Nicolas Sarkozy : "Les Français ont un vrai mec à l’Elysée, qui en a et qui s’en sert ».

vendredi 25 janvier 2008.
 

A force d’être obnubilé par le côté paillette de notre président, on en oublierait presque le fond de son discours réactionnaire. De la visite de Sarkozy au Pape, on retient Bigard, mais pas le discours antilaïque du président. De même sur Carla : on parle de l’Egypte, de la belle-mère, mais sûrement pas du fond du problème.

Commençons par la virée vaticane. Le Canard enchaîné du 26 décembre nous livre quelques passages-clés de l’encyclique sarkozienne. Le nouveau « chanoine honoraire » du Latran aurait ainsi exalté « les racines chrétiennes de la France ». Misère de la philosophie, mais aussi de l’histoire... Non content de confondre la généralité (la confession majoritaire) et l’universalité (la loi républicaine), Sarkozy a affirmé que « c’est par le baptême de Clovis que la France est devenue Fille aînée de l’Eglise ». Rappelons pour mémoire que Clovis était un chef germanique, qui s’est allié avec le clergé contre les Wisigoths : il n’a donc rien de « français »...

Mais l’inculture n’est pas le fond de la pensée du « Guide ». Sarkozy s’est en effet livré, après ce cours d’histoire, à un réquisitoire contre la laicité et contre le loi de 1905. Après avoir mis sur le même plan la « liberté » de l’enseignement, signe de ralliement des cléricaux, et le respect de la laicité institutionnelle, Sarkozy a déploré le fait que « la République maintien[ne] les congrégations sous une forme de tutelle, refuse de reconnaître un caractère cultuel à l’action caritative ou aux moyens de communication des Eglises, répugne à reconnaître la valeur des diplômes délivrés dans les établissements d’enseignement supérieur catholique ».

Voilà le projet de société de Sarkozy : des congrégations financées par les deniers publics, prêchant sa bonne parole aux pauvres, et des diplômes religieux reconnus par l’Etat permettant le recrutement de fonctionnaires par les différentes confessions... Car, à l’évidence, le « supplément d’âme » de la religion fait cruellement défaut à la morale laïque : « l’instituteur ne pourra jamais remplacer le pasteur ou le curé [...] parce qu’il lui manquera toujours la radicalité du sacrifice de sa vie et le charisme d’un engagement porté par l’espérance ». Bref, ce discours concentre tout ce que la droite contient de pire : l’idéologie de la « terre et des morts », le cléricalisme le plus débridé et le discours sur l’espérance conçue comme gage du conservatisme social. Tout ceci fleur bon le pétainisme le plus puant...

Qu’en est-il maintenant de Carla ? Ne pas s’interroger sur ce coup médiatique, parce qu’il relève de la vie privée du président, est une ânerie sans nom, puique cette vie est rendue foncièrement publique par les propres soins de l’interessé. Ainsi, le président aurait commandé il y a peu un sondage visant à tester les noms d’éventuels « premières dames ».

En plus de Carla, Carole Bouquet et Laurence Ferrari étaient pressenties. Il y a donc bien eu réflexion politique, et non coup de foudre vendu par les magazines people... Mais pourquoi Sarkozy a-t-il ressenti le besoin politique d’être accompagné ? Il répond lui-même dans le Canard du 2 janvier où sont reportées ces paroles édifiantes : les Français « ont eu l’habitude d’avoir à l’Elysée, depuis douze ans, Papi et Mamie [...].

Maintenant, [ils] ont un vrai mec à l’Elysée, qui en a et qui s’en sert ». Bigre, notre président aurait-il passé trop de temps en compagnie de Bigard ces derniers temps ? Une nouvelle fois, se cantonner à la grossiereté du personnage nous éloignerait de la véritable explication. En fait, cette crise de virilité priapique s’explique par la volonté de Sarko et de nombreux secteurs de la bourgeoisie de raffermir les pouvoirs présidentiels, de refonder une République autoritaire et monarchiste, après douze ans de pouvoir chiraquien et de résistance populaire. Après les épreuves de la fin 2007 -le départ de Cécilia, le mouvement social et les courbettes devant Kadhafi-, il convenait de restaurer la virilité du chef charismatique, car elle est, comme « l’espérance », un rempart face à la subversion sociale. Nous voilà prévenus. En 2008, le camp émancipateur aura affaire à un président au taquet, gonflé aux hormones de la réaction et du bonapartisme !

Jean-François Claudon


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