L’armée française de 1870 était commandée par des branquignoles réactionnaires

lundi 26 février 2024.
 

Dans les années 1890 à 1914, la France connaît un antimilitarisme (défini comme opposition au militarisme) alimenté par une source inépuisable : le souvenir de la guerre franco-allemande 1870 1871. Les soldats d’active comme les mobiles volontaires ont fait preuve d’un héroïsme patriotique incroyable contrairement à leurs chefs vieillis, souvent incapables, parfois malades, jaloux les uns des autres, politiquement royalistes et bonapartistes autoritaires.

Parmi les ouvrages d’historiens conservateurs sur la guerre de 1870, notons les caractérisations suivantes des militaires dans La légende de Metz du Comte d’Hérisson : "l’absence de dignité et d’énergie nécessaires à l’expression du commandement chez l’officier... l’état-major était vaniteux, ambitieux et insuffisant."

L’écrivain Emile Zola a parfaitement rendu compte de l’état de l’armée lors de l’entrée en campagne dans son roman La Débâcle. "C’était un dénuement extraordinaire, les magasins de Belfort qui devaient tout fournir, étaient vides : ni tentes, ni marmites, ni ceintures de flanelle, ni cantines médicales, ni forges, ni entraves à chevaux. Pas un infirmier et pas un ouvrier d’administration. Au dernier moment, on venait de s’apercevoir que trente mille pièces de rechange manquaient, indispensables au service des fusils... les effectifs partout incomplets, les 430000 hommes se réduisant à 230000 au plus ; les généraux se jalousant, bien décidés, chacun à gagner son bâton de maréchal, sans porter aide au voisin..."

Il est vrai que Zola a souvent fustigé la caste belliqueuse des chefs militaires, arrogante, radoteuse et facilement traîtresse à sa patrie . Cependant, sa description correspond à la réalité.

Ainsi, le général Michel, chef d’une brigade de cavalerie d’élite (8ème et 9ème régiments de lanciers) dans la meilleure grande unité (1er corps d’armée commandé par Mac Mahon) écrit le 21 juillet, deux jours après l’entrée en guerre "Suis arrivé à Belfort ; pas trouvé ma brigade ; pas trouvé général de division. Que dois-je faire ? Sais pas où sont mes régiments."

Huit jours après la déclaration de guerre, l’intendant général de l’armée constate concernant le même corps d’armée placé en avant garde sur la frontière autour de Wissembourg "Le 1er corps n’a ni sous-intendant, ni soldats du train, ni ouvriers d’administration, et, faute de personnel, ne peut atteler aucun caisson" (artillerie).

L’empereur Napoléon 3, chef des armées durant la période où celles-ci sont écrasées par l’armée allemande représente le symbole de cette bande de branquignoles.

2 décembre 1851 : Coup d’état de Napoléon III

Napoléon 3, empereur des crapules autoritaires au service de l’argent roi

1) Napoléon 3 malade

Chef d’une armée comprenant 900 000 hommes mobilisés face aux redoutables troupes allemandes, Napoléon 3 n’est qu’un fantôme parfois assis sur son cheval et parfois sur son pot de chambre.

Atteint depuis 1853 par des calculs dans le système rénal et urinaire, il est sujet à des douleurs violentes, à des urines purulentes et saignantes, à des accès de fièvre, à des phases de rétention nécessitant un pontage. Pour se soulager, il ingurgite des doses importantes d’Hydrate de chloral qui agissent sur lui comme une véritable drogue. Plusieurs traits de sa personnalité durant la guerre de 1870 s’expliquent ainsi : « visage impénétrable, énigmatique, yeux mi-clos d’un bleu délavé, parole lente » (rapport à l’académie des sciences et lettres de Montpellier).

Selon un rapport secret du 1er mai 1853 (donc 17 ans plus tôt), Napoléon III "est toujours dans un état de maladie et de souffrance... La vessie paraît être l’organe particulièrement atteint".

A partir de 1864 les accidents urinaires s’intensifient par leur fréquence et leur gravité, indiscutablement favorisés par les stations prolongées à cheval inhérentes à la fonction impériale : campagnes militaires (Italie en 1859), revue des troupes à l’occasion des grandes fêtes nationales...

En octobre 1965, Bismarck le trouve "d’une grande incapacité".

Lors de son voyage officiel à Biarritz le 22 septembre 1866, le Dr Guillon constate, par le toucher rectal de Napoléon III, des hémorroïdes internes, une prostatite aiguë et de la cystite du col ; des lavements émollients et des cataplasmes amènent une détente rapide et atténuent ses souffrances.

