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Restitution de l’accord entre le gouvernement de Sa Majesté au Royaume-Uni et le gouvernement allemand concernant la limitation des armements navals du 18 juin 1935. Le sénateur William E. Borah, républicain de l’Idaho, doyen de la commission sénatoriale des relations étrangères, après avoir lu le discours de Hitler, a déclaré aux journalistes qu’il le considérait comme mettant fin aux discussions sur la paix mondiale (Library of Congress).Le 18 juin 1935, le gouvernement britannique signe avec le IIIe Reich un traité naval qui autorise l’Allemagne à porter le tonnage de sa flotte à 35% du tonnage britannique.
Après le rétablissement du service militaire par Hitler en mars de la même année, le traité de Londres constitue une nouvelle entorse au traité de paix de Versailles et de celle-ci, les Britanniques sont autant responsables que les Allemands !
L’Europe, qui pouvait jusque-là espérer une paix durable, va dès lors basculer dans une course quasi-irrésistible à la guerre…
À la suite du traité de Versailles, les dirigeants britanniques ne tardent pas à renouer avec leur souci de l’équilibre des forces sur le Continent. Dès mai 1920, le Premier ministre Lloyd George juge que les Français « veulent faire revivre l’idéal napoléonien ». Son ministre des Affaires étrangères, Lord Curzon, renchérit : « Je crains que la grande puissance dont nous ayons le plus à craindre à l’avenir ne soit la France » (Gérard Araud, Nous étions seuls, une histoire diplomatique de la France (1919-1939), Tallandier).
L’occupation de la Ruhr par les forces françaises et belges en janvier 1923 renforce leurs préventions. Aussi vont-ils regarder avec méfiance les initiatives françaises destinées à contenir l’Allemagne. Ils les jugent avec d’autant plus de sévérité que les clauses militaires du traité de paix sont respectées par la République allemande née à Weimar (à quelques mesures de réarmement près, clandestines donc limitées) jusqu’à l’éphémère gouvernement du général von Schleicher inclus (décembre 1932-janvier 1933).
En nommant Hitler, adversaire de toujours du traité, à la chancellerie le 30 janvier 1933, le président Hindenburg ne pensait pas le déchirer et ne le déchirait pas.
Konstantin von Neurath dans le jardin du ministère des Affaires étrangères devant la statue d’Otto von Bismarck, Berlin, 1933. Agrandissement : Konstantin von Neurath, gouverneur de Bohême-Moravie, en 1939, Bundesarchiv.Il était bien entendu que les nazis ne se mêleraient pas de politique extérieure, la diplomatie restant dirigée par Konstantin von Neurath, ministre des Affaires étrangères depuis l’avant-dernier gouvernement.
De fait, le nouveau chancelier procéda avec prudence. Aucun ambassadeur ne fut changé (à part celui de Washington, démissionnaire) et les discussions sur le désarmement engagées à Genève, sous l’égide de la Société des Nations (SDN), se poursuivirent comme si de rien n’était.
Hitler attendit le 17 mai 1933 pour parler de politique extérieure et le fit devant les députés du Reichstag, où siégeait encore un groupe socialiste, dans des termes tellement modérés que ce groupe vota en faveur du discours.
Le 14 octobre 1933, Hitler rappelle brusquement ses diplomates de Genève et quitte à la fois la Conférence sur le désarmement et la SDN. Il prétexte que Paris et Londres auraient insulté l’Allemagne en admettant un droit égal aux armements pour les principales puissances mais en suggérant pour l’Allemagne une « période probatoire » de huit ans, dont quatre sans aucun droit nouveau. Il fait approuver le retrait de la SDN par un plébiscite, le 12 novembre 1933.
Mais Hitler a soin de souffler le chaud après le froid. En signant le 26 janvier 1934 un traité d’amitié de dix ans avec la Pologne, il rassure tous ceux qui craignaient à juste titre que le prochain conflit ne vienne des revendications allemandes sur le « corridor de Dantzig », un héritage du traité de Versailles qui avait le grand tort de séparer physiquement l’Allemagne de sa province de Prusse orientale.
En juillet 1934, le Times ose encore écrire : « Dans les années qui viennent, il y a plus de raisons de craindre pour l’Allemagne que de craindre l’Allemagne » (Gérard Araud).
Pendant ce temps, le réarmement clandestin de l’Allemagne bat son plein, n’étant dénoncé que par des voix isolées comme celles de Georges Mandel en France et de Winston Churchill en Grande-Bretagne.
Construction du He 111 P-4, l’un des avions technologiquement conçus et fabriqués illégalement dans les années 1930 dans le cadre du réarmement de l’Allemagne sous le Troisième Reich. Agrandissement : ligne d’assemblage de chasseurs en piqué Junkers JU-88 en 1941, destinés au front de l’Est en 1941, Bundesarchiv.
Le premier coup au traité de Versailles survient le 16 mars 1935, quand le Reich annonce coup sur coup l’existence d’une armée de l’air déjà puissante et le rétablissement du service militaire obligatoire, alors que le traité de Versailles ne lui donnait droit qu’à une armée de métier de 100 000 volontaires, recrutés avec des engagements de longue durée. Hitler justifie cette mesure par le fait que la France vient de son côté de porter de dix-huit mois à deux ans la durée du service militaire.
