L’Espagne ramène de moins en moins sa fraise

mercredi 3 juin 2009.
 

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Comme les Français commencent à se rendre compte que la fraise industrielle en provenance d’Andalousie est dangereuse pour les saisonniers agricoles, pour les consommateurs et pour l’environnement, les ventes de cette "chose" sont en train de s’effondrer

Il y a deux ans, j’avais expliqué dans Politis que les Français consommaient hélas chaque année plus de 80 000 tonnes de fraises industrielles produites en Andalousie sous licence californienne. Une fraise qui avait à la fois l’aspect et le goût d’une tomate. Une fraise produite grâce à des produits chimiques dangereux pour nettoyer les sols (Chloropicrine, dérivés d’acide nitrique, bromure de méthyle, etc.). Des substances qui ont pour premier effet d’empoisonner lentement les travailleurs saisonniers marocains, africains et roumains, qu’ils aient ou non des papiers. Avec des cancers de la peau et des maladies respiratoires. Des substances qui ont pour second effet de stériliser les sols et pour troisième de polluer les nappes souterraines qui alimentent les habitants de la région et les marais du Parc national de Doñana, une des zones de repos des oiseaux migrateurs les plus importantes d’Europe. Pollution qui se concentre peu à peu car la moitié des systèmes d’irrigation sont branchés sur des puis à la fois illégaux et « tolérés ». Cette fraise, produit totalement artificiel et industriel, représente en outre une production hors saison : à partir de clones de fraisiers enfournés dans d’immenses frigos destinés à leur donner « l’illusion » de l’hiver avant d’être mis en terre au mois d’octobre, de façon à ce que les premières fraises soient mures, sous serres, à la fin du mois de janvier. Histoire de devenir produit d’appel très rentable pour la grande distribution qui joue sur le hors-saison.

Ces fraises, sur des sol sableux artificialisés et stérilisés, sont ensuite nourries par un système d’irrigation qui véhicule à la fois des pesticides, des insecticides, des fongicides et des engrais. De la grande industrie alimentaire. A la fin de la saison, les fraisiers sont détruits et tous les plastiques, ceux des serres et ceux qui recouvrent les sols, sont dispersés et entassés n’importe où. Avec les milliers de bidons de produits nocifs abandonnés et portant tous des noms interdits et des signes rappelant que ce qu’ils contenaient est dangereux pour les êtres humains et pour l’environnement. Sans oublier que ces fruits rouges à l’extérieur et vert (et durs) à l’intérieur sont évidemment chargés des traces de tous les produits (interdits ou tolérés) qui ont été utilisés avant et pendant leur production. Ensuite, comme un malheur n’arrive jamais seul, ces fraises parcourent, en deux fois, avec un premier déchargement sur la Plate-Forme Saint Charles de Perpignan, un peu plus de 2000 kilomètres en camions pour parvenir dans les rayons de la grande distribution qui a été à l’origine de cette production. A Perpignan, un laboratoire officiel teste ces fraises mais ses responsables n’ont pas le droit de révéler ce qu’ils ont trouvé comme résidus...sauf aux entreprises qui les vendent, résultats qui ne sont d’ailleurs disponibles que lorsque les fraises, fruits fragiles, sont reparties vers les grandes surfaces. Mais en enfin, comme il y a une justice immanente et que les consommateurs sont de plus en plus méfiants, la consommation de fraises espagnoles en France a baissé de plus d’un tiers cette année et des milliers de tonnes ont du être jetés par les circuits de distribution. Comme quoi il n’est pas nécessaire d’appeler au boycott quand la ficelle est vraiment trop grosse. Cette chute de la consommation des fraises andalouses a d’ailleurs et hélas permis à des producteurs français de cultiver ces fruits dans le sud de la France à peu prés dans les mêmes conditions d’artificialité. Quand ils ne peuvent pas acheter les produits de traitement interdits en France, il leur suffit de franchir la frontière espagnole pour s’en procurer. Il ne reste plus à espérer que le consommateur français leur réservera le même accueil après avoir compris que l’agriculture industrielle utilise les mêmes artifices dangereux et énergétivore des deux côtés des Pyrénées. A la fin du mois de mai, sur France 5, un film racontera l’histoire des fraises espagnoles.

par Claude-Marie Vadrot


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