui donnent un immense pouvoir au Président de la République. La Constitution du 4 octobre 1958 porte la possibilité de mettre en place un État autoritaire. Si cela n’a pas été le cas auparavant, la démocratie n’a pu continuer à exister que par la bonne volonté des représentants politiques des décennies passées. Après tout, beaucoup soulignent qu’une Constitution créée dans l’urgence pour permettre à un ancien chef militaire de conduire une Nation menacée par un coup d’État n’a rien de démocratique. L’article 16 résume à lui seul cette dérive autoritaire, même s’il n’a été activé qu’une seule fois.

Il nous faut pour cela remonter à 1961, après le putsch d’Alger. Si les officiers responsables du soulèvement ont été arrêtés en quelques jours, Charles de Gaulle s’est vu confier à lui seul les pleins pouvoirs, en vertu de l’article 16, et ce, pour une durée de plus de 5 mois, entre le 23 avril et le 29 septembre. La révision constitutionnelle de 2008 a encadré et restreint l’article 16, en limitant sa durée initiale à 30 jours, suite à quoi le Conseil Constitutionnel doit statuer obligatoirement sur sa validité à plus long terme, si les conditions initiales (péril de la Nation) sont toujours d’actualité.

Le problème, c’est que le Président de la République nomme seul 3 membres du même Conseil, dont son président. Ainsi, tant que les « 9 Sages » ne disent pas stop, les pleins pouvoirs peuvent perdurer.

Parallèlement, le Président reste le Chef des armées et décide des interventions militaires à l’étranger. La réforme constitutionnelle de 2008 a augmenté ce dernier pouvoir, puisque désormais, le chef de l’État peut envoyer les troupes françaises partout dans le monde sans avoir à en référer à qui que ce soit pendant 4 mois. Il reste aussi le seul maître de l’arme atomique dans notre pays.

C’est à ce titre qu’il préside également les conseils de défense et de sécurité nationale. Créés en 1906 dans une situation de guerre probable contre l’Allemagne, ces conseils ne sont devenus institutionnels qu’en 1958, grâce à la Constitution de la Ve République. Le décret de décembre 2009, en pleine ère Sarkozy et « crise du H1N1 », a élargi la quantité de domaines concernés par ce type de conseil, qui peuvent désormais porter sur la sécurité intérieure et sanitaire.

Dans le domaine judiciaire, le Président de la République peut aussi se servir de la grâce, véritable héritage monarchique, pour sauver éventuellement l’un des ses conseillers ou ministres qui seraient condamnés par la justice. Rien ne l’en empêche. Mais d’après l’excellent article de Vie Publique d’où ces informations sont tirées, le pouvoir exécutif a surtout été renforcé au XXIe siècle par la tenue des législatives deux mois après l’élection présidentielle, ce qui constitue par ailleurs un cas unique au monde. Effectivement, dans d’autres pays où plusieurs scrutins majeurs ont lieu la même année, les législatives ont lieu en parallèle des présidentielles, afin qu’il n’y ait pas d’influence possible. Et ce, qu’il y ait scrutin proportionnel ou majoritaire à deux tours.

Les législatives en majoritaire à deux tours, le pire scrutin possible ?

En Angleterre, aux États-Unis, et dans le monde anglo-saxon au sens large, le scrutin pour les législatives se fait au scrutin majoritaire à un tour, mais dans le cadre d’un système politique à deux partis majeurs. Ainsi, dans cette situation, il est inutile d’organiser un deuxième tour afin de départager ces deux forces hégémoniques.

Ailleurs en Europe, les législatives se font à la proportionnelle, souvent avec un seuil de 3 à 5 % pour éliminer les partis les plus petits. La représentativité réelle des partis et mouvements politiques s’avère ainsi nettement plus grande et oblige à des coalitions, des compromis fréquents. À l’inverse, le dialogue politique en France n’est pas prévu par les institutions de la Vᵉ République. Le scénario privilégié est celui d’une famille politique qui a seule la majorité, mais encore plus un parti qui détient plus de 50 % des sièges et n’a même pas de comptes à rendre à d’autres formations de sa propre couleur.