Paris proteste et Londres aussi. La SDN envisage une condamnation de l’Allemagne, sous l’impulsion de la France, de l’Angleterre et aussi de l’Italie mussolinienne, encore loin d’être l’alliée de l’Allemagne.
Les chefs de gouvernement français et anglais accompagnés de leur ministres des Affaires étrangères forment avec Benito Mussolini un « front de Stresa », du nom de la station italienne où ils se rencontrent, du 11 au 15 avril 1935. Ils s’engagent sans plus de précisions à « s’opposer par tous les moyens appropriés » à toute répudiation unilatérale des traités.
Sir John Simon, Adolph Hitler et Anthony Eden à la Chancellerie de Berlin en 1935, Spaarnestad Photo, bibliothèque nationale des Pays-Bas (KB).Mais dans un souci constant d’apaisement, John Simon, Secrétaire d’État aux Affaires étrangères, et Anthony Eden, Lord du Sceau Privé et représentant du Royaume-Uni auprès de la SDN, insistent pour rencontrer Hitler. La visite a lieu les 25 et 26 mars, dans une atmosphère détendue, et Hitler lance un hameçon : il propose un accord limitant la flotte de guerre allemande à 35% de l’anglaise (une offre déjà suggérée à la fin de 1934).
Simon se montre intéressé et propose de recevoir une délégation à Londres pour négocier à ce sujet tout en précisant qu’un tel traité devra prendre place dans un accord général sur la limitation de tous les types d’armement.
La politique française est dominée cette année-là par Pierre Laval, ministre des Affaires étrangères depuis la mort à Marseille de son prédécesseur Louis Barthou le 9 octobre 1934. Lucide sur le péril allemand, il s’est déjà rendu à Rome le 4 janvier 1935 pour préparer avec Mussolini la réunion de Stresa.
Il ose aussi conclure à Moscou, le 2 mai 1935, un traité d’assistance mutuelle avec Staline, toujours dans l’idée de contenir les velléités bellicistes de Hitler. De retour de Moscou, il converse à Varsovie le 15 mai avec Hermann Göring en marge des funérailles du maréchal Pilsudski et tente de le convaincre de réintégrer la SDN.
Là-dessus, Joachim von Ribbentrop, qui n’est encore que le chef de la section de politique extérieure du Parti nazi, se rend à Londres début juin 1935 pour causer des questions navales. Les pourparlers s’ouvrent le 4 juin.
Ribbentrop souhaite signer l’accord sur le chiffre de 35% tout en laissant dans le flou la position de son pays sur toute autre question. Comme Simon exige que l’accord soit présenté comme le premier volet d’un traité général sur le désarmement, Ribbentrop menace de repartir.
Stanley Baldwin, Premier ministre britannique, s.d.Les pourparlers sont suspendus pendant quelques jours, durant lesquels le gouvernement britannique avise les principales puissances étrangères de l’existence et de l’objet des pourparlers, sans pour autant les consulter. Simon rassure Ribbentrop en disant qu’il ne sera pas tenu compte de leurs avis. Sans doute confiant dans ses propres démarches diplomatiques, Laval enregistre la nouvelle avec placidité.
Le 7 juin 1935, à Londres, Ramsay MacDonald, malade, cède la direction du gouvernement à Stanley Baldwin cependant que Samuel Hoare remplace Simon aux Affaires étrangères. Le même jour, à Paris, Laval accède à la présidence du Conseil en remplacement de Pierre-Étienne Flandin.
Ribbentrop et Hoare entament le 14 juin la deuxième phase des pourparlers. L’Allemagne est autorisée à porter sa marine jusqu’à 35% du tonnage de la marine britannique. Elle est aussi autorisée à construire des sous-marins dans une proportion de 45% par rapport aux bâtiments britanniques de même type. L’accord est signé et annoncé le 18, sous la forme d’un échange de notes.
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L’année où le monde a basculé vers la guerre
• 28 avril 1925 : Churchill surévalue la livre • 16 octobre 1925 : conférence de Locarno • 24 octobre 1929 : Jeudi noir à Wall Street • 28 mars 1930 : l’Allemagne dans la déflation • 11 mai 1931 : faillite de la Kreditanstalt Bank • 30 janvier 1933 : Hitler accède à la chancellerie • 12 juin 1933 : Conférence monétaire de Londres • 25 juillet 1934 : assassinat de Dollfuss • 9 octobre 1934 : assassinat d’Alexandre Ier • 4-7 janvier 1935 : Laval rencontre Mussolini à Rome • 16 mars 1935 : Hitler rétablit le service militaire • 11 avril 1935 : le front de Stresa • 18 juin 1935 : traité naval anglo-allemand • 2 octobre 1935 : l’Italie envahit l’Éthiopie • 7 mars 1936 : Hitler occupe la Rhénanie • 17 juillet 1936 : début de la guerre d’Espagne • 12 mars 1938 : Anschluss de l’Autriche • 30 septembre 1938 : les accords de Munich • 9 novembre 1938 : la Nuit de Cristal • 15 mars 1939 : la Wehrmacht entre à Prague • 7 avril 1939 : Mussolini envahit l’Albanie • 4 mai 1939 : « Mourir pour Dantzig ? » • 23 août 1939 : le pacte germano-soviétique
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