Le climat se réchauffe et les négociations se gèlent (ATTAC France)

dimanche 18 octobre 2009.
 

Deux mois avant la Conférence de l’ONU sur le climat à Copenhague, une session préparatoire s’est achevée le 9 octobre à Bangkok.

Elle a été dominée par la discussion du cadre des négociations. La conférence de Copenhague doit en effet statuer sur la deuxième phase du protocole de Kyoto, la première phase expirant en 2012. Or les États-Unis n’ont pas ratifié le protocole qui, malgré toutes ses insuffisances et limites, fixe un cadre contraignant, sous l’égide des Nations unies, et reconnaît de fait la distinction nécessaire entre les responsabilités des pays du Nord au sujet du dérèglement climatique et celles du Sud. Les États-Unis, soutenus par l’Australie, le Canada et, maintenant, par l’Union européenne, demandent la rédaction d’un nouveau texte, fixant des objectifs généraux de réduction des émissions et renvoyant aux politiques nationales le soin de décider le niveau des réductions. Cette configuration reviendrait à supprimer tout mécanisme contraignant pour les pays industrialisés, et à diluer la responsabilité historique des pays du Nord pour l’accumulation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère.

C’est la raison pour laquelle ATTAC soutient les pays du Sud lorsqu’ils refusent cette démarche. Ces derniers réclament que les engagements de réduction d’émissions de gaz à effet de serre correspondent aux recommandations renouvelées du GIEC, à savoir une réduction d’au moins 40% d’ici 2020, par rapport aux niveaux de 1990 dans les pays du Nord, ce qui est loin d’être le cas, en particulier de la part des États-Unis. Par ailleurs, aucune annonce sérieuse n’a été faite en termes de financement de la lutte contre le changement climatique dans les pays du Sud. Les dernières propositions de l’Union européenne en la matière sont très en dessous des engagements préconisés par le PNUD et seraient pour plus de la moitié assurées par des financements privés. Enfin, les pays du Sud refusent que les institutions financières internationales soient au cœur du mécanisme de financement pour les pays du Sud, alors que ces institutions leur ont imposé des politiques aux résultats dramatiques (crise asiatique de 1997, crise argentine de 2001, plans d’ajustement structurel, etc.) et alors que leurs conseils d’administration sont contrôlés par les pays riches.

Il faut que puisse s’engager dès maintenant un autre modèle de développement au Nord et au Sud, fondé sur la sobriété énergétique, sur l’abandon des fausses solutions au changement climatique (agrocarburants, nucléaire, stockage du carbone), sur la justice sociale et le respect de la souveraineté des peuples. ATTAC s’adresse donc en priorité aux gouvernements des pays du Nord pour qu’ils s’engagent de manière contraignante à réduire significativement leurs émissions et qu’ils reconnaissent la dette écologique envers les pays du Sud, en assurant un financement public de la lutte contre le réchauffement climatique, distinct de l’aide au développement, obligatoire et différencié selon la situation des pays et géré par les Nations unies. Cet engagement, dans le cadre des Nations unies, est nécessaire, pour que les pays du Sud abandonnent des modèles de développement qui reproduiraient le modèle productiviste des pays du Nord, en accélérant la marchandisation des biens communs, en niant les droits des peuples indigènes et en creusant encore les inégalités sociales. Le développement privilégié du marché international des droits à polluer et des mécanismes de compensation pour réduire les émissions va à contresens. Ces mécanismes reviennent à exonérer les entreprises et les pays du Nord de leurs responsabilités à diminuer les émissions de gaz à effet de serre chez eux, en achetant des droits à bon marché contre des investissements "propres" dans les pays du Sud, au mépris souvent des réalités sociales. Ces marchés sont par ailleurs très difficilement contrôlables, ils sont soumis aux aléas de la spéculation et des fluctuations inhérents à la logique des marchés. Ils sont vécus par nombre de mouvements sociaux comme une nouvelle forme d’impérialisme écologique. Beaucoup de pays du Sud, soucieux d’attirer des investissements, pourraient accueillir ces investissements, comme ils ont accepté de recevoir les déchets toxiques des industries du Nord, au lieu d’exiger de véritables transferts de technologies, et l’abandon des brevets sur les technologies vertes, qui seront au contraire renforcés dans le cadre des négociations de l’OMC à Genève en novembre.

Pour obtenir des avancées sur toutes ces questions il faut une importante mobilisation internationale pendant la conférence de Copenhague. À Bangkok, en parallèle à la réunion préparatoire de l’ONU, s’est tenue une réunion du réseau international "Climate Justice", qui regroupe de nombreux mouvements sociaux et citoyens du monde entier. En France, le collectif Urgence climatique justice sociale (www.climatjustice.org) agit pour organiser un débat public et pour faire aboutir ces revendications. ATTAC appelle à la constitution dans toutes les villes et régions de France de collectifs pour répondre à l’urgence climatique et défendre la justice sociale. Les réponses au défi du changement climatique exigent en effet l’implication à la base des citoyens, des élus, des mouvements sociaux et écologistes.

Attac France, Montreuil, le 11 octobre 2009

C


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