Le Gouvernement, proposé par le Président, doit être approuvé par l’Assemblée. Mais la tenue des législatives après l’élection présidentielle revient à donner une prime au Président élu : cela s’appelle le fait majoritaire. Celui-ci renvoie à l’existence d’une majorité parlementaire stable, cohérente et soutenant, or cas de grave trahison des promesses électorales comme sous F. Hollande, le gouvernement durant toute la durée du mandat du Président de la République. En accord avec le gouvernement, cette majorité ne présenterait dès lors aucun risque pour celui-ci grâce à une loyauté sans faille, qui mène les députés à être qualifiés de « godillots » et le Parlement de « chambre d’enregistrement ».

Le Gouvernement, pas le biais du Premier Ministre, peut décider d’appliquer le 49.3 et même le 47-1, son équivalent au Sénat, que nous avons découvert en mars 2023. Comme Gouvernement et Présidence sont souvent du même bord, à l’exception des rares cohabitations (1986-88 , 93-95 et 1997-2002), beaucoup de citoyens pensent que le 49.3 est un pouvoir présidentiel. Il n’en reste pas moins que 49.3 et 47-1 sont des outils légaux antidémocratiques, ce qui pose déjà en soi un problème majeur.

Pour en revenir au mode de scrutin des législatives et de l’élection présidentielle, nous avons dans notre pays une quantité beaucoup plus élevée de partis que dans les autres nations européennes. Des dizaines de formations dont aucune n’est « triée » par un quelconque seuil, une quelconque exigence de résultats significatifs au soir du 1er tour.

Ainsi la prime à l’unité est immense, la division mortifère. N’importe quel parti, personnalité qui parvient à se présenter a le pouvoir d’enlever les quelques centaines ou milliers de voix à une candidature du même espace politique, de la même famille idéologique.

Ainsi, tant que la gauche est divisée, la bourgeoisie est presque toujours assurée de parvenir automatiquement au 2e tour. En 2017 et 2022, il y avait assez de voix de gauche pour propulser Jean-Luc Mélenchon au 2e tour à la place de Marine Le Pen, et même devant Emmanuel Macron. La situation actuelle après le premier tour de la présidentielle est celle d’un paysage politique est divisé en trois blocs. Cela favorise désormais la constitution d’alliances, comme l’a démontré la constitution de la NUPES. Cette union offre des chances retrouvées pour la gauche de se qualifier au 2e tour en 2027, voire avant, avec comme un des objectifs annoncés, d’instaurer la proportionnelle pour les législatives.

Les législatives de 2017 sont encore plus édifiantes que l’élection présidentielle. Le MoDem, parti de François Bayrou, membre du camp présidentiel, fait à peine plus de 4 % des voix au premier tour. Il se retrouve au final avec 46 sièges à l’Assemblée nationale, soit plus de 8 % de l’Assemblée. LREM, avec 28 % au 1er tour, parvient à s’assurer plus de 300 sièges, lorsque La France Insoumise et le FN (25 % au 1er tour) ne comptent à eux deux que 24 sièges sur 577. Si l’on additionne les différentes composantes de l’actuelle NUPES, à l’époque séparées, même en faisant abstraction de l’étiquette divers gauche, les 4 partis obtiennent seulement 57 députés malgré 25,5 % des votes au 1er tour.

Les mêmes scores à la proportionnelle absolue auraient absolument tout changé, si bien que même LREM associée au Modem et aux Républicains, n’auraient eu que 277 députés, un total insuffisant pour former une majorité. La future NUPES aurait eu 147 députés en 2017, et un poids nettement supérieur dans tous les débats du précédent quinquennat.

Le scrutin majoritaire à deux tours apparaît comme une véritable fabrique à abstention, permettant de plus la magouille électorale, les arrangements entre représentants du « Système » néolibéral. Une partie majeure du rôle des députés, sommés de représenter leur territoire, fait clairement doublon avec la position des sénateurs, alors que ce rôle devrait plutôt revenir aux conseils généraux des départements.

