Fin de campagne, désastre hollandais et tactique Ka

dimanche 7 juin 2009.
 

ENTRE CARROSSE ET CITROUILLE

On était 3000 à Toulouse. 3000 « selon les organisateurs », comme dit l’AFP qui de son côté en avait compté 1600, avant de corriger cette erreur, bien entendu, totalement involontaire quoique si morosement répétitive dès qu’il s’agit d’un de nos meetings. Je reviens à ce blog après une ultime cavalcade de campagne. Il faut écrire vite. En effet la loi m’interdit d’avancer un argument de plus après minuit. On comprend pourquoi. Il s’agit d’empêcher qu’il soit impossible de répliquer. Question d’égalité. Car l’idéal républicain suppose qu’aucun argument ne puisse recevoir son démenti. La contradiction est la condition de la souveraineté du peuple. C’est parce qu’il y a contradiction que chacun est libre d’opiner comme il veut. Noble idéal. Un idéal dont la domination des mass-média dans le système de domination idélogique actuel montre comme il est loin de la réalité. Pourtant je veux respecter l’idée. Mais répéter après minuit ce que je dis partout sans l’écrire est-ce produire un nouvel argument ? Je ne sais pas. Et je n’ai pas envie d’essayer. Force restera à la loi donc.

Peut être reviendrai-je à mon clavier pour tuer le temps, comme on dit, et parler d’une chose ou d’une autre scrupuleusement sans rapport avec les élections européennes. Ce soir, ivre de paroles prononcées, rompu de fatigue, la tête pleine des fracas des dernières heures de meeting et des ultimes émissions de télévision ou de radio où l’adrénaline coule à flot, je jette les dernières gouttes d’énergie pour une ultime polémique. Celle qui m’oppose au Parti socialiste et à sa lamentable tentative de détournement de vote conduite sous le mot d’ordre « vote utile ».Tracts, chaine téléphonique et liste de diffusion mail sont mises à contribution par ce Parti, par ailleurs si peu militant depuis tant de mois, pour tenter de gruger ceux qui le croiraient. Comme le font tous mes amis je demande à ceux qui le veulent bien de rédiger à leur tour un message à mettre en circulation sur leur propre liste de diffusion pour démonter la mystification et les mystificateurs. Juste avant je parle d’un fait majeur : le vote en Hollande. Terrifiant.

LE DESASTRE HOLLANDAIS

Au dernières législatives, en Hollande le Parti Social Démocrate, à quatre sièges d’écart, a failli passer derrière le « Parti Socialiste » lors des dernières éléctions. La différence entre les deux ? Les sociaux démocrates étaient pour le « oui » au traité constititionnel. Ils sont passionnément partisans du Traité de Lisbonne. Ils pratiquent ardemment la cogestion avec la droite à la Commission et au Parlement européens. Ils votent les directives libérales. Banal en somme. Interchangeables avec n’importe lequel de leur homologue du PSE. Ils ont alors choisi de gouverner avec la droite dans leur propre pays, comme ils le font en Europe et comme le leur a enseigné le Parti Social démocrate allemand. Plutôt que de faire l’alliance avec la gauche, c’est à dire avec le Parti socialiste hollandais, exactement comme le Parti Social Démocrate allemand l’a fait plutôt que de gouverner avec « Die Linke ». Vu ?

Résultat ? Le Parti Social Démocrate vient de perdre dix points dans le vote des élections européennes qui ont eu lieu jeudi. La gauche est dans les choux, l’extrème droite progresse de façon spectaculaire. Cette situation, c’est exactement celle que j’annonçais dans mon livre « Enquête de gauche ». C’est celle qui est le coeur de notre décision de quitter le PS, avant que son alliance avec le Centre soit consommée en France et pour la rendre impossible. C’est pour cela que nous avons fondé le Parti de Gauche et que nous avons construit la stratégie du Front de gauche. Le vote de dimanche dira si nous avons franchi le seuil de crédibilité, en dépit de l’échec de notre alliance avec le NPA. L’arc de force rassemblé avec le Parti Communiste, notre Parti de Gauche, La Gauche Unitaire et tant d’autres forces départementales ou locales aura-t-il brisé le cercle vicieux qui condamne la gauche en France à osciller entre le sectarisme et la capitulation, entre répulsion assumée et consommation forcée ? Ce bras de fer est d’une importance historique pour la gauche et pour le pays.