5 décembre 1869 : « Napoléon III souffre de coliques néphrétiques : il pousse des cris effarants, se tord comme un ver, prend des doses massives de laudanum et délire. »

7 décembre 1869 : L’impératrice Eugénie fait placer son époux Napoléon III dans un fauteuil roulant pour qu’il puisse assister au Conseil. A la porte du salon, il s’évanouit, et on doit le ramener dans son appartement.

1er juillet 1870 : Les Docteurs Conneau, Sée, Nélaton, Ricord, Corvisart et Fauvel examinent Napoléon III : "Nous considérons comme nécessaire le cathétérisme de la vessie à titre d’exploration".

19 juillet 1870 : la France déclare la guerre à la Prusse. Napoléon 3 prend la tête de toutes les troupes françaises dans l’Est. Le docteur Sée l’accompagne« emportant une valise d’instruments chirurgicaux, pour le cas d’une intervention urgente ».

Trois semaines plus tard, Napoléon 3 battu, balayé par les armées allemandes donne le commandement général à Bazaine et reprend le chemin de Paris ; sa femme lui ordonne de revenir parmi les soldats de l’armée Mac Mahon (et il obtempère).

Sur son dernier champ de bataille (capitulation de Sedan) « Napoléon III parcourt à cheval le champ de bataille, souffrant le martyre, pissant du sang, littéralement épuisé physiquement et moralement, au point, dit on, d’avoir souhaité la mort au milieu de ses soldats. » ((rapport à l’académie des sciences et lettres de Montpellier).

Napoléon 3 n’est pas responsable de ses maladies. Par contre, il l’est, d’avoir détruit toute structure démocratique à son seul profit par son coup d’état du 2 décembre 1851. Il est également seul responsable d’avoir décidé d’assumer la direction des armées dans un tel état.

Napoléon 3 n’a jamais prouvé de qualités militaires, bénéficiant d’une chance importante durant sa campagne d’Italie contre l’Autriche. Il aurait pu s’entourer de maréchaux et généraux compensant ses faiblesses ; tel n’est pas le cas.

2) Le maréchal Leboeuf

Le maréchal Leboeuf, major-général de l’armée puis chef du 3ème corps, bénéficie de louanges sur le web. Je serai plus prudent ; il a largement contribué à l’entrée en guerre stupide contre une Prusse bien mieux préparée déclarant devant les députés : « Nous sommes prêts et archiprêts. La guerre dût-elle durer deux ans, il ne manquerait pas un bouton de guêtre à nos soldats ». En fait, ils manqueront de tout durant toute la campagne.

Plusieurs anomalies effarantes lors de l’entrée en campagne relèvent de sa responsabilité.

6 août 1870 à Forbach Spicheren : Les charlots (maréchaux, généraux) à la guerre

3) Le maréchal Bazaine

Il commande le 3ème corps d’’armée au début de la campagne de 1870 puis toute l’armée de Lorraine (Garde impériale, 2ème, 3ème, 4ème corps). Il choisit de ne pas soutenir le 2ème corps en pleine bataille car il est jaloux du général Frossard. La retraite imposée à celui-ci entraîne un recul vers Metz puis la capitulation de toutes ses troupes.

Le site Hérodote trace de lui un portrait que je partage : A Metz, le maréchal Bazaine refuse de se rallier au Gouvernement de la Défense nationale, par haine de la République. Non content de demeurer inactif, voilà même qu’il entre en contact avec l’ex-impératrice Eugénie, par l’intermédiaire du général Bourbaki, peut-être dans l’espoir de restaurer l’Empire. Les négociations traînent en longueur. La disette s’installe dans la ville assiégée. Bazaine considère l’avènement de la République comme un danger plus grand encore que la victoire ennemie et le démembrement prévisible du pays. Il renonce en définitive à poursuivre le combat avec l’espoir d’obtenir de Bismarck le droit de se retirer au centre du pays et, une fois la paix revenue, « défendre l’ordre social contre les mauvaises passions ». La capitulation de Metz livre aux Allemands 3 maréchaux, 6.000 officiers et 173.000 soldats !

Sur un plan plus militaire, un paragraphe de Wikipedia me paraît bien résumer la question : Alors que s’offre à lui l’occasion de détruire plusieurs corps de l’armée ennemie suite à la bataille de Mars-la-Tour, le 16 août, il décide, à l’étonnement général de son état-major, de replier son armée de 180 000 hommes à Metz, se laissant ainsi couper de la France libre et donc de ses réserves. Deux jours plus tard, au soir de la bataille de Saint-Privat, le maréchal Canrobert demande désespérément et à plusieurs reprises des renforts à Bazaine, mais ne les obtient pas. Ce dernier ne juge en effet pas Saint-Privat comme une bataille importante et refuse d’engager ses troupes de réserve, pourtant nombreuses. Aucun renfort n’est envoyé aux troupes françaises qui se battent héroïquement sur le plateau et Bazaine n’apparaît même pas sur le champ de bataille.

