Pendant la crise, le combat pour la justice sociale continue

dimanche 12 octobre 2008.
 

Patatras ! Le plan Paulson voté lors d’une séance de rattrapage du Congrès américain vendredi dernier devait redresser la situation sur les marchés financiers. Trichet, Merkel, Barroso, Joffrin, Sarkozy… tous suppliaient les Etats-Unis d’adopter au plus vite ce plan salvateur pour la finance mondiale. Mais trois jours après la ratification en fanfare du plan Paulson, les Bourses mondiales ont subi la plus forte chute de leur histoire (-9% à Paris).

Sur le fond, le plan Paulson est choquant : dégager des milliards d’argent public pour sauver la mise des actionnaires, sans aucune contrepartie, alors que l’Etat américain lève à peine le petit doigt pour venir en aide aux familles expulsées de leur logement trahit un choix de classe écœurant. Si la crise ne devait pas retomber sur le dos des travailleurs, il y aurait quelque chose de révoltant à voir l’ampleur des élans de solidarité dont bénéficient les plus riches quand la météo financière menace leurs affaires. On aimerait que le scandale du chômage de masse bénéficie d’un dixième de cette mobilisation. Mais en plus, le plan Paulson est inefficace. Ces milliards qui ne peuvent enrayer la chute vertigineuse des marchés sont engloutis en pure perte. Résultat, c’est l’argent de l’Etat et des contribuables qui part à son tour en fumée.

Le monde découvre au passage l’impuissance de l’hyperpuissance puissance américaine, malgré l’« union nationale » Bush / Obama et un engagement financier colossal. Car les masses de capital fictif qui circulent dans les rouages de la finance sont sans commune mesure avec les ressources des Etats. Le métier de banquier consiste à prêter davantage d’argent que l’on en a en dépôts. Ainsi les banques créent de la monnaie sans rapport avec la richesse produite. Ce n’est pas nouveau. De 1816 à 1929, le capitalisme a connu pas moins de 14 crises. Or celles-ci ont démarré le plus souvent par un krach boursier ou bancaire dans le pays dominant de l’économie mondiale. Ce n’est que lorsque la puissance publique s’est donné les moyens de brider la banque et la finance, après 1929 et la Seconde Guerre Mondiale que ce processus a pu être contenu (en partie seulement puisque les eurodollars, masses énormes de capitaux privés « off shore », datent de la fin des années 60). Aujourd’hui, la dérégulation des marchés a produit une immense masse de capital-papier que les Etats n’ont aucunement les moyens de racheter à leur valeur nominale. Même la promesse faite ces derniers jours par divers gouvernements européens de garantir les dépôts des épargnants apparaitraient comme des fanfaronnades si d’aventure elles devaient être mises à l’épreuve.

Cela ne veut pas dire que l’action publique est inutile. A court terme il est impossible d’arrêter la chute des cours. Mais la crise est l’occasion de revoir profondément la régulation du secteur financier pour qu’une nouvelle bulle ne se reforme pas et que l’inflation de capital-papier ne reparte pas dès que le système aura touché le fond. Tant que la bride est lâchée sur le cou des spéculateurs, ceux-ci continuent à chercher un véhicule pour leurs exploits, menaçant de fondre sur les secteurs de l’économie qui résistent le mieux à la débâcle, quitte à les y entraîner à leur tour. Au plan financier, c’est le moment de révisions radicales qui seront payantes à moyen et long terme.

Au plan social en revanche, des mesures d’urgence sont indispensables. Les 700 milliards du plan Paulson auraient permis de reloger des centaines de milliers de familles. En France un moratoire sur les prêts relais permettrait d’éviter des drames sociaux. En même temps, ces mesures auraient un effet économique bénéfique. Car la mise en vente des logements saisis par les banques contribue à la chute des cours immobiliers, débouchant ainsi sur de lourdes pertes. De même, le chômage qui explose est l’une des voies par lesquelles la crise financière se transmet à l’économie réelle. La crise de 1929 avait contribuée à l’instauration de l’assurance chômage. Aujourd’hui celle-ci a été rognée pour « responsabiliser » les chômeurs. Mais comment peut-on rendre les chômeurs responsables de cette crise ?

En développant l’assurance sociale aussi bien contre la perte d’emploi que de logement, l’Etat développerait un « bouclier social » face à la crise. Bien sûr pour cela il faut choisir. Lorsqu’il fut question aux Etats-Unis de généraliser à tout le pays une législation en vigueur dans l’Etat de Californie, qui oblige les prêteurs à tenir compte de l’intérêt des emprunteurs, l’association professionnelle des organismes de prêt immobilier répliqua avec beaucoup de franchise qu’une telle législation n’avait aucun sens dans le système capitaliste puisque l’intérêt des prêteurs et celui des emprunteurs était antagoniste. Pour dire les choses crûment, la crise aura lieu et il faut bien que quelqu’un paie. Les politiques actuelles choisissent faire payer la grande masse travailleuse qui n’y est pour rien. Le bouclier social permet de ne faire payer que les plus riches qui ont beaucoup profité du système.


Signatures: 0
Répondre à cet article

Forum

Date Nom Message