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Le directeur du groupe de presse EBRA aura tenu cinq jours face aux vives tensions internes avant de démissionner. Tout a commencé le 23 janvier, alors que Mediapart révélait les « likes » de Philippe Carli sous des publications de députés du Rassemblement national. Sur le réseau social LinkedIn, il aurait notamment aimé et relayé des messages de Sarah Knafo, eurodéputée d’extrême droite et proche d’Éric Zemmour, et d’éditorialistes de CNews et de Valeurs Actuelles.
Dans un premier temps, le patron de presse s’est dédouané de l’activité de son compte, affirmant que son compte LinkedIn était géré par une tierce personne. Le service de communication du pôle média de Crédit mutuel-Alliance fédérale a ensuite répondu à Mediapart qu’un « like » ne valait pas soutien.
Une gestion « rapide » et « maladroite »
Devant les vives réactions des syndicats Flipac-CGT et des journalistes de ses titres – L’Est Républicain, Le Progrès, Le Dauphiné Libéré et Les Dernières nouvelles d’Alsace entre autres-, il a publié dimanche 26 janvier en ligne son « mea-culpa », qualifiant la gestion de son compte de « rapide » et « maladroite ». L’actionnaire a ajouté « qu’aucune ambiguïté » ne devait peser « ni sur l’indépendance des rédactions ni sur l’impartialité de l’information » du groupe.
La Filpac-CGT a demandé dimanche sa démission avant que les salariés de ses deux titres alsaciens n’envoient lundi une lettre ouverte à la direction : « Nous exprimons notre consternation et notre colère à l’adresse d’un dirigeant décrédibilisé qui entache notre réputation et notre travail ».
Quelques heures après un entretien avec Daniel Baal et Eric Petitgand, respectivement président et directeur général du Crédit mutuel-Alliance fédérale, l’actionnaire d’EBRA annonçait sa démission dans un communiqué envoyé mardi 28 janvier, « une décision responsable » saluée par la banque. « Nous sommes contents et soulagés, confie une journaliste à « La Correspondance de la Presse ». Le soupçon qu’il faisait peser sur les équipes par rapport à ses idées personnelles était difficile à vivre. »
Philippe Carli, fort des 1 400 salariés du groupe Ebra, était aussi président, du Syndicat de la Presse Régionale (SPQR) Reste à savoir, dans un contexte tendu, notamment sur les questions du rapport entre les imprimeries de la presse quotidienne nationale et de la presse quotidienne régionale, s’il va se maintenir dans ses fonctions. Et qui sera, le cas échéant, son successeur.
La CGT a réclamé lundi le départ du président du groupe de presse Ebra, Philippe Carli, en raison de sa « proximité affichée avec des figures d’extrême droite », dont il a « aimé » plusieurs publications sur LinkedIn.
« Nous, élus Filpac-CGT, condamnons fermement la proximité affichée de Philippe Carli avec des figures d’extrême droite et demandons à notre actionnaire, le Crédit mutuel, banque mutualiste, dont les valeurs sont la liberté, la solidarité, la démocratie et l’indépendance, d’en tirer toutes les conséquences », indique le communiqué syndical dans un communiqué.
Le président du groupe de presse Est-Bourgogne-Rhône-Alpes (Ebra), propriétaire de neuf quotidiens régionaux, s’est excusé dimanche d’avoir « aimé » sur LinkedIn des publications de personnalités d’extrême droite. L’homme d’affaires, qui dirige depuis 2017 le groupe propriété du Crédit mutuel, a été épinglé par Mediapart pour avoir « aimé » des messages émanant de personnalités comme la députée européenne (Reconquête !) Sarah Knafo. Il avait d’abord affirmé que son compte LinkedIn était géré par une autre personne, avant de changer de version.
« L’épreuve que nous traversons marquera une étape dans notre lien avec la direction du groupe. Tant d’efforts humains et financiers mis en œuvre ces dernières années pour rendre le groupe Ebra incontournable dans la presse française et promouvoir sa crédibilité et son professionnalisme (sont) mis à mal par des « likes » (j’aime) irresponsables de son dirigeant », regrette le syndicat. Celui-ci déplore également que la direction générale des différents titres du groupe ne se soit pas désolidarisée de ces prises de position, jugeant toutefois qu’il « n’est pas trop tard (…) Tout le monde sait aujourd’hui que « liker », c’est aimer, c’est approuver et c’est même promouvoir ».
De son côté, la CFDT-Ebra « rappelle qu’elle avait alerté il y a plusieurs semaines des dérapages de Philippe Carli, sans résultat. Il est temps désormais que nos nombreux rédacteurs en chef assument leurs responsabilités éditoriales face aux orientations qui leur sont imposées ».
Dans un communiqué, le Crédit mutuel, unique actionnaire du groupe, a prévenu qu’aucune ambiguïté « ne doit peser ni sur l’indépendance des rédactions, ni sur l’impartialité de l’information que nos 4 millions de lecteurs lisent quotidiennement ».
Ebra édite le Dauphiné libéré, le Bien public, le Journal de Saône-et-Loire, le Progrès, l’Est républicain, le Républicain lorrain, Vosges Matin, l’Alsace et les Dernières nouvelles d’Alsace. Il emploie 1 400 journalistes.
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