Biographies du mouvement socialiste : Paul Brousse, un progressiste avant l’heure (site du Parti Socialiste)

samedi 6 septembre 2008.
 

Longtemps anarchiste, Paul Brousse fut le leader incontesté de la Fédération des travailleurs socialistes de France (FTSF), à partir de 1880.Opposant de Jules Guesde, il se rapprocha ensuite de Jaurès, avant la naissance de la SFIO, en 1905. L’éclairage de Jean- Marcel Bichat, délégué national à l’Histoire auprès du Premier secrétaire.

Pouvez-vous rappeler qui était Paul Brousse ?

Il a d’abord été étudiant en médecine, àMontpellier, avant d’adhérer à l’Internationale et de passer en Espagne, en 1872, pour échapper à des poursuites. À Barcelone, il fonde un « comité de propagande révolutionnaire socialiste de la Franceméridionale ». Il rejoint ensuite la Suisse où il entre en contact avec d’autres réfugiés français, proches de Bakounine. Brousse milite longtemps au sein de la Fédération jurassienne – anarchisante – de l’Internationale.

De retour en France, en 1880, il compte parmi les principaux opposants à Jules Guesde.Il ne croit pas en effet à la conception guesdiste d’un parti centralisé, sur le modèle de la social-démocratie allemande. Il est convaincu au contraire que c’est aux groupes locaux et aux fédérations d’élaborer leur programme, au gré des situations. Il reproche aussi aux guesdistes, ces « ultramarins du socialisme », d’être liés aux décisions d’un homme extérieur au parti,hors de tout contrôle :« Leur véritable chef [Marx] est à Londres. » Brousse pense qu’il faut « abandonner le tout à la fois qui généralement aboutit au rien du tout, fractionner le but idéal en plusieurs étapes sérieuses, immédiatiser en quelque sorte quelques-unes de nos revendications pour les rendre enfin possibles ». Les guesdistes l’accusent d’opportunisme et surnomment ses partisans les « possibilistes ».

À quelle occasion met-il la main sur la Fédération des travailleurs socialistes de France (FTSF) ?

En 1882, lors du congrès de Saint-Etienne, les guesdistes quittent la FTSF. La majorité des délégués, autour de Brousse, Allemane et Benoît Malon créent alors le Parti ouvrier socialiste révolutionnaire, avant de prendre, l’année suivante, le titre du premier parti, la FTSF.

Les broussistes envisagent une révolution sociale. Le socialisme doit agir d’abord à l’échelle communale. Les municipalités feront des compagnies privées à monopole - eau, gaz, transports en commun - des entreprises communales et créeront des coopératives ou des industries locales. Ce secteur public s’étendra progressivement et développera dans le monde du travail les capacités gestionnaires. La « République sociale » qui s’établira un jour par la voie du suffrage universel prendra en mains les banques et les grandes industries pour en faire des services publics nationaux.

Comment la FTSF s’organise-telle ?

Elle rassemble surtout des groupes parisiens, des employés et des ouvriers de la petite industrie et de l’artisanat. Paul Brousse représente lui-même le XVIIe arrondissement au Conseil municipal de Paris. En province,ses partisans sont présents dans plusieurs départements : Loir-et-Cher, Indre-et-Loire, Vienne, Côte d’Or et Ardennes. Les possibilistes s’opposent vigoureusement aux guesdistes, tenant même un congrès international avec les trade unions britanniques quand les guesdistes se réunissent avec la social-démocratie allemande. Ils se rapprochent des radicaux pour combattre le boulangisme. Une opposition révolutionnaire conduite par l’ancien typographe Jean Allemane fait scission en octobre 1890, au congrès de Châtellerault. Affaiblis, les broussistes se rapprocheront de Jaurès et des socialistes indépendants pour fonder, au congrès de Tours (1902), le Parti socialiste français, rival du PS de France de Jules Guesde. Paul Brousse continuera à jouer un rôle au sein du conseil municipal de Paris dont il deviendra même le président, en 1905.

Contre Jules Guesde qui croyait la Révolution imminente, Brousse n’excluait pas la possibilité d’une arrivée des socialistes au pouvoir, dans la légalité.

L’ avenir lui a donné raison. En 1896, les socialistes dirigent Lille, Montluçon, Roanne, Limoges, Firminy, Narbonne, Marseille, Toulon, Sète, Carmaux, Dijon. Alexandre Millerand organise le 30mai à Saint-Mandé le premier banquet des maires socialistes. Plus d’un siècle plus tard, le Parti a battu tous ses records en nombre de municipalités, en mars dernier.

Propos recueillis par Bruno Tranchant


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