LA TACTIQUE KA

On se souvient du serpent Ka dans le livre de la jungle ? L’hypnotiseur. Il convainc ses victimes de se jeter elle-même dans la gueule de leur prédateur. Ainsi pratiquent les dirigeants socialistes dans les derniers mètres de la campagne européenne. Ces dirigeants ont si bien compris ce que veut dire la dynamique du Front de Gauche et l’enjeu de sa réussite qu’ils jettent dans la bataille pour la faire échouer deux munitions particulièrement fascinantes. D’un côté l’appel à un « Nouveau Front populaire », que proposent en convergence Jean Christophe Cambadélis, premier lieutenant de Dominique Strauss Kahn, et le duo Lienneman Quilès. Comme cela est fait sans aucune mention du fait que ce mot d’ordre est celui du parti de gauche et du Front de gauche depuis sa fondation on devine qu’il y a anguille sous roche, en plus de l’habituelle arrogance des dirigeants socialistes, grands et petits, qui pensent que le monde commence avec eux et n’a de sens qu’avec eux. Evidemment !

Il s’agit en fait, à chaque fois d’une construction autour d’un PS qui serait ainsi dispensé d’avoir à abandonner son orientation centre gauche qui est précisément la cause du désastre en cours. Cette proposition est une sorte de demande d’absolution. Gratuite cela va de soi. Nous consentirions à retourner au giron en échange de notre participation à la comédie des primaires à l’italienne qui ont livré la gauche aux centristes et l’ont politiquement assassiné sous la houlette pitoyable des Prodi et Veltroni. Encore est-là du long terme. « On verra après les européennes » aurait dit Aubry. Pourquoi après ? Parce qu’avant il y a un autre noeud coulant qu’il nous est proposé de nous passer nous même autour du cou. Le vote « utile ».

LE VOTE UTILE MUTILE

Le vote utile ? Utile comment ? Pourquoi ? Voici l’analyse qu’en fait le Parti de gauche sur son site.

 »Le Parti socialiste est-t-il fâché avec les mathématiques ? Ignore-t-il la loi ? Est-il devenu amnésique ? A moins qu’il ne mente sans vergogne pour arracher le vote d’électeurs crédules ? On peut le craindre à la lecture de tracts de dernière minute glissés par le PS dans les boîtes aux lettres. Leur texte circule également par courrier électronique. Il prétend sans honte que pour obtenir des sièges aux européennes les listes doivent obtenir entre 7,7% (Ile-de-France) et 11,1% (Est) et en conclut que le vote PS est le seul vote utile.

Il s’agit là d’une manœuvre mensongère.

La loi est claire : « les sièges sont répartis, dans la circonscription, entre les listes ayant obtenu au moins 5 % des suffrages exprimés » (loi n°77-729 du 7 juillet 1977 relative à l’élection des représentants au Parlement européen).

Les mathématiques aussi : la répartition des sièges se fait en fonction du résultat de toutes les listes ayant dépassé 5%. Au-delà, il n’existe aucun seuil en-dessous duquel une liste est assurée de n’avoir aucun élu.

Quant aux scrutins précédents, chacun peut consulter les résultats par soi-même. Lors des européennes de 2004, 6 députés européens ont ainsi été élus avec moins de 7% des voix : 6,04% (en Ile-de-France), 6,08% (en Ile-de-France), 6,15% (dans la circonscription Sud-Est), 6,39% (Est), 6,80% (Nord-Ouest) ou 6,83% (Nord-Ouest).

0 en droit, 0 en math, 0 en histoire, mais 20/20 en malhonnêteté et enfumage. Le Parti socialiste est décidément tombé bien bas."

TROP TARD

Il est 23 heures quarante. Je dois encore monter en ligne cette note. En vitesse. Il faut donc cesser là avant l’heure où ma belle citrouille se transformerait en odieux carosse ! A bientôt donc, la gorge un peu serrée, je vous dit à lundi matin, le lendemain du vote….


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