Les sénatoriales, cette « machine à faire gagner la droite »

Cette idée n’est pas issue d’un membre de la gauche radicale, mais d’une tribune signée par Alain Duhamel. Ce dernier estimait que les sénatoriales constituent « une manipulation littéralement unique au sein des sociétés démocratiques » et comme « une machine cynique, conçue pour empêcher la gauche de gagner ». (Duhamel cité dans le Livre Les élections sénatoriales en France : 1875-2015, de Fabien Conord, pages 203-204). Les gens l’ignorent, mais les sénatoriales sont la seule élection en Europe qui se déroule selon deux méthodes de scrutin.

En effet, dans les départements définis comme étant en campagne, le scrutin est majoritaire, là où la droite à la plus de chances de l’emporter au vu de la configuration socio-professionnelle des populations concernées.

Fin 2021, selon l’INSEE, 88 % des communes sont rurales, et d’après les statistiques publiées par Le Figaro, 71,5 % des communes en 2020 comptaient moins de 1000 habitants. Là où la droite est désavantagée, dans les départements les plus urbains, le scrutin est proportionnel, ce qui assure aux partis de cette famille politique d’avoir quand même des représentants élus. C’est ainsi que depuis 1958, la gauche sénatoriale n’a été au pouvoir que pendant 2 ans. La trahison de François Hollande a rapidement eu raison d’elle.

Le Sénat a été dénoncé comme anomalie démocratique en 1998 par Lionel Jospin, alors Premier Ministre. À l’Assemblée, la gauche au pouvoir en 2000 a réussi à modifier le mode de scrutin, augmentant le nombre de départements élisant leurs sénateurs à la proportionnelle.

Le nombre de sénateurs requis aux départements pour être classés dans cette catégorie est passé de 5 à 3. Le Sénat s’y était opposé. Si les réformes menées par la droite, revenue au pouvoir en 2003, ont eu le mérite de réduire à 6 ans la durée des mandats des sénateurs, elles ont permis le retour du scrutin majoritaire dans tous les départements comptant moins de 4 sénateurs.

En 2012, grâce à l’insistance d’une commission présidée par Lionel Jospin, la proportionnelle est revenue dans tous les départements comptant au moins 3 sénateurs. Malgré cette révision, les 70 départements concernés par le majoritaire envoient 168 élus à la « chambre haute », soit près de la moitié de l’effectif global.

En refaisant les dernières élections sénatoriales de 2020 à la proportionnelle sur l’ensemble du territoire, les résultats auraient été légèrement différents. En effet, si l’on ne prend en compte que le 1er tour pour les départements ayant voté en majoritaire, la gauche toutes tendances confondues aurait obtenu 5 sièges de plus, et les forces de droite réunies autour des Républicains 8 sièges de moins.

Mais en France, nous avons un deuxième problème, autre que ces étrangetés de scrutins asymétriques. Les sénateurs, contrairement à l’Espagne, aux États-Unis ou encore l’Italie, ne sont pas élus par les citoyens mais par des grands électeurs (maires, conseillers territoriaux). Le problème, c’est que ces derniers n’ont eux-mêmes pas vraiment été élus pour ça.

Le ou la maire a une responsabilité dans l’élection de sénateurs, qui eux engageront la conduite politique au niveau national. Aux prochaines municipales, il pourrait être bon de demander aux candidats aux élections municipales pour qui ils voteront aux sénatoriales suivantes. Car comme aux législatives, les sénatoriales dans les départements concernés par le majoritaire sont sous la menace du copinage et des arrangements locaux.

Le Conseil Constitutionnel, un « Gouvernement des Juges » ?

Le Conseil Constitutionnel a été crée en 1958, année de naissance de la Vᵉ République. À l’époque, il s’agit d’une première dans l’histoire de France, dont les Républiques précédentes avaient refusé une telle cour juridictionnelle existant hors du cadre de l’Assemblée Nationale. Charles de Gaulle s’y était opposé, François Mitterrand l’avait dénoncée.

