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Sous la surveillance bienveillante de la police, un millier de militants néofascistes, au visage souvent dissimulé et affichant pour certains des signes néonazis, ont manifesté, samedi 10 mai, lors du traditionnel défilé du Comité du 9-Mai. Étaient présents le militant néonazi Marc de Cacqueray-Valménier et l’ancien trésorier du microparti de Marine Le Pen, Axel Loustau.
https://www.mediapart.fr/journal/fr...[QUOTIDIENNE]-quotidienne-20250510-190444&M_BT=1489664863989
Quelques videos sur ce défilé des néo-nazis revendiqués
https://www.youtube.com/watch?v=YCM...
https://www.youtube.com/watch?v=2jN...
Video NPA : https://www.youtube.com/watch?v=rHr...
La justice autorise une manifestation néofasciste à Paris... mais interdit celle antifasciste
Les riverain·es du VIe arrondissement n’arrivent pas à s’y habituer. Comme tous les ans et malgré la dissolution en 2024 du Groupe union défense (GUD), plusieurs centaines de militants néofascistes ont défilé dans les rues parisiennes, derrière une nuée de drapeaux ornés de croix celtiques, sous la surveillance bienveillante de la police. Le défilé du Comité du 9-Mai (C9M), initialement interdit par la préfecture de police de Paris, a finalement été autorisé après un recours des organisateurs devant le tribunal administratif. Celui-ci a considéré que la préfecture « ne donnait pas d’indication précise sur les militants ultra-nationalistes radicaux qui seraient susceptibles de se joindre à la manifestation ».
Ils étaient pourtant bien là, en rangs par quatre sur le boulevard du Montparnasse, derrière une banderole rendant hommage à Sébastien Deyzieu. Le C9M commémore en effet la mort de ce jeune militant nationaliste, tombé d’un toit dans le quartier en tentant d’échapper à la police après une manifestation contre « l’impérialisme américain » organisée en 1994 par le GUD. Malgré les consignes diffusées à grand renfort de publications sur Instagram par les organisateurs, de nombreux militants arboraient cache-cous remontés jusqu’au nez, lunettes de soleil et casquettes pour dissimuler leur identité.
Dans les rangs, des militants de tout un aréopage de groupes d’extrême droite radicale français et européens se sont rassemblés, pour cette démonstration de force qui sert au moins autant à se compter qu’à rendre hommage à Sébastien Deyzieu. Outre des membres de groupuscules clermontois, parisiens, lyonnais ou vendéens, une importante délégation allemande, arborant des t-shirts du parti néonazi allemand Dritte Weg (Troisième Voie), était présente, ainsi que plusieurs représentants italiens et des membres du groupe néonazi hongrois Légió Hungária.
Si quelques manifestants avaient fait le choix des manches longues pour mieux dissimuler leurs tatouages, de nombreux militants, y compris des membres de l’imposant service d’ordre, arboraient divers symboles néonazis. L’année passée, le service d’ordre avait passé une grande partie du défilé à empêcher les journalistes de travailler, déployant de nombreux parapluies noirs pour obstruer les prises de vues. Changement d’ambiance cette année : au départ du cortège, Jean-Eudes Gannat, chef du groupe angevin dissous l’Alvarium et l’un des porte-parole du C9M, donne la consigne aux gros bras : « Il faut y aller mollo sur les parapluies. »
Les organisations à la manœuvre ont également désigné des porte-parole, parmi les militants les plus identifiés des sphères nationalistes ou identitaires, pour répondre aux journalistes. Outre Jean-Eudes Gannat, qui milite désormais au sein du Mouvement Chouan, on a pu voir Alexandre Boumi, du groupe tourangeau Des tours et des lys, ou Raphael Ayma, du mouvement aixois Tenesoun, se presser pour parler à la presse.
Celui-ci a également été un éphémère collaborateur parlementaire du Rassemblement national (RN), auprès du député du Var Philippe Schreck, avant d’être licencié après la révélation de son embauche par Libération. Cette année, la demande d’autorisation de la manifestation a été déposée par Maylis de Cibon, autre ancienne collaboratrice de député·es RN et ciottistes, membre du syndicat La Cocarde et du groupuscule néofasciste parisien Luminis.
