« Les collectivités doivent préserver leur pouvoir d’achat » (Interview d’André Laignel, Président de l’Observatoire des Finances Locales)

samedi 27 septembre 2008.
 

Quelle lecture faites-vous du projet de loi de finances pour 2009 ?

Hélas, le supplice du garrot dont j’avais parlé il y a deux ans lors du plafonnement de la taxe professionnelle se vérifie. Depuis l’an dernier, la croissance ne rentre plus dans le calcul des dotations de l’Etat aux collectivités locales et, en 2009, l’inflation ne serait plus prise en compte avec le tour de passe-passe qui se met en place. Après avoir commencé par nous dire que l’inflation serait de 2% en 2009, ce que personne de sérieux ne peut croire, on va en effet introduire le FCTVA dans l’enveloppe normée des dotations de l’Etat. De fait, on va se retrouver avec une évolution moyenne au mieux de 0,4% pour une inflation estimée proche de 4% pour les collectivités territoriales. A cela s’ajoute la baisse massive de la plupart des subventions. Certains secteurs sont sinistrés. Sur la jeunesse et les sports, il n’y a pratiquement plus un sou pour les collectivités locales.

Par ce temps de grande contrainte financière, un effort des collectivités ne vous paraît pas justifié ?

Notre attente n’est pas démesurée. Elle est au moins de ne pas perdre du pouvoir d’achat en faisant évoluer les dotations au rythme de l’inflation réelle pour maintenir le pouvoir d’action des collectivités locales. C’est important pour la croissance du pays : le secteur public local réalise 73% des investissements publics en France. C’est vrai que les caisses de l’Etat sont vides, mais ce n’est pas le fait des collectivités locales. C’est celui du gouvernement et du choix politique qu’il a fait d’emblée avec les 15 milliards du paquet fiscal qui n’a eu strictement aucun effet sinon d’améliorer la situation des plus favorisés.

N’est-il pas nécessaire de rationaliser la dépense publique locale ?

Les collectivités depuis un certain nombre d’années on rationalisé leur gestion. On peut toujours réaliser des gains nouveaux, mais il y a un moment où cela devient plus difficile. Les emprunts ont été renégociés pratiquement partout et la démarche de mutualisation des services, entre ceux de la ville-centre et ceux de l’intercommunalité, s’est généralisée. Et puis, il y a aussi de nouveaux besoins à satisfaire et des dépenses que l’on ne peut pas reporter : nos centres d’action sociale n’ont jamais été aussi pleins. L’Etat se décharge de plus en plus sur les communes et les intercommunalités. La suppression du samedi matin dans les écoles primaires, par exemple, aura un coût pour elles.

Que pensez-vous du projet de réforme de la taxe professionnelle ?

La position de l’AMF est claire, nous ne voulons pas un bricolage de plus de cet impôt, mais une refonte complète de la fiscalité locale. Et puis, on ne supprime pas un impôt qui rapporte 15 milliards d’euros sans dire par quoi on le remplace et comment seront garanties les ressources des collectivités locales, ainsi que leur évolutivité. Or, pour l’instant c’est le brouillard. Les entreprises seront-elles toujours mises à contribution mais alors sous des formes différentes ? Est-ce que ce seront les ménages ? Dans cas, ce serait d’un transfert considérable qui affaiblira le pouvoir d’achat.

Propos recueillis par Joël Cossardeaux.


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