Les 9 membres du Conseil, surnommés dès 1958 les « Sages », avec toute la symbolique archaïque associée à ce terme, sont élus pour un mandat unique de 9 ans. Un souci apparaît d’entrée, à savoir que tous les anciens Présidents de la République en sont membres permanents de droit, statut qui n’a jamais été aboli depuis la création de l’organisme en question.

Le Conseil Constitutionnel en tant que tel n’est pas une spécificité française, mais son mode de désignation, si. Nous savons que le Président de la République nomme trois des Sages, dont leur président. Mais depuis 2002, les législatives surviennent juste après la présidentielle.

L’Assemblée Nationale est ainsi vouée à être dirigée par la majorité présidentielle. Or, le président de l’Assemblée Nationale élit lui aussi trois membres du Conseil Constitutionnel. Les trois derniers le sont par le président du Sénat, chambre qui, rappelons-le, n’a été « à gauche » que 2 ans depuis 1958. Ainsi, les citoyens n’ont aucun contrôle direct sur l’identité des futurs membres du Conseil Constitutionnel.

Il n’existe aucune obligation pour eux d’être des professionnels de la Justice ou du Droit Constitutionnel, avocats, juges ou magistrats, contrairement aux Conseils du même type en vigueur dans d’autres pays d’Europe tels que l’Allemagne, l’Espagne, la Belgique ou encore l’Autriche. Les nominations politiques par copinage vis-à-vis du Président de la République, notamment celle de Jacques Mézard, sont dénoncées par des experts du droit tels que le professeur Dominique Rousseau en 2021.

L’impartialité du Conseil a été remise en cause à plusieurs reprises, lorsque Roland Dumas en 1995 a validé les comptes de campagne d’Edouard Balladur malgré 10 millions de francs d’origine inconnue, lorsque Laurent Fabius approuve le projet de pass vaccinal conseillé par McKinsey, dans lequel son propre fils travaille en tant que directeur associé.

En mars 2023, la juriste Laurélie Fontaine, autrice du livre La Constitution maltraitée (edts Amsterdam, 2023), résume l’ensemble de ces critiques dans un entretien avec Le Figaro.

Même si elle refuse l’idée d’un « Gouvernement des Juges », et qu’elle défend l’idée d’un Conseil Constitutionnel qui pourrait être un contre-pouvoir, elle dénonce son fonctionnement actuel, qui validerait automatiquement les décisions de l’exécutif. Selon elle, le Conseil « préfère par exemple s’appuyer sur des notions comme ‘l’intérêt général’, dont il laisse au législateur et au gouvernement le soin de déterminer le contenu. Si donc le législateur et le gouvernement prétendent qu’ils poursuivent l’intérêt général, le Conseil n’interroge pas cette parole et lui confère une valeur constitutionnelle. »

Dans son fonctionnement même, les décisions du Conseil sont à rendre dans un court délai d’un mois. Cela peut même être réduit à 10 jours si le Gouvernement l’exige. Le Conseil peut être accusé d’amateurisme quant aux moyens dont il dispose, et qui contraste tant avec la rémunération financière de ses membres. Les « Sages » ne disposent pas d’assistants, et au total, le Conseil n’emploie qu’une soixantaine de personnes, ce qui est très léger pour un organisme de cette taille, avec une telle responsabilité.

Laurélie Fontaine indique dans son dernier livre que, par comparaison, la Cour Constitutionnelle allemande, basée à Karlsruhe, emploie près de 1500 personnes. De plus, son action n’est limitée par aucune échéance de temps, tout comme son homologue espagnole. Une fois de plus, nous avons l’impression de vivre en France comme dans un monde à part.