Deux autres cadres de la mouvance se sont en revanche abstenus de parler à la presse. Le militant néonazi Marc de Cacqueray-Valménier, figure centrale des milieux d’extrême droite radicale depuis plusieurs années, était aux manettes de l’organisation, donnant des ordres aux gros bras et s’assurant du bon déroulé du cortège.
Le vingtenaire est un multicondamné pour divers actes violents, dont l’attaque du bar antifasciste Le Saint-Sauveur en 2020 et celle de militants de SOS Racisme lors du meeting d’Éric Zemmour à Villepinte en 2021. Condamné à dix-huit mois de prison dont neuf ferme en janvier dans cette affaire, il a fait appel. Il était également soupçonné d’être l’organisateur d’une descente raciste à l’occasion du match France-Maroc en 2022, et devait être jugé pour ces faits avant que le tribunal prononce la nullité de la procédure.
Axel Loustau, lui, s’est fait encore plus discret, filmant le cortège qui défilait rue de Rennes, casque de moto sur la tête et cache-cou remonté sur le nez. Cadre historique du GUD aux côtés de Frédéric Chatillon, proche de Marine Le Pen depuis leurs années étudiantes, Axel Loustau a accompagné le Front national (FN) puis le Rassemblement national pendant des années. Fondateur d’un groupe de sociétés (sécurité, imprimerie) qui a travaillé pour le FN, il a également été trésorier du microparti de Marine Le Pen, et conseiller régional RN d’Île-de-France (2015-2021).
Déjà présent lors du C9M en 2023, il avait suivi et intimidé le photographe de Mediapart, qui avait révélé sa présence lors du défilé. Marine Le Pen avait ensuite été contrainte de prendre ses distances avec les membres de la « Gud Connection », s’éloignant progressivement du duo Chatillon-Loustau, longtemps actionnaires de prestataires en communication utilisés par le RN. Son fils, Gabriel Loustau, avait pris sa suite et menait, en 2023 et 2024, le défilé du C9M au mégaphone. Il a été condamné en 2024 pour une agression homophobe alors qu’il fêtait la victoire de Jordan Bardella aux élections européennes.
Dans les rues de Paris, les manifestants ont pu tranquillement défiler deux heures durant, dans le silence, au rythme de deux tambours. Environ un millier de personnes ont marché, copieusement huées par les passant·es qui s’indignaient de cette présence néofasciste dans les rues de la capitale. Traités de « nazis » et de « fascistes », les membres du service d’ordre ont eu de la peine à faire respecter les consignes mises en place par l’organisation, qui insistait au départ du cortège sur la nécessité de « ne pas répondre aux provocations ».
Arrivé sur la place du 18-juin-1940, au pied de la tour Montparnasse, le cortège a été visé par des feux d’artifice et accueilli aux cris de « Paris, Paris antifa », auxquels le cortège a répondu par le chant traditionnel des nationalistes-révolutionnaires Europe, jeunesse, révolution. La contre-manifestation antifasciste, prévue sur le même parcours, avait été annulée par la préfecture de police, mais de nombreux militants et militantes et organisations de gauche s’étaient rassemblé·es à un kilomètre de là, place du Panthéon, pour un village antifasciste.
Après deux heures de déambulation, le cortège est arrivé aux abords de la rue des Chartreux, lieu de la mort de Sébastien Deyzieu. Marc de Cacqueray-Valménier semblait avoir oublié : il a bien failli se tromper de rue et a dû compter sur quelques journalistes pour lui indiquer la bonne. Mise à distance, la presse n’a pu assister à l’hommage rendu au militant, dans la cour intérieure de l’immeuble où celui-ci a chuté.
Pendant que des grappes de militants s’approchaient, en rangs, de la porte, une cinquantaine de militants antifascistes entonnaient Siamo tutti antifascisti, maintenus à distance au coin de la rue par le service d’ordre secondé par une compagnie d’intervention de la police. Laquelle a fini par évacuer les contremanifestants, pour laisser les militants néofascistes entonner leur chant Les Lansquenets, traditionnelle chanson nationaliste pourtant bien mal connue des gros bras présents. Les deux années précédentes, les militants avaient préféré prolonger la soirée au cours de concerts néonazis clandestins, dans le Val-d’Oise – en 2024 – ou dans les Yvelines – en 2023.
Youmni Kezzouf
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