La lutte pour la paix et la justice est une "noble cause". Jusqu’en 1995, avec des hauts et des bas, sur la plupart des zones de crise, quand la communauté internationale se décidait à agir, sa présence, en général massive, se faisait sous forme d’intervention de casques bleus et le mandat était confié à l’ONU.

Estimant probablement cet outil trop lourd pour assurer leur hégémonie sans partage et opérer leurs manigances, les Etats-Unis privilégient depuis l’intervention de l’OTAN.

Cette organisation, dont on va fêter le 50ème anniversaire en avril à Washington et dont la France a quitté le commandement intégré sous la présidence de De Gaulle, est une alliance purement militaire à direction américaine. Scorie de la guerre froide, elle connaît une nouvelle jeunesse surtout à cause de la volonté des pays d’Europe de l’Est de se rassurer face à la Russie, mais elle aboutit à soumettre tout action militaire de l’Europe à un contrôle américain. Or, pourquoi l’Europe laisserait-elle sa défense dépendre de l’humeur de 50 sénateurs à Washington ?

Et nous voilà là au cœur du problème yougoslave. Le président Bill Clinton déclare que "l’intérêt vital des États-Unis est en jeu " au Kosovo. En quoi ? Si ce n’est pour affirmer sa crédibilité d’unique grande puissance impériale.

En quoi des frappes aériennes contre l’armée serbe faciliteront-elles la résolution du conflit au Kosovo ? Un sénateur américain s’interroge : "On bombarde, et après ?"’ Nous ne sommes pas dans le désert arabique ! La guerre propre, c’est à dire sans mort américain !), est impossible dans les Balkans et nul ne pense que les États-Unis soient prêts à affronter l’armée yougoslave sur le terrain.

Des bombardements n’aboutiront qu’à tuer des centaines de civils innocents et à conforter à Belgrade le pouvoir de Milosevic, alors pourquoi cet acharnement américain ?

Il n’y a qu’une seule raison, bien éloigné du droit des peuples à décider eux-mêmes de leur destin : Assurer la crédibilité des États-Unis d’Amérique comme gendarme du Monde.

Ce gendarme a un comportement que ne désavouent pas les bandits qu’il prétend combattre. Il affirme défendre les valeurs universelles occidentales mais il refuse de signer la convention mondiale qui interdit la fabrication et l’usage des mines antipersonnel (comme d’ailleurs la Yougoslavie !). Il ne signe pas le traité d’interdiction totale des essais nucléaires, mais veut y obliger l’Inde et le Pakistan. Il choisit de boycotter Cuba, au nom de la démocratie, mais soutient les émirats et l’Arabie saoudite. Il refuse les contraintes pour lutter pour la protection de l’environnement à l’échelle de la planète, il applique la peine de mort...

L’URSS confondait les intérêts de l’Union soviétique avec ceux du socialisme, les États-Unis confondent les intérêts du Monde avec les leurs. Ce qui est bon pour Ford est peut-être bon pour les États-Unis mais ce qui est bon pour les USA n’est sûrement pas bon pour le reste du Monde.

Le véritable enjeu yougoslave est là.