Le patronat des entreprises de sûreté des aéroports prétend que l’on ne peut pas faire grève et vouloir négocier en même temps. Rien n’est plus faux !
Quant à Eva Joly, elle veut " instaurer l’obligation de négocier avant d’utiliser l’arme constitutionnelle qui est la grève". Cela "existe en Allemagne et en Scandinavie et cela donne de bons résultats", a-t-elle observé. "Il y a un côté absurde de commencer un conflit par la grève et négocier après". "En France, il n’y a pas la culture de la négociation préalable. On peut l’instaurer par la loi", a-t-elle dit, comprenant "parfaitement la colère des voyageurs qui voient leurs vacances compromises". Voilà une candidate des Verts qui ne vit pas dans le même monde que celui des salariés payés 1200 euros et subissant chaque jour le rapport de forces patronal.
Il aurait suffi à Eva Joly de se renseigner un minimum :
pour apprendre que les syndicats avaient déposé un préavis le 8 décembre, dix jours avant la grève, mais que le patronat n’en avait tenu aucun compte misant sur le rapport de forces, donc la grève
pour constater que même le ministre Mariani a critiqué "l’état d’esprit du patronat" et regretté qu’en dépit d’un dépôt de préavis le 8 décembre, "les négociations n’ont été ouvertes que la veille du conflit".
pour apprendre à quel point la CFDT considère le dialogue social particulièrement très difficile dans cette branche avec le patronat
pour imaginer qu’à un moment où le patronat utlise des jaunes et où le gouvernement prépare l’intervention des forces de l’ordre dans les aéroports, elle ne se place pas du côté des travailleurs
Le droit de grève est reconnu dans notre Constitution et dans les Conventions internationales que la France a ratifiées. Les seules limitations à ce droit sont permises par la Constitution elle-même ou par l’OIT dans son interprétation des Conventions 87 (Liberté syndicale) et 98 (droit à la négociation collective). Or, il n’est indiqué nulle part que le droit de grève soit suspendu quand les syndicats choisissent d’ouvrir des négociations. C’est même le contraire, le droit de grève fait partie intégrante de la négociation collective : la grève est en soi un élément de la négociation.
C’est justement pour garantir que l’on négociera utilement que le droit de grève est préservé. Autrement, imaginez-vous : de quoi auraient l’air des négociations entre un employeur et des salariés qui ont l’interdiction de faire grève ? Ce ne serait que pure formalité, pure affirmation du pouvoir de l’un sur les autres. Ce qui rééquilibre, possiblement, l’inégalité entre le patron et les travailleurs, c’est précisément le droit de s’organiser en syndicats et de déclencher la grève avant de négocier les conditions de travail.
Quand le Premier Ministre et le Ministre du Travail déclarent qu’on ne peut négocier et faire grève en même temps, c’est un mensonge. Ils devraient faire attention, car la France a déjà été condamnée une fois par l’OIT quand le CNE (Contrat Nouvelle Embauche) a été jugé incompatible avec la Convention 158 (sur le licenciement) de l’OIT qui limite la période d’essai durant laquelle le patron a le droit de licencier sans se justifier. Et les travailleurs en grève n’ont pas à se laisser intimider par des arguments qui ne tiennent debout ni juridiquement ni politiquement.
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