Un problème, tant de solutions La démocratie en France est théoriquement en danger depuis 1958, avec une accélération manifeste depuis l’inversion du calendrier qui instaure le fait majoritaire puis la réforme constitutionnelle de Nicolas Sarkozy en 2008. La violence politique qui s’exerce contre le peuple a pris une ampleur qui semble ne plus avoir été connue depuis le régime de Vichy. Mais le problème, c’est que la plupart des agissements du Gouvernement et du Président de la République sont constitutionnels.

Pour sortir de l’impasse, il faut mettre fin à cette Vᵉ République, créée en d’autres temps, pour une autre société, aux circonstances militaires bien particulières, qui, une fois terminées, auraient dû voir le retour d’un régime plus parlementaire.

La France Insoumise, et désormais ses alliés de la NUPES, ont compris depuis des années à quel point les institutions actuelles provoquent un blocage général de la démocratie, qui profite avant tout aux puissants, à la caste. Il y a tant de manières d’établir une VIe République plus juste, plus représentative des opinions publiques, et capable de résoudre les enjeux multiples auxquels nous sommes confrontés au XXIe siècle.

Le Sénat est-il vraiment indispensable ?

Le Portugal, la Suède ou encore la Finlande s’en passent bien, comme des dizaines d’États dans le monde. N’oublions pas notre passé républicain et souvenons-nous que les Constitutions de 1791 et 1848 instituaient un régime monocaméral, c’est-à-dire avec une seule chambre. Ce dernier, en 1848, met fin à la Chambre des Pairs, repaire des notables et aristocrates, créée en 1814 à la Restauration monarchique. Plus près de nous, le premier projet constitutionnel de 1946 ne prévoyait que l’Assemblée Nationale seule, et même si une sorte de Sénat a été finalement crée (Conseil de la République), il avait un pouvoir moindre, réduit à un rôle consultatif.

Dans une VIᵉ République, n’y a-t-il pas de meilleur moyen de relancer la participation aux élections législatives, qu’en redonnant leur vrai poids aux idées, aux programmes ? Et si nous nous mettions enfin à la proportionnelle, comme la plupart de nos voisins européens, chez lesquels aucune loi ne peut être promulguée sans vote des élus ?

Ce mode de scrutin est après tout déjà utilisé en France depuis 2019 pour les élections européennes, qui paradoxalement, sont les seules élections équitables organisées à échelle nationale dans notre pays. Avec toutefois le reproche d’un seuil trop élevé, à 5 %, ce qui a de fait éliminer beaucoup de partis, qui ensemble avaient pourtant rassemblé près de 20 % des voix exprimées. Le recours contre ce seuil a été bien évidemment rejeté par une autre institution du système français, le Conseil Constitutionnel. Un seuil à 3 %, voire 1 % serait plus juste.

Et pour finir, est-il normal qu’en France, le déroulement total des élections soit contrôlé par le Ministère de l’Intérieur et le Conseil Constitutionnel ? Ne faudrait-il pas plutôt confier ce rôle si important à des personnes qui n’aient été nommées ni par le Président, ni par le Premier Ministre ? À l’heure de la dérive autoritaire du pouvoir, n’est-il pas grand temps d’établir une Haute Autorité Électorale, un institut plus indépendant et à même d’exercer cette mission avec davantage de neutralité ?

La principale innovation de la VIᵉ République sera de faire du peuple lui-même l’Institution phare de la France de demain. Une Institution en lien avec l’Assemblée nationale, grâce au dispositif du Référendum révocatoire, la possibilité par un référendum local de révoquer un député ou d’autres élus qui ont manqué à leur devoir, qui ont trahi leurs promesses et leur programme.

Pour parvenir à revenir dans le champ des démocraties européennes, et à montrer une fois encore que l’héritage des Lumières est toujours bien là en France, nous devons d’abord faire en sorte d’élire les bonnes personnes. Dans la poursuite de cet objectif, il convient de comprendre les règles de la Ve République pour mieux pouvoir l’envoyer dans les poubelles de l’Histoire, et passer enfin à ce VIᵉ volet tant désiré en 2023.

Par Victor Gueretti


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