Elections européennes de 1999 : LE BEURRE, L’ARGENT DU BEURRE, ET LES REMERCIEMENTS DE LA CRÉMIÈRE (par Jean-Luc Mélenchon)

mardi 10 mai 2005.
 

Pour l’éditorial du Monde, l’UDF aurait refondé son identité dans l’élection de la présidence du conseil Rhône-Alpes :

"Qu’est-ce que l’UDF ? Il est désormais possible de répondre : l’UDF est le seul parti à droite qui refuse toute sorte de compromission avec l’extrême-droite". D’abord, c’est cruel pour les quelques élus RPR de la région qui se sont joints au (très) maigre équipage de15 voix rassemblées par Madame Comparini. Ensuite c’est aussi un blanc seing bien vite donné. Car ces républicains exemplaires n’ont pas étendu leur ferveur jusqu’au respect de la règle simple qui aurait voulu que le candidat le mieux placé dans le "champ démocratique", celui de la gauche plurielle (60 voix) soit celui sur lequel se reporte toutes les voix des républicains. Mais ne faisons pas la fine bouche. Car la gauche a bien obtenu le beurre, l’argent du beurre et les remerciements de la crémière. En vain les États-Majors du RPR et de Démocratie Libérale jouent-ils à se faire peur avec le spectre d’un ralliement des centristes à la coalition de gauche. Les déclarations de François Hollande au Journal du Dimanche sont claires : "Il ne s’agit pas d’un front républicain ou d’une nouvelle alliance. Il s’agit d’une solution républicaine dans le cadre des clivages gauche-droite". Et ensuite : "Nous sommes fidèles à notre stratégie de gauche plurielle et je ne doute pas que l’UDF, comme Madame Comparini se situe dans l’opposition". La dame a confirmé et son chef, Monsieur Bayrou a passé la deuxième couche sur TFI. Parfait. Les pugilistes de droite se sont bien mis tous seuls dans le sac et ils se sont jetés eux-mêmes dans le Rhône.

Suave dimanche. Là-dessus sont venus deux jours d’injures télévisées. Puis le bouquet lundi soir sur France 2 : Alain Madelin propose pour les élections européennes la formation d’une liste des seuls RPR-Démocratie Libérale, "à parité", pour répondre à l’odieux Bayrou. "A parité" ! Seguin a dû s’évanouir en voyant Madelin augmenter sans cesse son prix pour la scission de l’UDF qu’il a réalisé au compte du RPR. Bref, l’année commence bien : la droite a reconstruit son champ de ruines. Ce n’est pas fini. Il faut encore quelques jours pour que le pays profond ait bien compris ce qu’a fait ce Monsieur Seguin, hier installé dans la posture grommelante et inspirée du prophète gaulliste martyrisé. Oui, c’est bien lui qui a refusé de faire voter, comme il s’y était pourtant engagé, pour la candidate UDF et lui a préféré un candidat de 78 ans, condamné en correctionnelle, membre actif du groupe Millonniste et déjà bénéficiaire des voix du Front National !

Deux têtes pour le prix d’un vote, celle de Millon et celle de Seguin, chacun dans son registre, plus une ingouvernable région pour la droite en prime : carton plein pour la gauche.

La suite est prometteuse aussi. Car le "à parité" de Madelin annonce une grosse cuisine très poivrée dans l’hypothèse d’un rabibochage général de la droite pour les européennes. Il faut laisser mijoter à feu doux. En élisant de larges cuillères de vice-président de droite en -Rhône-Alpes, on devrait déjà obtenir un joli bouillon de rancunes. Rien de tel qu’une grosse frustration de voitures de fonction pour que le ramassis local des prédateurs de la guerre des places dégorge bientôt sur toute la France de droite davantage de poison !

Pendant que ça cuit tout seul, c’est le moment de savourer un autre miracle (espéré et annoncé) : le retour de Chevènement en pleine forme sur TFI. La Gauche Socialiste n’est donc plus seule à militer pour une liste commune de la gauche aux élections européennes. Certes Chevènement renonce (un peu vite à notre goût) à convaincre les Verts de s’y joindre au motif (certes bien incontournable) qu’ils ont déjà choisi une tête de liste et envoyé leurs premiers obus sur le reste de la gauche.

Qu’importe, c’est le fond qui compte ! Si Chevènement y est prêt, quelles surenchères retiendraient Hue ? L’idée va faire son chemin, surtout une fois qu’on en aura fini avec la ratification du lamentable traité d’Amsterdam.

Division à droite, espoir d’union à gauche l’année décidément, commence très bien. En tous cas "sur le papier". Reste à vouloir. Et à faire.


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message