Hô Chi Minh

dimanche 24 août 2008.
 

B) Nguyên Ai Quôc (Hô Chi Minh), journaliste

De 1920 à 1923, le militant communiste et anticolonialiste va déployer une grande activité. Journaliste, créateur du journal le Paria, il signe de nombreux articles dans l’Humanité. 7/33

Nguyên Ai Quôc est un nom qui ne doit pas dire grand-chose à la majorité des lecteurs de l’Humanité ni, d’ailleurs, à quiconque aujourd’hui. Mais, dès que l’on saura que, plus tard, bien plus tard, précisément en 1942, ce Vietnamien a fini par adopter un ultime pseudonyme, Hô Chi Minh, on sera, enfin, en terrain de connaissance.

De 1918 à 1923, le futur leader vietnamien (on disait alors, annamite ou indochinois) a vécu en France. Tous ses biographes s’accordent à écrire que cette période a été décisive dans le cheminement de sa pensée, dans sa formation politique, prélude à une vie d’action d’une intensité rare. Au début de son séjour, sa culture politique est encore rudimentaire. En tout cas, selon nos critères européens. Car lui sait très précisément ce qu’il veut  : la libération de son pays. Mais, conscient des limites du mouvement nationaliste, il cherche la voie de cette libération.

Il fréquente alors divers cercles politiques, divers clubs de discussion. Fin 1918, il adhère au Parti socialiste, étant ainsi un des tout premiers colonisés à s’inscrire aussi directement dans la vie politique française. Dans le débat alors en cours sur l’Internationale communiste, il est très vite du côté des partisans de l’adhésion. Une seule chose compte, pour lui  : qui s’intéresse au sort de son peuple  ? Qui s’engage à le défendre  ? En décembre 1920, à Tours, il vote, avec la majorité, pour la création d’un parti nouveau. Une photo célèbre le représente, frêle, timide, en train d’intervenir. À ses côtés, une silhouette connue, un peu plus massive, celle de Paul Vaillant-Couturier. Et ce n’est pas par hasard que ces deux futurs dirigeants du communisme international se retrouvent côte à côte. Il insiste sur la complémentarité des luttes des ouvriers françaiset des colonisés

De 1920 à son départ de France, à l’été 1923, Nguyên Ai Quôc va déployer une grande activité. Il est membre fondateur de l’Union intercoloniale. Il crée un journal, significativement appelé le Paria, regroupant des colonisés des quatre coins de l’empire. Mais, désormais, c’est surtout à l’Humanité qu’il réserve ses talents de journaliste  : une vingtaine d’articles en un peu plus d’une année. La plupart portant sur l’Indochine, mais, en bon internationaliste, Quôc décrit également la misère des Noirs d’Afrique, la situation du mouvement ouvrier turc… Pour le révolutionnaire vietnamien, bon élève de Lénine, le journal communiste doit être tout à la fois un organisateur et un éducateur.

Un organisateur  : à une époque où l’idée est encore neuve, il insiste sur la complémentarité des luttes des ouvriers français et des colonisés. Il conclut chacun de ses articles par un appel à l’action  : les militants doivent accorder plus d’attention à la question coloniale. Dans le domaine de l’anticolonialisme, le jeune PCF a des progrès à faire.

Un éducateur  : les Français, alors, les militants du nouveau parti comme les autres, ignorent à peu près tout de la situation coloniale. Dans l’Humanité du 25 mai 1922, il dénonce implicitement, un an et demi après Tours, la passivité du jeune mouvement  : « Le parti français ne peut, comme les Ire et IIe Internationales, se contenter de manifestations purement sentimentales et sans suites  ; mais il doit avoir un plan d’action précis, une politique effective et réaliste. » Or, ce n’est pas encore le cas  ! Dans cet article, très pédagogique, il énonce les causes de cette timidité. La première est la « grande étendue des colonies », l’empire s’étendant sur quatre continents, une mosaïque de peuples, parlant une multitude de langues. Mais, surtout, le jeune Vietnamien a le courage d’appeler les choses par leur nom  : « l’indifférence du prolétariat métropolitain à l’égard des colonies » et « les préjugés ». « Pour l’ouvrier français, l’indigène est un être inférieur, négligeable, incapable de comprendre et encore moins d’agir. Pour l’indigène, les Français, quels qu’ils soient, sont tous de méchants exploiteurs. L’impérialisme et le capitalisme ne manquent pas de profiter de cette méfiance réciproque et de cette hiérarchie artificielle de races pour empêcher la propagande et pour diviser les forces qui doivent s’unir. »

Lignes écrites en 1922. La penséesd’Hô Chi Minh est toujours d’actualité, dans la France du début du XXIe siècle.

Dans l’Humanité du 25 mai 1922 par Nguyê, Ai Quôc

« Dans ses Thèses sur la question coloniale, Lénine a nettement déclaré que l’obligation de prêter l’assistance la plus active aux mouvements libérateurs des pays assujettis incombe aux ouvriers du pays colonisateur. Pour cela, il faut que l’ouvrier de la métropole sache bien ce que c’est que la colonie, qu’il soit au courant de ce qui s’y passe, de la souffrance – mille fois plus douloureuse que la sienne – qu’endurent ses frères, les prolétaires des colonies. Il faut, en un mot, qu’il s’intéresse à cette question. Malheureusement, nombreux sont encore les militants qui croient qu’une colonie n’est autre chose qu’un pays plein de sable en bas et de soleil en haut  ; quelques cocotiers verts et quelques hommes de couleur, c’est tout. Et ils s’en désintéressent complètement. »


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