Conseil constitutionnel... Protecteur institutionnel de la réaction et du capitalisme

jeudi 25 novembre 2021.
 

Le capitalisme s’appuie sur des relais institutionnels, si possible indépendants de « l’exercice de la volonté populaire ». Tel est le cas particulièrement des Cours suprêmes, dont l’exemple type est fourni par celle des USA. Vu l’instabilité chronique de l’économie et de la société générées par le "marché libre et non faussé", elles

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ont été imposées plus avant avec le soutien des Cours constitutionnelles. Rejetant une conception légaliste des , qui les considère comme des « bastions des fondements démocratiques », il affirme qu’elles fonctionnent comme stabilisateurs systémiques et que leur rôle essentiel est de « tenir compte de l’establishment politique du moment » . Les États-nations continentaux de l’après-guerre ont créé et utilisé les nouvelles Cours constitutionnelles comme « étroits corsets » juridiques des nouvelles démocraties établies dans la lutte contre le communisme. Un exemple qui illustre le point de vue de classe d’Anderson sur la loi est l’interdiction du Parti communiste allemand, en 1956, par le Bundesverfassungsgericht.

A) Constitution sous influence

Certains, y compris à gauche et dans le mouvement social, considèrent parfois que la refonte de la Constitution ne serait pas prioritaire par rapport à l’urgence économique et sociale.

En moins de 6 mois, deux décisions très politiques du Conseil constitutionnel ont pourtant montré le contraire. La dernière, du 23 mars, a en partie vidé de sa substance la loi dite "Rana Plaza" destinée à imposer aux multinationales un contrôle du respect des droits humains fondamentaux par leurs sous-traitants et leurs fournisseurs. Un tel contrôle, pourtant ici très modeste sous la forme de l’obligation d’instaurer un plan de vigilance dans chaque groupe, était apparu indispensable. En 2013 plus de 1 100 ouvriers avaient en effet péri dans l’effondrement au Bangladesh d’un immeuble/usine insalubre qui fabriquait des vêtements pour plusieurs grandes marques européennes et hypermarchés. Le Conseil a privé cette loi de toute efficacité en censurant les amendes qu’elle prévoyait contre les firmes récalcitrantes. Il a ainsi donné raison au MEDEF et à l’AFEP, lobby des 100 plus grandes entreprises françaises, qui s’étaient élevés contre cette loi. On notera au passage que figuraient en tête de la saisine du Conseil constitutionnel contre cette loi de salubrité publique les deux bras droits de François Fillon, le député François Baroin et le sénateur Bruno Retailleau. Autre exemple, en octobre dernier, le Conseil a censuré la loi sur le registre public des trusts mis en place à retardement après l’affaire Cahuzac pour limiter l’évasion fiscale, mais aussi toutes sortes d’autres activités illicites ainsi blanchies via des trusts qui permettent à leurs propriétaires de rester anonymes.

A chaque fois, ces modestes avancées du droit ont été empêchées par l’ordre constitutionnel actuel. Celui qui fait primer en vertu de la constitution en vigueur certains principes "libéraux" comme la propriété privée ou la liberté d’entreprendre au détriment d’autres objectifs d’intérêt général. Et surtout qui donne le pouvoir à une instance aussi peu démocratique et légitime que le Conseil constitutionnel de les interpréter y compris dans un sens contraire à la volonté générale exprimée par les représentants du peuple. Garder la Constitution de la Ve République, c’est donc maintenir avec elle un ordre établi de principes économiques et sociaux qui s’imposent à toutes les politiques publiques. C’est le choix de Marine Le Pen qui a redit lors du débat présidentiel son attachement à la Ve République qui "fonctionne bien" ! Ceux qui prétendent changer quelque chose en faveur du peuple sans changer la règle du jeu constitutionnel mentent en réalité au peuple. Les intérêts du peuple n’arriveront au pouvoir en France que si les principes fondamentaux de l’ordre juridique et les pouvoirs qui fixent les normes sont refondus par le peuple lui-même.

Laurent Maffeïs, 28 mars 2017


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