Dirigeant la seule véritable armée organisée de France à ce moment, il semble convaincu de son importance pour l’avenir de la France et tente de nouer des intrigues, notamment avec l’Impératrice, probablement pour restaurer l’Empire déchu depuis le 4 septembre. Il négocie également avec les Allemands l’autorisation d’une sortie de son armée « pour sauver la France d’elle-même », c’est-à-dire de la poussée républicaine, voire révolutionnaire. C’est sur ce point qu’il s’oppose vigoureusement avec le capitaine Louis Rossel qui veut poursuivre la guerre et ne pas trahir son pays (ce dernier est le seul officier à rejoindre dès le 19 mars 1871 la Commune de Paris). Finalement, les négociations souhaitées par Bazaine s’éternisent et les vivres viennent à manquer dans la cité messine. Alors que depuis la chute de Sedan, le 2 septembre, il représente le dernier espoir du camp français, Bazaine renonce à poursuivre le combat et capitule le 28 octobre.

4) Le maréchal de Mac Mahon

Le maréchal De Mac Mahon est généralement considéré comme un royaliste déterminé, un politique obtus mais bon général.

Il commande en début de campagne le 1er corps d’armée puis toute l’armée du Rhin (1er, 5ème et 7ème corps).

Du début à la fin de la campagne de l’été 1870, son mode de commandement oscille entre absence physique (totalement absent lors du combat de Wissembourg) et absence directionnelle (il ne fait rien pour aligner le maximum de forces à Frœschwiller, il ne fait rien pour stopper la déroute de son armée afin de couvrir la droite des corps réunis autour de Metz).

5) Le général De Failly

Chef du 5ème corps d’armée durant la campagne, il est présenté dans les ouvrages spécialisés comme le favori de l’empereur Napoléon 3 parmi les chefs militaires. Il symbolise bien le comte tellement engoncé dans les certitudes de sa supériorité nobiliaire qu’il est incapable de s’adapter à la nouvelle forme de guerre de masse.

Né en 1810, fils de Louis comte de Failly et de Sophie de Mons de Maigneux, il épouse Felicité de Frézals de Bourfaud. Dès son entrée dans l’armée, il gagne une réputation de cruauté lors du massacre de la Rue Transnonain (extermination par l’armée de tous les habitants d’une maison lors des émeutes populaires de 1934). Profondément ancré dans le cléricalisme conservateur, il commande les troupes françaises qui protègent le pape face aux patriotes italiens.

Durant la campagne de 1870, il se fait surtout remarquer par son incompétence :

- il porte une lourde responsabilité dans la défaite de Frœschwiller (immobilisme, maladresses...)

4 août 1870 Wissembourg Première défaite des chefs branquignoles

2 septembre 1870 Napoléon 3 et son armée capitulent à Sedan B3) 6 août : Bataille de Frœschwiller-Wœrth

- son incapacité à commander en temps de guerre le conduit à laisser ses soldats se faire surprendre au bivouac à Beaumont en Argonne.

C) Beaumont, défaite révélatrice des branquignoles qui commandent l’armée française

- à Sedan, la déroute de ses troupes précipite la capitulation.

6) Le général Ducrot

Chef de la 6ème région militaire (Strasbourg) au début de la guerre, il contribue largement à la confusion qui règne dans les unités françaises positionnées sur la frontière alsacienne (le long de la Lauter).

Au moment où toute la 3ème armée allemande s’apprête à attaquer Wissembourg le lendemain, il fait occuper cette ville par un bataillon de la 2ème division avec pour objectif de fournir les troupes qu’il dirige (1ère et 2ème divisions du 1er corps) en pain (aucune consigne défensive ni de plan pour appuyer le bataillon concerné).

Il participe avec De Failly et Mac Mahon dans la responsabilité de la déroute complète de l’armée du Rhin après

Commandant en chef de la 2ème armée de Paris durant le siège, il est chargé avec 80000 h de mener l’attaque principale pour tendre la main à l’armée de la Loire. Il n’arrive même pas à bousculer les lignes de la division wurtembergeoise, abandonne le terrain conquis et pousse Trochu à la capitulation.

7) Branquignoles, réactionnaires et assassins

Tous ces maréchaux et généraux ont capitulé devant l’armée du roi de Prusse. Ce même Roi de Prusse les a libérés, de même que leurs soldats pour exterminer les Parisiens qui, eux, avaient résisté jusqu’au bout.

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